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Infirmières de mère en fille

Portrait d'un métier qui change au rythme des générations.

Par
Pier-Luc Ouellet
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Le guide des universités et la Banque Nationale s’unissent pour vous faire découvrir les métiers de la santé sous un autre jour.

Quand on m’a demandé de trouver un duo mère-fille pratiquant la profession d’infirmière, ça n’a pas été bien difficile.

Après tout, je viens d’une longue lignée de gens qui travaillent dans le domaine de la santé. Ambulanciers, préposés, auxiliaires et infirmières, tout le monde dans ma famille sauve des vies… sauf moi.

Moi, j’écris des jokes (je pense parfois que j’ai été adopté).

Pour remplir ma mission, je me suis donc tout simplement tourné vers ma mère, Brigitte, et ma sœur, Frédérique. La première vient tout juste de terminer sa carrière d’infirmière après plus de 30 ans de service. La seconde a complété son baccalauréat en sciences infirmières il y a à peine un an. Elles ont gentiment accepté de me parler de leur métier.

Suivre les traces…

Vous pourriez croire que ma mère était enchantée quand ma petite sœur a décidé de suivre ses traces.

C’est pas exactement comme ça que ça s’est passé.

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« C’est drôle parce que quand j’ai annoncé à maman que j’allais devenir infirmière elle a quasiment pleuré. Elle était perplexe devant mon choix de carrière; c’est un métier tellement exigeant. Mais je pense qu’il n’y a aucune autre profession qui permet de tisser un tel lien avec les gens » raconte Frédérique.

En fait, sur le coup, c’est probablement l’instinct protecteur qui s’exprimait dans la réaction de notre mère : « C’est un métier très difficile physiquement et mentalement, c’est ça qui me rendait inquiète », raconte d’ailleurs Brigitte, qui est bien placée pour le savoir : ma sœur et moi avons souvent vu ma mère revenir du boulot exténuée.

Est-ce que ce reality check a ébranlé Frédérique dans ses choix? « Pas du tout » me répondra-t-elle quand je lui demande si elle a déjà douté.

«Je suis travaillante. Quand on choisit le métier d’infirmière, je pense qu’on le choisit parce qu’on aime être confronté à ça : j’aime me sentir utile.»

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« Je suis travaillante. Quand on choisit le métier d’infirmière, je pense qu’on le choisit parce qu’on aime être confronté à ça : j’aime me sentir utile. Quand on doit rester plus longtemps [faire des heures supplémentaires], c’est sûr que c’est pas toujours le fun, mais on comprend que c’est pour le bien-être de nos collègues et surtout de nos patients » assure Frédérique.

En lui parlant, je comprends vite que plusieurs autres raisons l’ont menée à se lancer dans la profession. « Il y a le goût d’aider, ça c’est sûr. Je pense que si on demande à n’importe quelle infirmière [pourquoi elle a choisi ce métier], elle va mentionner le goût d’aider et de rendre service. Mais aussi, il y a le côté « médecine » que j’aimais beaucoup, j’aime comprendre, savoir pourquoi le corps agit d’une certaine façon ».

Mais surtout, et là-dessus mère et fille sont d’accord, le vrai salaire pour elles, c’est la reconnaissance des patients: « Quand un patient te prend par la main, te remercie de lui avoir sauvé la vie, c’est sûr que c’est valorisant » me raconte Frédérique.

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Brigitte abonde dans le même sens: « Une dame m’a dit que je lui ai sauvé la vie parce que je lui ai conseillé d’aller voir son médecin parce que je trouvais sa situation anormale. En effet, elle a dû être opérée d’urgence! »

Soudain, ça me rappelle que quand je stressais sur des remises des textes à l’École de l’humour, un collègue me disait souvent « Relax, on sauve pas des vies ». Mais c’est littéralement ce que ma mère et ma soeur font.

Le cycle de la vie

Parlant de vie, si la pédiatrie n’a jamais intéressé ma sœur (« C’est assez triste, l’ambiance est difficile. Un enfant, c’est pas malade d’habitude » me confiera-t-elle) elle est enthousiasmée par l’obstétrique, cette spécialité qui s’occupe des grossesses et des accouchements.

