Journal de bord d’une session d’été à l’étranger – Partie 3

Pour consulter la partie 1, c’est par ici. Pour la partie 2, c’est par là.

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On est en Europe depuis maintenant un mois et demi. On commence de plus en plus à se sentir comme des locaux, et on ne déteste pas ça!

En vacances de nos vacances, on passe la semaine de relâche en Croatie dans une petite maison située en montagne dans la ville de Split avec six autres ami.e.s de la cohorte. Nous sommes à l’aube des tournages de nos films, alors on prend du temps pour faire notre préproduction.

Oui, la montagne, c’est pas mal inspirant.

26 juin 2022, Jacob – Ah, la Croatie : pays idyllique où le temps chaud et la mer riment avec vacances… et bibittes. Sans blague, des moustiques voraces aux bourdons noirs chromés, en veux-tu de la bibitte, en v’là! De plus, pour une raison que j’ignore, on dirait que tous les insectes de la région habitent dans notre montagne.

Au moment du coucher, je remarque qu’un immense scutigère, une sorte de mille-pattes, a élu domicile au-dessus de mon lit. Paniquant à l’idée qu’il décide d’explorer ma cavité buccale durant mon sommeil, moi et mon coloc de chambre élaborons un plan afin de faire tomber le monstre du haut du plafond cathédrale. Après une bonne quinzaine de minutes, une multitude de sacres et beaucoup d’efforts, l’insecte finit sa nuit flushé dans la toilette et nous, rassurés sous nos couettes.

29 juin 2022, Jacob – La chaleur écrasante ainsi que l’idéologie YOLO (you only live once) ont raison de ma crinière. Je me décide à me débarrasser complètement de la tignasse que j’ai entretenue pendant près de sept longues années.

C’est dans la cour de notre Airbnb que je dis au revoir à la partie de moi-même qui m’a fait gagner le prix des « plus beaux cheveux » lors de mon prébal de finissants, en secondaire 5. Grâce au vent, les mèches coupées se répandent un peu partout sur les dalles, rendant le nettoyage plus qu’agréable.

Une buzz cut plus tard, on recommence illico à me dire que je ressemble à Jay Du Temple. Il faut croire que peu importe la longueur de mes cheveux, je ne m’enfuirai jamais de ce genre de commentaire. Rendu là, j’attends avec impatience mon émission à Noovo (en espérant que Julie Snyder lise notre journal).

1er juillet 2022, Cloé – Aujourd’hui, on a soif d’aventures. En déambulant sur les trottoirs du port de Split, on croise un couple croate et son bateau accosté. S’ensuit une séance habile de négociation pour le convaincre de nous offrir une balade en bateau sur la mer Adriatique à un prix abordable.

On largue les amarres et le jeune capitaine met le cap vers une « plage cachée » plus loin sur la côte. J’ai le malheur de m’être récemment clenché la série Le Serpent (série dans laquelle un couple réserve de mauvaises surprises à de jeunes voyageurs), donc je pense à de multiples scénarios dans lesquels les propriétaires du bateau nous déposent au milieu de nulle part et se sauvent avec tous nos avoirs.

Le bateau s’arrête et nous sommes seul.e.s au monde. Heureusement, ma tête m’a joué des tours : nous avons affaire à des gens bien intentionnés.

Munie de mes grosses lunettes de natation, je plonge dans ce qui se trouve être l’eau la plus claire dans laquelle j’ai eu la chance de me baigner. Les quelques coupures sous mes pieds causées par les rochers aiguisés et les nombreux bouillons d’eau salée dans mon nez valent le coup, puisque d’avoir accès à un si bel endroit peu fréquenté par l’humain est irréel.

1er juillet 2022, Jacob – Je suis beaucoup moins enthousiaste que Cloé à l’idée de plonger dans une étendue d’eau infinie. Pour vous donner une idée, j’imagine parfois des requins lorsque je nage dans les lacs au Québec. Inutile de vous dire que mes saucettes dans la mer étaient ponctuées d’une crainte remarquable de croiser un mégalodon.

Après quelques baignades, je réussis à aller de plus en plus loin, finissant même par avoir accès à un masque d’apnée. Comme un enfant qui vient de recevoir un nouveau jouet, je passe énormément de temps à regarder les petits poissons se promener sous mes pieds.

Je suis désormais rien de moins que Posséidon dans sa maison; j’apprivoise ma peur en fusionnant avec la mer. Seulement, après de longues demi-heures d’apnée, je finis par fusionner avec mon masque : j’en ai la marque étampée dans le front.

Une exploration marine somme toute très glorieuse qui m’a fait renouer avec l’eau.

