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Faut-il être malheureux pour atteindre l’indépendance financière?
Je suis une millennial, et je souhaite un jour atteindre l’indépendance financière. Malheureusement, je vis aussi dans une société où consommer est un mode de vie, de sorte que la plupart du temps, mes désirs immédiats entrent en conflit avec mes objectifs de vie. Ce qui m’amène au dilemme semblable à celui de l’œuf et de la poule, mais pour les finances : qu’est-ce qui vient avant, le bonheur ou l’argent?
Dans le cadre de la sortie de la série Jeunes et retraités, URBANIA et UNIS TV s’unissent pour répondre à cette épineuse question et vous présenter des personnes qui sont parvenues à concilier bonheur et atteinte de l’indépendance financière.
Nous sommes conditionnés à dépenser de l’argent
Notre première expérience du monde économique se fait en pratiquant l’art de dépenser de l’argent. Vous avez sûrement un souvenir de votre premier achat et du bonheur qu’il vous a procuré. Personnellement, je me souviens encore clairement de ma première expérience. J’avais huit ans, et j’ai acheté ma première place de cinéma. À partir de ce moment, j’ai associé travail et argent, et conserv é l’idée qu’avec cet argent, j’accéderais au temple de la consommation et au sentiment de bonheur qui l’accompagne.
Nous sommes constamment encouragés à consommer rapidement. Cela fait partie de notre quotidien – c’est presque un devoir de citoyen économique. Nous consommons pour subvenir à nos besoins de base, mais aussi pour maîtriser nos émotions et surtout pour affirmer notre appartenance à un groupe social. Dépenser de l’argent nous donne la sensation d’être en sécurité et d’avoir réussi. Par contre, ce mode de vie nous fait également ressentir un stress énorme par rapport à notre situation financière.
À l’heure où se rencontrent la surconsommation et la quête de liberté financière, je suis partie à la rencontre de deux frugalistes qui ont fait le choix de dépenser autrement afin d’atteindre rapidement leur indépendance financière. L’objectif sous-jacent n’est pas nécessairement d’arrêter de travailler, mais plutôt de faire de la place dans leur vie pour les activités qui leur tiennent à cœur. Gagner de l’argent est toujours dans l’équation. La différence est que le « 9 à 5 » devient optionnel et non essentiel pour couvrir leurs dépenses quotidiennes.
Rencontrons d’abord Jean-Sébastien Pilotte, auteur du livre La retraite à 40 ans et fondateur du blogue Jeune retraité. Sa philosophie est : « Moins de bébelles, plus de liberté. » Il a fait le choix de se détacher des possessions matérielles qui n’apportent aucune satisfaction personnelle afin de maximiser son bonheur. Sur son blogue, on peut lire : « Posséder le moins possible de matériel à entretenir (maison, jardin, piscine, auto, chalet) et avoir le plus possible de temps pour vivre des expériences vivifiantes (voyages, spectacles, projets personnels, rencontres avec des amis, sport, temps de qualité en famille). »
Puis, Mel Dorion, fondatrice du blogue Modest Millionnaires. Sa philosophie est : « Atteindre l’indépendance financière avec la simplicité. » En 2015, elle et son conjoint ont défini leur plan pour atteindre leur indépendance financière en 10 ans sans sacrifier leur vie de famille. Mel se définit comme une semi-retraitée : elle a créé une entreprise qu’elle gère à temps partiel et de façon saisonnière afin de profiter pleinement des vacances avec ses enfants.
Se réapproprier son pouvoir de consommation
Vivre heureux et libre, quitte à dépenser moins d’argent : c’est le credo des frugalistes, une appellation qui désigne les personnes ayant fait le choix (et non le « sacrifice ») de vivre « en dessous de leurs moyens » afin d’épargner massivement et d’investir judicieusement leur argent pour atteindre l’indépendance financière.
L’idée n’est pas d’être radin, mais de réfléchir à sa manière de dépenser.
Jean-Sébastien lui-même affirme aimer dépenser de l’argent, mais pas pour n’importe quoi. « Je n’ai jamais eu peur de dépenser de l’argent, c’est une question de choix plutôt que de sacrifice. Mes choix sont faits dans le but d’améliorer mes conditions de bonheur. Et si l’on doit parler de sacrifice, c’est la surconsommation que je sacrifie, pas ma liberté : il y a une différence », affirme-t-il.
