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J’tu obligée de suivre la mode ?

Parfois la mode, c’est de pas être à la mode.

Par
Arianne Maynard-Turcotte
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Des sourcils, ça s’achète pas au Yellow

Tout mon secondaire, j’ai eu l’air d’une Baby Spice non sexuellement active avec mes plateformes hautes comme deux schtroumpfs (un schtroumpf est haut comme trois pommes, faites le calcul). La mode est passée et les souliers ballerines hyper-plats-pas-de-semelles-qui-font-mal-aux-genoux sont devenus cool.

Mes plateformes Bliss bleues, je les ai gardées une dizaine d’années dans le fond de ma garde-robe. Mais au moment même où elles ont touché le fond de la boîte de don dans le parking du Maxi, Glenn Close décidait dans son bureau de Milan* que les plateformes redevenaient tendances.

*Oui, mon seul référent du monde de la mode est le film Devil Wears Prada.

Durant cette même époque de bébé Destiny’s Child pas bootylicious, je m’épilais les sourcils pour qu’il me reste moins de poils au-dessus des yeux que sur Robert Lepage au grand complet. Sauf que cette année, c’est en vogue d’avoir deux chenilles en haut des pupilles.

Les tendances, c’est fait pour nous faire consommer.

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Les tendances, c’est fait pour nous faire consommer. Ça passe d’un extrême à l’autre pour nous obliger à acheter, je comprends. Que la mode des plateformes revienne, ça peut passer. Mais sérieux, des sourcils, ça s’achète pas au Yellow.

On porte du McDo

Fut un temps où il y avait une collection automne-hiver et une autre printemps-été. Sauf que l’industrie de la mode considère maintenant qu’il y a une saison chaque semaine. Sorry Daniel Bélanger, il y a maintenant 52 saisons dans le désordre… Et donc probablement plus que deux printemps aussi.

Les magasins reçoivent des nouvelles fringues une à deux fois par semaine pour nous faire sentir out of trend 52 fois par année.

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Le concept : les magasins reçoivent des nouvelles fringues une à deux fois par semaine pour nous faire sentir out of trend 52 fois par année. Leur but? Qu’on dilapide notre cash vite vite vite, vite vite, vite vite. C’est ce qu’on appelle la Fast Fashion Industry. En gros, on porte du McDo.

Fast, tu dis? Quand un grand couturier fait un défilé, ça prend maximum deux semaines pour que des répliques quasi exactes de ses créations se retrouvent chez H&M, Forever 21 et Zara.

Pourquoi j’achèterais un jacket Gucci à 3400$ quand on peut avoir le « même » pour 34,90$ chez Forever 21? Après Fast and Furious, je propose le film Fast and Cheap. (En plus, y a moins de danger qu’un acteur meure en magasinant au Carrefour Laval.)

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Buy Buy Buy (à fredonner sur l’air de *NSYNC)

La Fast Fashion a fait exploser les ventes de vêtements plus vite qu’un Mentos dans une bouteille de Coke. En 2016 seulement, H&M a ouvert 427 nouveaux magasins, c’est plus d’un magasin par jour. En gros, chaque fois que tu te masturbais en 2016, un H&M ouvrait.

D’après le documentaire The True Cost, la consommation mondiale de linge a augmenté de 500% par rapport aux années 1990. Le pire, c’est que d’après une étude de l’université Harvard, on magasine 83% du temps pour remplacer un item précis et si c’était possible, on rachèterait exactement le même.

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Mais pas question pour les géants du linge (et je parle pas du Tigre) de nous faciliter la tâche. L’important c’est d’attirer les acheteurs pis de les faire dépenser. Un centre commercial, ça survit pas juste grâce aux vieux qui jouent aux échecs dans le food court.

Mon plus gros problème avec ça, c’est pas l’argent que ça me coûte (ok, quand même un peu), mais c’est surtout le coût environnemental et éthique. L’industrie de la mode serait la deuxième plus polluante après celle du pétrole. Trouvez l’erreur : on met nos lentilles dans des pots Mason, mais on continue d’acheter trois t-shirts pour 10$ au Old Navy.

J’tu obligée de suivre la mode?

H&M a dit : « La mode passe, le style reste ». Ok, c’est Coco Chanel ou Yves Saint-Laurent qui a dit ça… Mais comme les sites de citations quétaines s’entendent pas sur la paternité de la phrase, je l’ai attribué à H&M qui doit ben l’avoir copié à un moment donné.

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Tout ça pour dire que les tendances, ça dure pas. Le mieux, c’est de trouver un style qui nous est propre (et pas sale).

Donc, j’tu obligée de suivre la mode? Pas du tout.

D’ailleurs, c’est pas mal la mode de pas suivre la mode.

J’ai moi-même commencé à magasiner dans les friperies. Je m’étonne d’y trouver de nombreux morceaux de top qualité que je n’aurais jamais pu me payer neufs. En plus, ça me rend fière de ne pas participer à l’industrie du prêt-à-jeter.

D’ailleurs, c’est pas mal la mode de pas suivre la mode. Tant mieux! C’est cool de porter les morceaux seconde main les plus laids-beaux possibles. (Merci pour ça Jay Du Temple.) Mais alors, si c’est à la mode de pas être à la mode, est-ce que je deviens à la mode en voulant pas suivre la mode…? (Pierre Légaré sort de ce corps.)

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