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L’art de faire de l’argent avec Patreon

Spoiler: ça ne paiera peut-être pas votre loyer.

Par
Florence Nadeau
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J’ai grandi dans le luxe.

Chez mes parents, on avait toujours du prosciutto dans le tiroir à viandes à sandwich, la piscine était chauffée même en pleine canicule et à Noël on recevait chaque année un pyjama bien épais au lieu d’utiliser nos vieux t-shirts devenus minces comme une feuille de riz pour dormir. Le rêve d’un Québécois moyen, quoi.

Maintenant que l’ère des mécènes est révolue, plusieurs artistes se tournent vers les internet pour financer leur travail.

C’est en vieillissant et en décidant de vivre de mon art que le luxe, ça a pris le bord plus vite qu’une lampe laide que tu trouves sur un coin de rue un peu chaudaille et qui t’apparaît, à 4h du matin, « parfaite pour la déco du salon ! ».

Depuis toujours, les artistes et les artisans ont été laissés à eux-mêmes pour financer leur art jusqu’à ce qu’ils tombent sur la perle rare prête à croire en leur talent et à investir en eux. Mais maintenant que l’ère des mécènes est révolue, plusieurs artistes se tournent vers les internet pour financer leur travail.

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L’art d’utiliser internet

C’est la plateforme Patreon qui a retenu mon attention. Plutôt que de payer une seule « pièce » de l’artiste, on paye un petit montant pouvant aller de 1 $ à l’infini et plus loin encore pour du contenu exclusif chaque mois. Mais, est-ce vraiment possible de vivre de son art en utilisant une plateforme de financement par ses fans ?

J’en ai parlé avec mon ami Alex Lévesque, humoriste et créateur de Dessine Bandé, un dessin animé humoristique numérique qui cumule près de 46 000 abonnés sur sa page Instagram. Son compte Patreon attire une centaine de fans qui lui versent mensuellement un montant allant d’un dollar à cent grosses piasses. « Ouin bon, personne paye vraiment cent piasses… C’est plus là dans l’espoir que ! », me dit-il.

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Son Patreon propose six niveaux d’abonnements, le plus populaire coûte 3,50 $ par mois et les abonnés ont droit à une case boni de chaque BD, « une joke d’extra » comme le dit Alex, leur nom au générique, des bandes dessinées exclusives, des mini-podcasts, et plus encore.

Le secret du gros cash

Ce que je voulais vraiment savoir en parlant avec Alex, c’est si un artiste avec un bon fanbase et une offre intéressante pouvait réellement vivre de l’argent qu’il fait sur Patreon. Avec Dessine Bandé, Alex fait environ 400 $ chaque mois. Pas assez pour payer un loyer montréalais, mais certainement assez pour bien vivre dans une coquette ville comme Kingsey Falls. Pourquoi Kingsey Falls me demandez-vous ? Ils ont une très bonne fromagerie pis il lui resterait certainement du lousse pour un sac de fromage en crottes.

«C’est plus genre : donnez-moi du cash, ça fait ben trop longtemps que je donne ça gratuitement sur internet.»

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Pour Alex, ce 400 $ rentre directement dans son compte et il l’utilise pour tout et pour rien. « Je suis pas vraiment dans l’optique d’utiliser cet argent-là pour propulser mes projets artistiques. C’est plus genre : donnez-moi du cash, ça fait ben trop longtemps que je donne ça gratuitement sur internet. »

Un de mes grands questionnements était de savoir s’il ressentait une pression de devoir plaire aux gens qui payent un abonnement Patreon. Pour Alex, au contraire, c’est une sécurité et un facteur motivant. Le pire qui arrive, c’est que les gens se désabonnent. « Les abonnés Patreon, ce sont des vrais fans. C’est symbolique et c’est pour m’encourager beaucoup plus que pour le contenu exclusif. »

Pis Patreon là-dedans ?

Selon Alex, Patreon c’est « un maudit bon flash » pour les artistes qui veulent s’autofinancer. Mais réussir à monétiser son art sur la plateforme en vaut-elle réellement la peine ?

« Beaucoup d’humoristes ont des podcasts là-dessus. Ça c’est plus facile, tu enregistres pendant une heure, ben ça te donne une heure de contenu. Moi, pour 10 secondes de contenu, il y a 4 heures de travail invisible derrière. »

Le secret de devenir rich and famous sur Patreon réside dans le développement de petits projets spécifiques et exclusifs.

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Selon lui, le secret de devenir rich and famous sur Patreon réside dans le développement de petits projets spécifiques et exclusifs. Il a d’ailleurs récemment lancé un nouveau forfait sur son Patreon, celui de Dessine Bandé OnlyFans où pour 10 $ par mois, les abonnés ont droit à des « dessins grivois étranges et rigolos ».

Ce genre de mini-projet exclusif attire automatiquement de nouveaux membres, ce qui du même coup, augmente ses chances de pouvoir se payer un sac de fromage en crottes.

« Le secret c’est vraiment d’attirer le monde vers un tier plus payant… Mais j’dis ça pis je suis pas pantoute marketing, faque je dis un peu n’importe quoi. »

Bref, que vous soyez un tout petit créateur ou Gregory Charles qui a le goût d’un nouveau cellier, Patreon peut certainement donner un coup de pouce financier aux artistes. Mais ça, c’est seulement si des gens comme vous et moi ont assez bon cœur pour leur donner 3 $ par mois.