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La fois où on a voulu construire un spa maison

Disons qu’aucune demande de brevet n’a été déposée pour la création…

Par
Philippe Julien-Bougie
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Quelque part en mars 2017, j’étais au Cégep, c’était ma semaine de relâche. Avec deux amis, on s’ennuyait éperdument. Cette année-là, la température était plus chaude qu’à l’habitude et nos activités hivernales habituelles s’étaient terminées plus tôt que prévu.

Lorsque trois gars de 18-19 ans s’ennuient, méfiez-vous du résultat. Les idées de choses à faire sont souvent farfelues. «Yo! On fait un spa!» Ces paroles en l’air se sont avérées prophétiques.

Ce qui suit est un ensemble de mauvaises décisions, mais une expérience formidable. Mes amis, œuvrant aujourd’hui dans le domaine scientifique, ne seront pas nommés dans cet article, afin d’éviter qu’ils ne se fassent renvoyer par leur employeur pour stupidité ou ostraciser par leurs pairs.

Le squelette

Tout d’abord, il nous fallait une base, un récipient pour contenir de l’eau ainsi que trois personnes. Après avoir hésité entre un gros bac de recyclage ou un coffre de pickup, nous nous sommes entendus pour prendre de grosses bûches qu’on a placées en cercle. Ces bûches ont été recouvertes par une bâche verte qui ferait office de toile. Nous avions notre base. Il ne manquait plus qu’à la remplir d’eau.

Un rond de bûches, c’était notre base…
Un rond de bûches, c’était notre base…
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La Pachamanca

Le plus gros défi quand on fait un spa, ce n’est pas de trouver un espace baignable, mais bien de chauffer l’eau et que cette eau conserve sa chaleur malgré l’air extérieur froid.

Inspirés par la Pachamanca, une méthode de cuisson péruvienne consistant à cuire des aliments avec des pierres chaudes, nous avons essayé de chauffer l’eau avec des roches préalablement passées dans le feu. (Je répète que mes amis travaillent aujourd’hui dans le domaine scientifique…)

Le spa
Le spa
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Inutile de vous dire que cette stratégie fut un échec lamentable. Les roches perdaient leur chaleur en un rien de temps et ne chauffaient que trop peu l’eau. Il nous aurait fallu 1 000 roches brûlantes minimum.

De bonne guerre, nous nous sommes mutuellement convaincus de tenter le spa quand même. L’eau était évidemment congelée. Trente secondes après notre entrée, nous sommes sortis de notre bain à la course pour nous réfugier à l’intérieur.

Un semblant de réussite

La partie la plus gênante de cette histoire, c’est qu’elle s’échelonne sur plusieurs jours. Le lendemain de notre première baignade, nous devions trouver une solution. Eurêka! Il nous fallait un feu dans l’eau! Ouin. Ça sonne moins intelligent que ça le sonnait dans ma tête à l’époque…

Il nous fallait un récipient de métal qui serait l’hôte d’un feu. Les parois métalliques du récipient chaufferaient l’eau. En alimentant le feu quelques heures, notre spa serait assurément chaud.

Après avoir fouillé le cabanon de fond en comble, nous sommes tombés sur la perle rare: une cuve métallique. Placé au milieu du spa, sur un tapis de roches pour ne pas brûler la toile, le récipient a été rempli de bûches. Quelques heures après avoir parti le feu, nous n’en croyions pas nos yeux: le spa était réchauffé. Une douce vapeur s’échappait de l’eau. Ce n’était pas très chaud, mais baignable.

Un feu au milieu du spa. Si j’avais su que cette photo se serait retrouvée dans un article 5 ans plus tard, j’en aurais pris une meilleure.
Un feu au milieu du spa. Si j’avais su que cette photo se serait retrouvée dans un article 5 ans plus tard, j’en aurais pris une meilleure.
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Ne voulant pas perdre la chaleur, nous avons convenu qu’il faudrait garder la cuve en feu dans le spa… à quelques centimètres de nous. (Est-ce que je vous ai dit que mes amis œuvrent dans le domaine SCIENTIFIQUE aujourd’hui?) Il ne fallait surtout pas toucher le métal, nous aurions pu nous brûler. Quelques minutes plus tard, en effleurant le métal, nous avons réalisé que la partie de la cuve se trouvant sous l’eau n’était pas brûlante, seulement chaude. Juste assez chaude pour être confortable. Nous avons donc passé toute la soirée à donner des câlins à un feu flottant pour se garder au chaud. Sans ça, nous aurions eu beaucoup trop froid. Quel succès, nous avions construit un spa (genre)!

La bouilloire

Semble-t-il que, pour mes comparses, ce n’était pas suffisant. La fin de semaine suivante, ils ont voulu répéter l’expérience, mais en MIEUX. Par malheur, je n’étais pas présent. La seule preuve que j’ai de leur expérience, c’est la brûlure sur la main de mon ami. La légende dit qu’ils remplissaient le spa de neige pour le refroidir, tellement l’eau était chaude.

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« On a mis une pompe à aquarium dans l’eau […] branchée à une prise 110 volts, donc au moindre bris on était électrocuté », me dira plus tard un des cerveaux derrière la bouilloire.

Pourquoi une pompe à aquarium? Eh bien, cette pompe servait à pomper de l’eau qui passait dans un serpentin allant au-dessus du feu. Lorsqu’elle sortait du serpentin, l’eau bouillait.

Ce n’était sans doute pas l’expérience la plus intelligente, mais l’une des plus satisfaisantes de ma vie. Étant le seul épargné des brûlures, je regrette quand même d’avoir manqué la bouilloire.

Dehors ne vous encourage aucunement à faire un spa semblable. Cependant, l’ennui peut parfois nous donner des idées farfelues et stimulantes. En espérant que le nouveau confinement vous encouragera à faire aller votre créativité de patenteux.euse… en toute sécurité!