Dans sa jeune carrière, Frédérique n’a participé qu’à une seule naissance, mais elle avoue avoir eu les larmes aux yeux, sentiment que Brigitte a partagé lors de son premier accouchement: «J’ai pleuré avec la famille. J’étais émue autant que le père qui était là! »

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Et Frédérique n’est pas au bout de ses larmes, parce que notre mère est convaincue qu’on reste émotives à chaque accouchement.

À l’autre bout du spectre, le métier d’infirmière, c’est aussi d’être confrontés à la mort. Une expérience tout aussi touchante, pour d’autres raisons.

«Comme infirmière, c’est important d’être capable de faire une barrière entre l’empathie et la sympathie.»

Avant d’être infirmière, Frédérique a été préposée dans un CHSLD où elle a côtoyé la mort pour la première fois. « Par expérience, les morts qui m’ont le plus touchée c’est celles des patients avec qui j’avais eu le temps de développer des liens affectifs. Ça n’a jamais été des larmes, ou quelque chose qui m’aurait empêché de faire mon travail. Comme infirmière, c’est important d’être capable de faire une barrière entre l’empathie et la sympathie ».

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Brigitte, qui a longtemps travaillé auprès de patients atteints du cancer, a également dû faire face à la grande faucheuse à plusieurs reprises: « Il y a deux façons de voir ça. Pour certains, c’était une libération, parce qu’ils étaient souffrants et prêts à partir.

Mais il y en a qui n’étaient pas prêts à mourir, et ça, c’est vraiment triste ».

Et comment fait-on pour composer avec cette peine?

« On apprend à vivre avec ces moments-là. Ça devient des deuils à faire chaque fois » répond Brigitte.

Sacré Charlemagne!

Apprivoiser le deuil, ce n’est pas nécessairement quelque chose qu’on apprend à l’école. D’ailleurs, le parcours scolaire de ma mère et de ma sœur a été bien différent. Quand ma mère a commencé sa carrière, les infirmières qui décidaient de poursuivre leurs études à l’université étaient l’exception. La plupart, comme ma mère, optaient pour la technique, d’autant plus qu’il n’y avait pas d’avantage salarial à obtenir son baccalauréat.

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Ma sœur, elle, a complété son baccalauréat à l’UQAR, comme beaucoup de ses collègues.

« Je pense que c’est toujours un plus d’avoir son bacc. On acquiert dans ce cours-là des techniques en évaluation clinique: l’utilisation du stéthoscope, de la palpation, etc., en plus d’avoir des connaissances augmentées en soins critiques notamment au niveau des soins cardiaques, ce qu’on n’a pas au DEC. Plus tu pousses les études, plus tu acquiers des compétences qui te permettent de mieux intervenir ».

Pour ma mère, l’apprentissage passait davantage par les pairs : « On idolâtrait un peu les plus vieux, on était intéressés à en apprendre sur leur expérience et leur vécu » explique avec un brin de nostalgie ma mère.

«Avant, l’infirmière était presque vue comme la servante du médecin alors qu’aujourd’hui, on est un complément et les médecins viennent souvent nous demander notre avis sur un traitement, un diagnostic ou l’état général d’un patient pour intervenir différemment.»

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Sans négliger l’importance et la valeur de l’expérience, ma sœur apporte toutefois un argument en faveur de la formation : « La profession évolue toujours. Avant, l’infirmière était presque vue comme la servante du médecin alors qu’aujourd’hui, on est un complément et les médecins viennent souvent nous demander notre avis sur un traitement, un diagnostic ou l’état général d’un patient pour intervenir différemment. Aujourd’hui, on essaie davantage de former des infirmières autonomes qui sont capables de prendre des décisions par elles-mêmes et qui comprennent le pourquoi de leurs actions ».

Plus la conversation avance, plus je découvre ma famille sous un autre jour. J’ai devant moi deux professionnelles investies dans leur travail qui portent un regard lucide, mais passionné sur leur métier.

Et je ne peux m’empêcher d’être heureux de savoir qu’on peut compter sur des milliers de Brigitte et de Frédérique dans notre système de santé. Des Brigitte et des Frédérique qui prennent soin de nous.

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Vous aimeriez devenir la prochaine Brigitte ou Frédérique? Laisser votre trace dans le domaine de la santé ? La Banque Nationale a une offre sur mesure pour vous.