3 juillet 2022, Cloé – Notre vol de retour vers Prague est prévu pour ce soir à 18 h 40, alors on se doit de jouir d’une autre journée à se griller la couenne au soleil avant de se rendre à l’aéroport. Notre choix s’arrête sur une plage qui se trouve à cinq minutes à pied du terminal. Pour vrai, il y a quelque chose d’assez spécial dans le fait de passer les douanes quelques minutes après s’être crémé le corps en entier en sirotant une Radler.

16 h. Je reçois un courriel de la compagnie aérienne : notre vol est retardé de deux heures. Good, on va donc manquer notre escale en Allemagne. On ne peut pas y faire grand-chose, alors on s’en souciera plus tard. Pour l’instant, cet imprévu nous laisse plus de temps au soleil.

19 h 30. On passe la sécurité de l’aéroport de Split et nos ventres crient famine. On décide de s’armer d’un sandwich et de la boisson locale de la région : le Pipi (c’est un peu l’équivalent du Fanta, mais c’est local, et ça génère de bonnes anecdotes). Commander notre canette de Pipi au grand Croate qui se tient fièrement derrière le comptoir est toute une épreuve, parce qu’il comprend rapidement que d’énoncer le nom de la marque nous fait rire, donc il s’en prend à notre dignité et nous fait répéter notre commande plusieurs fois en prétextant l’avoir oubliée. On ne doit pas être les premier.ère.s francophones à être passé.e.s par là.

22 h 37. Notre avion se pose à Francfort en Allemagne et l’avion que nous devions prendre vers Prague a décollé il y a 4 minutes. Comme il y a une interdiction de vols de nuit en vigueur à l’aéroport de Francfort, nous ne pouvons espérer poser la tête sur notre oreiller praguois cette nuit.

23 h 27. Le douanier m’offre ma troisième étampe de l’Allemagne dans mon passeport. Il tourne ensuite les yeux vers Jacob, dépourvu de la chevelure qu’il porte noblement sur sa photo de passeport, et le fixe pendant plusieurs secondes. Sa métamorphose lui coûtera-t-elle des problèmes avec la sécurité? L’agent dévie finalement le regard et lui redonne son précieux document en nous souhaitant un bon voyage.

01 h 39. Nous passerons la nuit dans un hôtel (gracieuseté de la compagnie aérienne) qui se situe à une trentaine de minutes de l’aéroport. Notre vol vers Prague est prévu pour 10 h (c’est aussi l’heure à laquelle notre cours commence, oups), alors nous avons droit à quelques heures de sommeil.

07 h 50. Un énorme « X » rouge s’affiche sur l’écran alors que je scanne ma carte d’embarquement avant de passer la sécurité. « Votre vol est annulé, madame », me lance en anglais une employée de l’aéroport. Ooooooook.

On se précipite vers les bureaux de la compagnie aérienne en espérant trouver une autre option. Après quelques minutes de recherches sur son ordinateur, la dame derrière le comptoir nous demande : « Êtes-vous capables d’être rapides? » Elle nous imprime des cartes d’embarquement pour un vol qui décolle dans 20 minutes et nous nous ruons vers la porte d’embarquement qui se situe à l’autre bout de l’énorme aéroport en zigzaguant entre les obstacles (les autres voyageurs et voyageuses) comme si notre vie en dépendait.

Nous sommes finalement parvenu.e.s à revenir à Prague après ces quelques péripéties. Par chance, nous n’avions pas de bagages en soute et nous n’avons pas dû débourser plus d’argent!

11 juillet 2022, Jacob – Ce soir, on sort au Tiki Taky Bar, un endroit assez spécial à la décoration rappelant tous les clichés de la culture hawaïenne. En arrivant, on constate que les deux serveurs ont l’air mineurs et qu’une affiche à l’entrée annonce que l’établissement cherche activement du nouveau personnel. Ceci pourrait expliquer cela.

Une chose est sûre : mineurs ou pas, nos amis au bar ont beaucoup de difficulté à respecter le ratio goût/alcool. Après seulement deux verres, les tikis autour de moi tournent pas mal plus qu’au début de la soirée.

Disons que ça s’est terminé au petit matin en Tiki Taky Dodo, et qu’on s’est réveillé.e.s le lendemain matin avec un Tiki Taky Mal de tête.

Nous sommes maintenant de retour à Prague depuis quelques jours. Il fait beaucoup plus frais qu’à notre départ et l’endroit commence drôlement à ressembler à la maison. Nous passons le plus clair de nos journées à réfléchir au documentaire que nous allons tourner dans le cadre de notre cours de production de films à l’étranger.

La fin de notre périple approche. Il s’agit d’ailleurs de notre dernière portion de journal de bord. Maman, papa, les prochaines anecdotes vous seront racontées de vive voix au mois d’août.

Na sheladou!