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J’tu obligée d’avoir un but dans la vie ?

Ceci n’est pas un appel à l’aide.

Par
Arianne Maynard-Turcotte
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Mon CV commence ainsi (pour vrai) :

« Petite, je rêvais de devenir caissière chez IGA, mais quand j’ai réalisé qu’elles ne gardaient pas l’argent donné par les clients, mon rêve s’est écroulé telle une pile de cannes de bines.

J’ai donc été guide touristique à New York, enseignante au secondaire à Laval, puis gérante de microbrasserie sur le Plateau.

Dorénavant, je suis auteure partout, mais surtout sur le Plateau (c’est là que j’habite). »

J’ai toujours voulu écrire pour gagner ma vie, c’était ça mon objectif de carrière. J’ai pris quelques détours, de Laval à New York, mais depuis un an, je réussis à payer mon loyer avec mes mots… Et pas en sweet-talkant ma proprio là, avec du vrai de vrai cash!

Depuis que je gagne ma vie en faisant ce que j’aime, j’avoue ne plus avoir de but précis.

Depuis que je gagne ma vie en faisant ce que j’aime, j’avoue ne plus avoir de but précis. J’accepte des contrats d’écriture dans plusieurs domaines : télé, publicité, billets écrits, script radio…

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Je pourrais avoir des objectifs clairs, me dire : « Dans un an, j’vais écrire une quotidienne à Radio-Canada! », mais tant que Fabienne Larouche sera en vie, je risque d’être déçue.

Google it

Toujours dans le souci de vous donner de l’information en plus de vous faire sourire, j’ai tapé « objectif de carrière » dans Google. En parcourant les sites, j’ai réalisé que c’était fortement recommandé d’écrire un objectif de carrière précis sur son CV. Eh ben.

Le site au nom de boisson énergétique avance même que « la première chose que le recruteur lit quand il reçoit un CV est l’objectif de carrière ». Et idéalement, il faudrait qu’il soit en lien direct avec la job sur laquelle t’appliques. Re-eh ben.

Viens pas me faire croire que le boutonneux de 16 ans qui va porter son CV au McDo a plus de chances de se faire embaucher s’il écrit « Objectif de carrière : flipper des boulettes ». Si le chef de quart (de livre) croit ça, il mérite pas son 15% de rabais sur les McFlurry.

Les acronymes anonymes

Selon le site Leader Values (espérons qu’on parle ici d’entrepreneurs et pas de leaders genre Staline) on devrait se fixer des buts dans toutes les sphères de notre vie et pas seulement dans notre carrière. C’tu juste moi qui trouve ça fucking stressant?

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Toujours d’après le site-qu’on-n’espère-pas-despotique, ces buts devraient être « SMART » (pourquoi y’ a toujours des acronymes dans le monde corporatif?) :

Specific (précis)

Measurable (enlève le premier « a » pour la traduction)

Achievable (atteignable)

Relevant (pas relevé, réaliste)

Time-bound (relié au temps… Time-Bound est pas le frère de James-Bound)

Je comprends le principe. C’est vrai que ce sont des bons points à considérer et que ça peut nous aider à planifier notre carrière (je refuse toujours de l’appliquer à la vie en général). Par contre, j’ai l’impression que c’est très rigide comme façon de voir les choses. Je vous propose donc mon propre acronyme corporate « FUTÉ » :

Fais ta liste d’objectifs, mais capote pas avec ça.

Un moment donné, on peut-tu laisser la vie suivre son cours?

T’as le droit d’être bien dans ta situation actuelle.

Évidemment, j’ai pas de quatrième point.

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Vulgarisation très scientifique

Un autre problème que j’ai avec la définition précise d’objectifs de carrière, c’est que ça donne trop de possibilités de ressentir un sentiment d’échec, même dans des situations positives.

Par exemple, si je me donne comme buts :

– Frencher Tom Cruise

– Frencher Bruce Willis

– Frencher Leonardo DiCaprio

(On s’entend, c’est pour illustrer le problème… Et non, j’ai pas mis à jour mes kicks depuis 2002.)

Mais là, coup de théâtre, je reçois un appel de Ryan Gosling qui me demande de frencher.

Mais là, coup de théâtre, je reçois un appel de Ryan Gosling qui me demande de frencher. Ça m’offre une opportunité à laquelle j’avais pas pensé. Finalement, Ryan et moi on tombe en amour et je frenche juste lui pour le restant de ma vie. C’est magnifique!

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Sauf que lorsque je vais relire mes life goals un an plus tard, je vais avoir l’impression de pas les avoir atteints. Pourtant je suis heureuse, c’est pas un échec : c’est juste une option que j’avais pas considérée.

Faque, j’tu obligée d’avoir un but dans la vie?

C’est toujours mieux d’avoir une raison de vivre si on veut pas se morfondre. Mais si on revient au travail, je crois que c’est possible de se fixer des objectifs sans être psychorigide.

Parce qu’on peut pas prévoir un contrat qui arrive par inadvertance, une opportunité qui se présente et qui nous ouvre de nouvelles portes… Bref, on peut pas prévoir la vie ! (Si j’écrivais cette phrase sur une image de coucher de soleil, toutes les retraitées la partageraient).