Pour Mel, la frugalité ne signifie pas qu’il faille compromettre la qualité de sa vie sociale ni la négliger. Il s’agit de faire des choix judicieux et de saisir la racine de ses désirs. « La notion de bonheur est subjective et diffère pour chaque personne. Nous ne savons pas analyser nos désirs. Si l’on prenait le temps de voir la racine de nos désirs, on se rendrait compte qu’il n’y a pas de place pour la restriction. Par exemple, j’ai compris que si j’ai envie d’aller au restaurant, c’est avant pour passer un bon moment avec mes amis. Je peux les inviter chez moi et mieux profiter de la soirée. Mon désir est malgré tout comblé! »
La philosophie du frugalisme n’est pas synonyme d’une vie triste. Au contraire! L’objectif principal est une réappropriation de son temps, de son argent, de son bonheur, et de sa vie, tout simplement.
Ce mode de vie prône la recherche d’une vie qui a du sens et qui a des effets positifs sur les autres. La première motivation de Mel et de Jean-Sébastien est d’avoir du temps pour accomplir des missions qui dépassent leur bulle personnelle. Ainsi, Jean-Sébastien fait beaucoup de bénévolat pour des causes qui lui tiennent à cœur, et Mel aide des gens qui souhaitent reprendre leurs finances en main.
Trois astuces pour un frugalisme heureux
Dépenser de l’argent contribue à notre bonheur, mais à condition de le faire pour des choses qui augmentent notre « Bonheur Intérieur Brut » (pour emprunter la formule au PIB), me rappelle Jean-Sébastien. C’est un choix de vie qui ne se fait pas du jour au lendemain… J’ai donc demandé aux deux experts des conseils utiles pour devenir plus économe sans tomber dans le piège de la pénurie ou du sacrifice. En voici trois.
Définir clairement sa vie idéale
Penser et planifier l’avenir peut être source de stress et d’anxiété, et il arrive que l’on se sente épuisé avant même d’avoir commencé. C’est d’ailleurs le premier défi que Jean-Sébastien a dû surmonter : « Au départ, le plus dur pour moi, c’était mon niveau d’énergie. Ça prend des efforts et de l’énergie, reprendre sa vie en main. Ça demande aussi une discipline et un effort de vision et de planification. »
Il ajoute ce précieux conseil : « Il faut prendre le temps nécessaire pour bien définir ses objectifs de vie. C’est une étape intimidante, mais une fois que c’est clair, tout le reste devient une évidence. »
Apprendre à dépenser consciemment
Mel recommande de considérer ce changement de mode de vie non pas comme un fardeau, mais plutôt comme une occasion à saisir avec optimisme et curiosité. Adopter un mode de vie frugal ne signifie pas abandonner ses centres d’intérêt ou décliner toutes les invitations qui se présentent. Il s’agit plutôt d’être plus sélectif et de prioriser les choses qui nous procurent du plaisir. « C’est une question d’équilibre entre aujourd’hui et demain », explique-t-elle.
Développer son esprit ludique
Pour moi, la notion de pouvoir d’achat prend tout son sens à partir du moment où l’on reprend le pouvoir sur son argent, c’est-à-dire où l’on prend des décisions alignées sur ses valeurs.
C’est d’ailleurs une vision que je partage avec Mel : « Je suis contre les restrictions. Mon approche avec mes dépenses n’est pas contraignante, elle est très simple. Je fais le suivi de mes dépenses en temps réel, ça me permet de déterminer mes déclencheurs et mes comportements de dépenses. Je prends tout ça comme un jeu! Dépenser de l’argent devient un muscle : plus on s’entraîne à le faire consciemment, plus ça devient facile et automatique. »
En conclusion
Alors, qu’est-ce qui vient avant : le bonheur ou l’argent? Les deux en même temps ?
Après mes échanges avec Mel et Jean-Sébastien, je comprends qu’adopter le frugalisme, c’est définir ses propres règles pour atteindre ses propres objectifs. Ce n’est sûrement pas un mode de vie pour tout le monde, mais ça en est un qui nous invite à faire de la place pour les choses importantes et à nous approprier le pouvoir de notre porte-monnaie et de notre temps.
À l’ère de la gratification instantanée, c’est peut-être ça, le bonheur!
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Vous avez envie de continuer l’exploration du frugalisme? Découvrez la série documentaire Jeunes et retraités avec Mel et Jean-Sébastien, diffusée sur Unis TV les jeudis à 19 h, et en ligne sur TV5 Unis. Vous découvrirez le parcours de personnes qui ont atteint leur indépendance financière en adoptant différentes formes de frugalisme.