Deux films québécois ont récemment mis en vedette des mères en post-partum : Deux femmes en or, de Chloé Robichaud et Peau à peau de Chloé Cinq-Mars. Deux films réalisés par des femmes (hourra !), deux Chloé (eh ben). Sauf que dans les deux cas, les mères sont jouées par des comédiennes qui n’ont pas eu d’enfants.
D’abord, j’aimerais louanger les deux longs métrages qui posent un regard sensible et empathique sur les mères. Tous deux abordent le post-partum de façon très différente, l’un avec humour, l’autre dans un genre hybride, à cheval entre thriller fantastique et body horror. Enfin, on parle de ces enjeux. Enfin, on reconnaît que ces thématiques, même si portées et réalisées par des femmes, sont universelles. Hourra à tout ça.
Deux femmes en shape
Dans Deux femmes en or, le personnage incarné par Laurence Leboeuf est la mère d’un bébé de neuf mois. On la voit tirer son lait, puis on apprend qu’elle finit par arrêter d’allaiter. Mais ses seins demeurent pareils : petits, fermes. Le propos du film étant en partie la redécouverte du plaisir charnel, on a droit à quelques bribes de peau qui nous laissent apercevoir un corps lui aussi très ferme. Une scène de ménage en deux-pièces serré et chandail bedaine montre même les abdos du personnage.
Certaines femmes retrouvent peut-être cette silhouette 9 mois après avoir accouché, mais pour une grande partie d’entre elles, d’entre nous, ça n’est pas le cas.
Peau à peau présente une mère en détresse psychologique incarnée par Rose-Marie Perreault. Une actrice aussi excellente que magnifique. Dans la critique du film de La Presse, la journaliste (oui, une femme) la qualifie de « sublime » et on lui attribue même une « beauté de madone préraphaélite ». Je vous garantis que personne n’aurait utilisé ces qualificatifs pour parler de moi en post-partum.
Cela dit, Chloé Cinq-Mars précise : « J’aurais bien voulu trouver une vraie mère pour jouer le rôle, j’en ai auditionné plusieurs, mais au final, j’ai choisi la meilleure actrice. » Elle mentionne aussi qu’une grosse partie du budget est allée aux effets spéciaux et à une prothèse servant à recréer le ventre d’une femme post-partum, avec vergetures et cicatrice. « J’ai montré mon propre ventre à la maquilleuse pour qu’elle comprenne de quoi il s’agit. »
Désirer tous les corps
Ce qui caractérise les nouvelles mères, ce ne sont pas juste les cheveux gras en couette lousse et les cernes : ce sont les seins qui gonflent et dégonflent. Le ventre qui grossit, se vide, ramollit. Les jambes qui font de la rétention d’eau. Les marques mauves, puis roses, que laissent ces distensions un peu partout sur le corps. Et tout ça, on ne le voit ni dans ces deux films, ni dans la série canadienne Workin’ Moms, ni dans le thriller américain Die, My Love, ni dans A Mouthful of air. Amanda Seyfried et Jennifer Lawrence (vedettes des deux derniers films mentionnés) ont beau être mères, elles sont des mères… hollywoodiennes avec des corps… hollywoodiens.
Pour en revenir à Deux femmes en or, j’aurais préféré voir Maxime Le Flaguais désirer une femme au ventre un peu flasque. Qu’il désire une Laurence Leboeuf plus que parfaite ne m’aide aucunement à accepter mon corps qui a changé. Au contraire, je me dis que j’aurais dû être comme elle quand mon bébé avait 9 mois. Ça me fait me sentir mal, paresseuse. Et je suis loin d’être la seule : une étude de l’Université de l’Illinois est arrivée à la conclusion que « les représentations médiatiques des femmes enceintes et en post-partum sont irréalistes et peuvent accentuer la gêne et l’insatisfaction que les femmes ressentent envers leur corps. »
Le corp(u)s scientifique
Selon une autre recherche, 3 facteurs accentuent l’insatisfaction corporelle des femmes en post-partum : les pressions exercées par le partenaire, l’entourage… et les médias. Et c’est ce dernier en particulier qui renforce l’intériorisation de l’idéal de minceur et accroît l’insatisfaction corporelle durant cette période.
On m’a déjà félicitée pour mon deuxième enfant alors que ma fille de quelques semaines dormait dans la poussette devant moi. La personne s’émouvait en fait devant mon ventre vide.
Je sais bien que les expériences des mères sont multiples, et qu’il y a autant de types de corps que de mères. Que certaines retrouvent bel et bien leurs abdominaux et leur ventre plat quelques semaines après l’accouchement. Mais pourquoi ne voit-on surtout qu’elles, dans les films et séries ? Où sont les autres corps de mères ?
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