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Laisser son panier d’épicerie traîner… pour la sécurité des enfants

Sur TikTok, la vidéo virale d'une américaine soulève les passions.

Par
Laurence Niosi
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Laisseriez-vous vos enfants seuls dans la voiture pour remettre votre panier d’épicerie? Une vidéo virale sur TikTok à ce sujet sème l’émoi.

« Je ne retourne pas mon chariot d’épicerie, et vous pouvez me juger si vous voulez », déclare fièrement Leslie Dobson dans une vidéo regardée 12 millions de fois sur la plateforme depuis sa mise en ligne, le 30 mai dernier.

En gros, la mère californienne admet ne jamais retourner son chariot d’épicerie afin de veiller à la sécurité de ses enfants qui l’attendent dans la voiture.

« Je ne mets pas mes courses dans ma voiture, puis mes enfants dans la voiture, puis je ne les laisse pas seuls dans la voiture pour rendre le chariot. Donc, si vous voulez me regarder croche, allez vous faire voir », poursuit-elle d’un ton cinglant.

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La vidéo divise les internautes. Si certains applaudissent la prudence de la maman, d’autres la jugent paresseuse et insensible aux employés du supermarché, ce qui lui vaudra le sobriquet de « Karen du chariot d’épicerie » (dixit @chadsmith.05). Après tout, ne pourrait-elle pas simplement verrouiller sa voiture, le temps de remettre le chariot à sa place?

« J’ai élevé trois enfants et j’ai réussi à ranger le chariot à chaque fois. […] Je les emmenais avec moi pour ranger le chariot et leur apprendre à être responsable », écrit une internaute.

Une autre se demande ce que fait la TikTokeuse quand elle doit faire le plein à la station-service avec ses enfants. « Que fais-tu lorsque tu mets de l’essence dans la voiture et que tu dois rentrer à l’intérieur pour payer? Tu quittes les lieux parce que c’est la même logique que le chariot? », s’insurge-t-elle.

Certains internautes soulignent que son geste en dit long sur son manque de civisme. Le panier se trouve même au centre d’une théorie tout à fait non scientifique : la « théorie du panier d’épicerie » qui soutient que « la décision de restituer un chariot est le test ultime du caractère moral et de la capacité d’une personne à se gouverner seule », écrivait en 2021 le New York Times.

Bref, selon cette théorie et de nombreux internautes, Leslie Dobson n’a pas passé cette épreuve qui détermine si on est une bonne ou une mauvaise personne.

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Sécurité et panier

La vidéo de l’Américaine, qui utilise régulièrement sur son compte le mot-clic #protectourchildren (protégez nos enfants), suscite aussi d’autres questionnements relatifs à la sécurité. Sommes-nous collectivement si obsédés par la question ou est-ce que c’est Leslie, la TikTokeuse, qui n’est pas un peu trop intense sur les bords? De plus, un tour rapide de son compte TikTok nous montre plusieurs vidéos qui abordent les questions de trafic d’enfant, de grooming et autres scénarios catastrophes du genre.

Les enlèvements d’enfants par des étrangers sont pourtant chose rare. L’organisation à but non lucratif Kids and Car Safety a rapporté qu’aux États-Unis, en 2022, quelque 265 enfants ont été enlevés lors de vols de voitures, peut-on apprendre dans un article du Los Angeles Times. Dans de telles circonstances, la personne n’avait tout simplement pas vu qu’un enfant était à l’intérieur du véhicule.

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Selon les données du Réseau enfant-retours, en 2022, sur les 5 000 enfants portés disparus cette année-là, 5 seraient des cas d’enlèvement par des personnes autres que le père, la mère ou le tuteur. Ce nombre représente donc environ 0,1% des disparitions – et exclut toutefois, il faut le dire, la catégorie « cause inconnue ».

Et si les Québécoises surprotégeaient leurs enfants?

La question de la surprotection parentale est en outre revenue dans l’actualité au Québec avec la publication récente d’une étude de l’Institut de la statistique du Québec sur les pratiques et attitudes des parents de bébés nés en 2020-2021.

L’étude Grandir au Québec révèle que quelque 30 % des mères québécoises « surprotègent leur bébé », comparativement à 18 % pour la cohorte précédente (1997-1998).

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Relayée par le quotidien La Presse, l’étude a néanmoins reçu son lot de critiques. Sur les réseaux sociaux, la psychoéducatrice Sarah Hamel remet en question sa méthodologie, soit le questionnaire utilisé pour mesurer la surprotection. L’étude, selon elle, fait un amalgame entre ce qu’elle appelle les « pratiques parentales proximales », comme le cododo et le portage, qui sont normales et saines, et la surprotection, qui peut nuire au développement de l’enfant.

Ne pas laisser son enfant explorer son environnement? Avoir une peur obsessive d’exposer son bébé aux microbes? « Ça, c’est de la surprotection! », dit la psychoéducatrice.

Et le panier d’épicerie, là-dedans ? L’étude n’en parle pas, mais on peut tout de même conclure une chose : ne pas ramener son chariot pour un risque presque inexistant, c’est poche pour les adultes comme pour les enfants.

#protectourchildren, mais aussi peut-être #protectourviedesociété comme du monde.