Où étiez-vous à 26 ans? Ou peut-être que vous vous demandez où vous allez être à 26 ans?
En tout cas, on sait tous et toutes ce que James Di Salvio faisait dans la mi-vingtaine. Le frontman du collectif Bran Van 3000 a donné au monde l’un de ses lendemains de veille les plus célèbres en immortalisant sa vie de party dans le refrain « What the hell am I doing drinking in L.A. at 26? ».
Et 25 ans après le succès international de l’album Glee, Bran Van 3000 remonte sur scène pour le Festival de jazz de Montréal. Même si ça fait un bon bout de temps que James Di Salvio et sa bande n’ont pas fait parler d’eux, on peut parier que beaucoup de gens qui ont connu la musique de la fin des années 90 vivront un petit moment de nostalgie en entendant les premières notes de Drinking in L.A.
On a passé un coup de fil à James Di Salvio pour lui demander si la chanson qui l’a mis sur la mappe lui rapporte encore beaucoup d’argent et pour savoir ce qu’il dirait au James de 26 ans qui a de la difficulté à finir son film.
Gros show au Festival de jazz de Montréal dans quelques jours. Comment te sens-tu pour ton retour à Montréal?
C’est très cool faire ça à Montréal, on va jusqu’à Vancouver pendant l’été, et en région, on va voir le monde, dire merci pour les 25 ans [de Glee]. C’est un grand honneur de vivre ça. Surtout quand t’as commencé à écrire des chansons dans ta vingtaine pour le fun. C’est beaucoup de gratitude.
En 1998, je faisais du backpacking en Allemagne et chaque fois que je disais que j’étais Canadien, on me chantait le refrain de Drinking in L.A. Toi, es-tu tanné de l’entendre?
Bran Van a des centaines de chansons et il y en a une qui est une « diva », qui prend beaucoup de place. (rires) L.A., ç’a été un turboboost pour nous. Beaucoup de gratitude pour ça aussi.
Tu as travaillé avec Youssou N’Dour, Eek-A-Mouse, Momus, plein de DJ et de musicien.ne.s… c’est quoi, ta collab’ de rêve?
J’aimerais travailler avec un mix de nouveaux et de jeunes. J’aimerais beaucoup travailler avec Mark Ronson, ASAP Rocky, Kendrick… J’aime beaucoup J. Cole, ça serait un rêve de travailler avec Van Morrison. C’est ça, Bran Van.
Ç’a été quoi ta toute première job?
J’étais boucher dans une boucherie à la station de métro Berri-UQAM.
Jean Leloup, c’est mon mentor. Il m ’a emmené dans le studio pour la première fois.
Après ça, j’ai été placier au Cinéma du Parc. C’est la période où ils ont ressorti le film À bout de souffle, je pense que je l’ai vu 400 fois. D’ailleurs, c’est venu de là, le clip Isabelle de Jean Leloup [NDLR, réalisé par James Di Salvio].
Quel est le vinyle sur lequel tu as dépensé le plus d’argent? Ou celui qui vaut le plus cher?
J’ai mis beaucoup de mon cash sur des vinyles, mais je ne suis pas un collectionneur qui cherche des affaires. Une fois, je me suis payé la traite sur une version japonaise de l’album de GBH City Baby Attacked by Rats. Je suis pas un collectionneur, mais c’est mon band préféré.
Quand j’étais kid, Leonard Cohen jouait à la Place des Arts et mon père m’a emmené – c’était un ami de Leonard – et juste en face, GBH jouait. Après le show de Leonard, mon père m’a payé la traite et on est allés voir GBH. C’était grandiose.
Qui a eu le plus d’influence sur ta carrière : Jean Leloup ou Moby?
Moby, pas tant. Je lui ai donné Glee et il a tellement aimé qu’il l’a donné à un gars de [la compagnie de disques] Geffen. C’est une vraiment belle histoire, mais c’est plus un compatriote DJ.
Plein de monde me dit que je devrais être maire.
J’adore Moby, mais Jean Leloup, c’est mon mentor. Il m’a emmené dans le studio pour la première fois. C’est lui qui m’a dit « c’est toi qui produis », il m’a dit de prendre le micro pour la chanson Johnny Go. Il m’a mis sur un stage. Tout ça ne se serait pas passé sans Jean.
Si tu pouvais instantanément choisir une autre job, tu ferais quoi?
J’aurais un orphelinat sur un ranch au Montana. J’ai jamais compris pourquoi il y a autant d’orphelins dans le monde et que c’est aussi difficile d’adopter. Ça devrait être une conversation plus ouverte.
Et il y aurait un disco bar dans le grenier ou la grange.
Ou maire de Montréal! J’ai déjà pensé annoncer ma candidature sur le stage. Plein de monde me dit que je devrais être maire. Oui, c’est un long shot.
Quelle est la dépense que tu regrettes le plus?
C’est allé vite pour nous, de 0 à 100 milles à l’heure en 5 secondes à l’époque de Glee.
L’industrie était hungry quand on est arrivés avec notre style. On est passés de manger des ramens et travailler comme des bouchers et des barmaids à jouer avec Bjork et Massive Attack et Ben Harper en très peu de temps. La folie totale, quand tu vis ça très vite, tu penses que ça va toujours être comme ça. Dans cette période-là, il y en a eu, des achats niaiseux.
Comme quoi?
J’aimerais ça te dire qu’on a déjà pitché une Rolls-Royce dans une piscine, mais j’ai pas d’histoire sexy comme ça.
Par exemple, on était tellement fatigués après une tournée de Glee qu’on n’aurait pas dû mettre 100 000$ sur [le logiciel audio] Pro Tools.
Quel serait le meilleur conseil professionnel que tu donnerais au James de 26 ans qui est en train de boire et d’essayer d’écrire son film à L.A.?
Tout est arrivé tellement vite pour moi, j’ai été DJ, ensuite il y a eu Bran Van, le succès planétaire, CD, MP3, downloads, toute l’industrie a shifté depuis.
Donc, ne tiens rien pour acquis. Assure-toi que ton travail est respecté et que le respect et la communication font partie de ton travail tous les jours.
Et n’oublie jamais que « Wu-tang is for the children ».
La question à 100 $ : 25 ans après sa sortie, est-ce Drinking in L.A. (et ses redevances) jouent encore un rôle important dans ton budget?
C’est quand même fou qu’une drinking song ait ironiquement payé la majorité des factures. Yeah. C’est sûr que ça aide, mais ça sert aussi à construire le futur… Il faut remercier le passé et essayer d’arroser le jardin du futur.