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Le eSport universitaire, implanté mais encore étrangé

Regard sur le phénomène des jeux vidéos compétitifs sur les campus

Par
Camille Dehaene
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Le eSport, ou sport électronique, est une pratique assez connue. Pourtant, lorsqu’il advient de parler de la ligue universitaire québécoise, l’engouement général est plutôt faible. Si la ligue collégiale est bien ancrée, la ligue de eSport universitaire n’en est encore qu’à ses débuts.

Cependant, le projet n’est pas nouveau : « J’étais à l’École de technologie supérieure (ÉTS) en 2002 et on en parlait déjà à l’époque. Pourtant, la Fédération québécoise de sport électronique (FQSE) n’existait pas, parce qu’elle existe depuis 2016 », explique Louis-David Lalancette-Renaud, président de la FQSE depuis 2019.

Un parcours semé d’idées reçues

Cette lenteur serait due à des stéréotypes et une réticence générale. « Des fois, la haute direction de certaines universités est plus conservatrice », explique Benoît Saint-Amand-Tellier, chargé de cours au microprogramme en développement du sport électronique et membre du conseil d’administration de la FQSE.

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Si l’on parle aussi de problèmes de générations, le président de la Fédération tient à nuancer le propos. « Pac-Man […], c’est quand même une vedette du jeu vidéo qui est là depuis 40 ans. Il y a des gens qui ont joué à Pac-Man qui, aujourd’hui, sont à la retraite ou sur le bord de la retraite. » Selon l’Association canadienne du logiciel de divertissement, la moyenne d’âge des joueurs au Québec est d’environ 37 ans et 57 % des adultes jouent aux jeux vidéo.

L’un des autres facteurs reste l’ampleur des universités qui sont « des gros bateaux ». Le président pense que les universités attendent « que les structures officielles prennent le pas », en faisant référence à un appui gouvernemental, par exemple.

Monsieur Lalancette-Renaud, comme monsieur Saint-Amand-Tellier, se désolent de cette réticence. « On sait qu’il y a des jeunes qui vont préférer un collège à un autre à cause du sport électronique. [Mais les universités] ne veulent pas être dans des choses qui semblent un peu floues. » Il pense que l’eSport est encore vu d’un mauvais œil ou pas encore comme un réel sport.

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Des clubs laissés à eux-mêmes

Face à ce manque d’encadrement, les clubs universitaires doivent se gérer eux-mêmes. C’est le cas de l’Université de Montréal (UDEM) qui fait pourtant partie des clubs des Carabins. « Tout ce qui est gestion de nos activités, c’est 100 % géré par des étudiants », explique le président du club Simon Perrault.

« C’est sûr que ça peut être difficile à la longue parce qu’on n’a pas beaucoup d’encadrement et on gère un peu tout ça du mieux qu’on peut parce qu’on n’a pas non plus les connaissances en gestion des opérations d’une compagnie », une situation qui peut effrayer certaines personnes, selon lui, quand on est étudiant.

En plus de devoir se gérer seuls, ces clubs doivent souvent utiliser leur propre matériel et trouver des solutions de transports pour participer à des compétitions via réseaux locaux ou autres tournois. Le club de l’UDEM s’estime tout de même chanceux puisqu’il a reçu une subvention pour un local.

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« Malheureusement, l’affaire avec ça, c’est qu’il faut faire des rénovations, il faut acheter l’équipement et ça, c’est beaucoup de paperasse. » Il confie que parfois, obtenir une réponse à leurs questions peut prendre des semaines.

À l’Université de Trois-Rivières (UQTR), l’équipe est gérée par le service des activités sportives, ce qui représente un poids en moins pour les joueurs et joueuses. Ces iniquités de gestion entre équipes amènent la Fédération à établir une stratégie.

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Structurer et donner de l’ampleur au projet

« La première étape, c’est vraiment d’assurer qu’il y a une ressource dans toutes les universités pour s’assurer qu’à chaque année, il y a quelqu’un qui est là, qui s’en occupe, puis qui recrute les étudiants », explique monsieur Saint-Amand-Tellier.

Ensuite, il faudrait également réguler les niveaux des équipes et miser sur la création d’évènements. Cette année, en mai, l’UQTR accueillait le tout premier tournoi en présence de la Ligue universitaire québécoise de sport électronique (LUQSE) à Trois-Rivières. Quatre universités s’y sont affrontées : L’Université du Québec à Rimouski, l’École de technologie supérieure, l’Université de Montréal ainsi que l’Université du Québec à Trois-Rivières.

« L’objectif, à mon avis, à moyen terme, c’est qu’on ait un réseau de compétition provincial qui mène après vers un réseau de compétition national puis après ça, nord-américain », rêve le chargé de cours, qui veut organiser un autre tournoi, peut-être même deux, l’an prochain.

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