La semaine dernière, je suis allée prendre un café avec une amie. Elle en avait long à dire sur la nouvelle obsession que cultive son chum avec Zwift, un programme d’entraînement qui l’accompagne sur son vélo stationnaire. Elle se plaignait qu’il se réveillait maintenant à 5h45 tous les matins pour pédaler sur place dans un pays imaginaire avant d’aller travailler.
« On a plus de matins cutes en couple. À la place, je me réveille au son de ses alarmes et de son ostie de vélo. »
Je l’avoue, j’étais quand même contente d’entendre une amie chialer sur son chum pour autre chose que le ménage et le partage de la charge mentale. En l’écoutant, j’ai vite pensé qu’il pourrait se réveiller à cette heure-là pour fumer du crack et là, on aurait un problème. À la place, il fait du sport. No big deal, non?
C’est là que ça a escaladé. Depuis qu’il s’est inscrit à un demi-Ironman, son chum boit, mange, respire, dort en pensant à sa prep. Elle me raconte que cette semaine, elle a eu le ick pour la première fois en 3 ans de relation, parce qu’en semaine, il ne mange que le trio riz brun-brocoli-poulet – pour dîner ET souper.
Vendredi dernier, elle voulait aller au cinéma, mais il ne pouvait pas parce que c’était en même temps que le bain libre.
Ça gosse.
Pendant que son chum s’entraîne à battre des records, leur couple, lui, bat de l’aile.
Quand le sport prend trop de place
En couple, c’est rare qu’on se réjouisse à l’idée d’avoir à partager notre temps avec des séances au gym. Lorsque j’ai sondé la communauté de Dehors sur Instagram à savoir si le sport avait déjà gâché ou miné votre relation, plusieurs d’entre-vous vous êtes sentis interpellés par le sujet.
« J’ai laissé mon chum parce qu’on ne pouvait jamais se voir. Il était trop occupé avec son sport et n’avait pas de temps pour moi », m’écrit Mahée.
Henri m’écrit : « Dans mon ancienne relation, j’ai souvent entendu la phrase : “On sait bien, tu passes plus de temps avec ton vélo qu’avec moi.” »
« J’ai laissé mon ex parce qu’au bout de 3 ans, il m’a annoncé qu’il n’aimait pas le sport et me faisait du chantage. » – Julie
Claire, elle, m’a plutôt fait rire : « J’aimais mon chum, mais pas assez pour endurer son obsession pour les triathlons. » Je lui doit le titre de cet article.
En récoltant les témoignages, j’ai pu comprendre que le sport peut devenir une passion envahissante qui affecte les couples de différentes manières. L’une de vous m’a même écrit pour me dire que le sport a semé la bisbille APRÈS la relation quand elle a su que son ex la stalkait sur Strava pour voir avec qui elle allait courir. Il lui envoyait alors des messages du genre : «T’es allée courir avec Antoine? ».
Ayoye.
Quand le sport dévoile d’autres bobos
« Il y a deux ans, j’ai commencé à m’entraîner assez sérieusement. J’aime suivre des cours à 7h du matin. Mon ex, lui, ne s’entraînait pas et se plaignait souvent d’avoir pris du poids. Je l’ai invité à me rejoindre au gym. L’affaire, c’est qu’on se pognait pendant les cours. Tout le temps. Moi, j’aime jaser quand je vais au gym. Je socialise et ça aide à changer le mal de place et le temps passe plus vite. Lui, il aime rester en silence et suer tout seul de son bord. Il s’impatientait quand je lui parlais, roulait des yeux, etc. Ce n’est pas la raison principale de notre rupture, mais ça a été un son de cloche. » – Mélissa*
« Mon ex venait d’un milieu plus sédentaire. Elle aimait bouger, mais n’avait pas grandi en faisant du sport. Quand on s’est rencontrées, elle a commencé un programme de course pour un 5 km. Trois entraînements par semaine, mais elle en skippait un sur trois, et n’a jamais fait de renforcement musculaire. Pas de jugement.
Six mois plus tard, elle termine son 5 km de peine et de misère, puis décide de viser un 10 km. Elle s’inscrit en disant que d’ici là, elle courrait sûrement un demi-marathon. Semaine 1 du programme : elle saute un entraînement pour aller chercher des patates. Semaine 2, elle skippe deux entraînements : un pour bruncher avec sa grand-mère (apparemment, courir l’après-midi, c’est illégal), l’autre parce qu’il y avait supposément trop de monde sur la piste cyclable.
Trois ans plus tard, toujours pas de demi-marathon. Juste des débuts de programmes jamais terminés. Et là, je me suis demandé : si elle n’arrive pas à s’engager dans ce qu’elle appelle son “rêve”, comment va-t-elle s’engager dans une vie à deux ? Je l’ai quittée. Ça m’a ouvert les yeux sur son incapacité à aller au bout des choses. » – Audrey
« Mon ex faisait des triathlons avant qu’on se date, mais après un cancer, il voulait “se remettre en forme”. Moi, le sport, c’était déjà dans mes plans. Sauf que plus on avançait, plus le clash devenait évident : je m’entraînais comme une machine, lui lâchait tranquillement l’affaire.
On en a parlé mille fois — pour moi, c’était un deal breaker de ne pas partager ça avec mon partenaire. Il a fait quelques efforts, puis après mon triathlon, j’ai eu une fracture de stress. Trois mois sans sport : l’occasion parfaite pour voir s’il le faisait pour lui ou juste pour me suivre. Résultat? Zéro gym, zéro vélo. Rien. Catastrophe. » – Marie*
La veuve du marathon
Si les passe-temps de notre prétendant peuvent nous séduire au début d’une relation, ils peuvent nous refroidir en constatant leur ampleur réelle. Si la frustration s’installe, la vraie question à se poser demeure : est-ce c’est leur passion qui nous agace ou le sentiment d’être mis.e de côté ? C’est inspirant de voir l’autre s’épanouir dans une routine de mise en forme, mais si ce qui dérange vraiment, c’est le manque d’attention, chialer sur son passe-temps ne règlera rien.
Parce que oui, le sport, c’est une passion qui peut unir, mais c’en est aussi une qui peut creuser un fossé. Il y a ceux qui courent après la performance et ceux qui préfèrent regarder les autres courir. Ceux qui en font un mode de vie et ceux qui s’essoufflent juste à essayer de suivre le rythme.
En lisant sur le sujet, j’ai appris qu’il existait un terme pour ce que vit mon amie : elle est devenue une veuve du marathon.
Mais c’est aussi plus que ça : c’est pas juste une histoire de cardio et de brocoli-riz-poulet. C’est le grand classique des couples qui évoluent à des vitesses différentes. Un s’investit, l’autre décroche. Un change, l’autre reste le même.
Et parfois, le vrai problème n’est pas le sport, mais ce qu’il révèle : on n’est plus dans la même course.
* les noms ont été changés