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J’élève mon fils dans deux villes en même temps

1 bébé, 2 parents, 2 villes.

Par
Marjorie Armstrong
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Je m’appelle Marjorie Armstrong, je suis comédienne, autrice et scénariste.

J’ai fait un enfant avec un ami d’ami qui m’avait pourtant averti dès nos premières dates qu’il souhaitait faire un retour en région, sa région natale, Chicoutimi. Malgré tout, suis tombée en amour et j’ai fait de cette information une petite boule de papier à jeter dans le bac de recyclage.

Avant de se lancer dans la parentalité, mon copain et moi nous sommes fréquentés pendant environ deux ans en ne vivant jamais dans la même ville. Sa maison est tranquillement devenue la mienne et mon appartement le sien.

Puisque mon horaire de travailleure autonome est plus flexible et qu’une partie de mon gagne-pain peut se faire à distance, c’est moi qui ai fait la navette, la plupart du temps. Graduellement, Montréal s’est transformée en pied à terre, surtout pour le travail et les occasions spéciales – un souper avec mes amis est une occasion spéciale -, ce qui m’a amené à respirer l’air du Saguenay sur une base de plus en plus quotidienne.

Un stérilet enlevé et un film sans intérêt pas vraiment écouté dans un lit plus tard, et on allait devenir parents! Toujours sans maison commune… En fait, avec deux maisons communes, séparées par 456 km.

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Notre nouvelle vie sur la route m’a amené à manger beaucoup de McCroquettes (de loin l’item le plus facile à manger d’une seule main en allaitant) et à me questionner trop souvent à savoir si le cou brisé de mon bébé qui dort reprendra sa forme initiale après le trajet.

*Ceci n’est pas une pub pour McDo, mais après le parc des Laurentides, on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a, à Stoneham.

Montréal, Montréal, oublie moi pas…

Vers la fin du mois de septembre 2022, j’ai dû dire au revoir à mon appartement montréalais de manière aussi solennelle que Carrie Bradshaw lorsqu’elle déménage chez Big. Alors que les feuilles tombaient pour mourir, je me créais un nid loin de ma ville natale, quelques semaines avant d’accoucher. Cette journée-là, j’ai pleuré en écoutant la chanson Montréal de Ian Kelly. 100% emo, zéro ironie.

Après plus de trois mois sans apercevoir le bon vieux mât réconfortant du Stade olympique, ma petite marche pour aller me chercher un latte au lait d’avoine et un croissant aux pistaches chez Arhoma, ma famille et plusieurs de mes amis encore urbains me manquaient énormément. Donc, même en anticipant avec quelques craintes le premier voyage d’un bébé tout neuf de deux mois et en angoissant sur l’organisation de la nouvelle vie familiale dans un espace beaucoup plus restreint, nous avons repris la 175 S en direction de chez moi, mon autre chez moi.

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Il n’y a que le gouvernement qui ne saisit pas qu’on puisse avoir deux chez-soi, sans que le deuxième tombe dans la catégorie chalet ou résidence secondaire. L’institution considère que lorsqu’on accouche, on devient automatiquement conjoint de fait avec son partenaire (ce que je ne savais pas) et visiblement, les conjoints de fait, ça ne possède qu’une seule adresse. Un jour, quand j’aurai assez de temps libre pour m’être lassée de ces casse-têtes, j’envisagerai peut-être de faire de cette incohérence administrative mon combat. Pour le moment, je préfère soulever le point me plaindre ici.

La voiture paquetée comme si nous quittions Chicoutimi pour de bon (ça en prend du stock pour déplacer un bébé!), j’ai osé remettre ma chanson de circonstance dans l’habitacle, mais le roulement de yeux de mon chum m’a influencé à changer la chanson après un seul refrain.

« Montréal, Montréal, oublie-moi pas. Montréal, Montréal, oublie-moi pas. Si je m’installe loin de toi. »

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C’est avec le sourire aux lèvres et les yeux légèrement imbibés d’eau que j’ai enfin retrouvé le plancher glacial de mon cher rez-de-chaussée montréalais pour un premier séjour d’une semaine.

Tout comme la maison à Chicoutimi, mon trois et demi reconverti en pied-à-terre familial est désormais en constante adaptation depuis l’arrivée du petit coloc à mobilité réduite et dangereuse. Notre chambre à coucher n’est plus un havre de paix synonyme de siestes et de rapprochements, mais plutôt un dortoir avec voisin de lit au regard insistant.

Le CPE de notre garçon est présentement à Chicoutimi et le plan n’est évidemment pas de lui faire fréquenter deux écoles, une semaine sur deux, dans le futur. Au moins, puisque la situation est loin d’être avantageuse financièrement, ce qu’on dépense sur la route, nous le sauvons en GES en n’ayant plus de bidous pour voyager en avion.

La situation n’est pas idéale, et je ne sais pas à quoi elle ressemblera dans les années à venir.

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Je n’ai toujours pas décidé de mettre fin à ma carrière artistique pour me trouver un nouvel emploi à l’Alcan, mais je me dis que c’est aussi une chance pour notre petit bonhomme de vivre sous des toits qui lui feront découvrir des perspectives différentes. Je vis peut-être dans Doudouland, mais j’ai l’impression qu’il y a du bon à absorber de tout ça. Par exemple, dans l’apprentissage de la flexibilité, l’acclimatation à différents environnements et styles de vie et l’ouverture à différentes cultures.

En plus, mon fils est devenu un vrai champion de la route (tant qu’on a des collations sous la main), ce qui est une bonne nouvelle pour un éventuel road trip en Gaspésie…

Bref, même si une partie de ma vie se passe désormais au Saguenay, j’ai Montréal tatoué sur le cœur (au figuré, parce que le bonsaï dans le bas de mon dos n’est pas prêt d’être détrôné au concours de mes pires tatouages) et pas seulement parce qu’en ouvrant les applications de livraisons de nourriture, c’est un peu Noël, chaque fois. Parce qu’on se le dise, la vie est plus dure pour les gourmands, de l’autre côté du parc des Laurentides.

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Par contre, Chicoutimi est belle l’hiver et réussit à me charmer chaque année avec son ski de fond à même la ville.

La conjoncture amène son lot de défis qui demandent adaptation et Ativan (joke), mais somme toute, ça se peut!

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