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Faire du mush pour être un meilleur parent

La microdose serait-elle la solution à l'anxiété parentale ?

Par
Julie Chaumont
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Party! Après avoir écrit sur la Mommy Wine Culture, Gabrielle m’a demandé de m’attaquer aux Mushrooms Moms, ces mères qui prennent des microdoses de champignons magiques pour être « de meilleurs parents ». C’est bien à jeun que je me suis lancée dans des recherches… trippantes!

La consommation de microdoses de champignons magiques s’est démocratisée ces dernières années, en fait foi la quantité hallucinantes d’articles sur lesquels je suis tombée au fil de mes recherches. Parmi les adeptes : les mamans. Les mères utiliseraient les microdoses de mush pour boire moins d’alcool, pour être plus patientes avec leurs enfants, pour arrêter de prendre des antidépresseurs ou des médicaments pour le TDAH, et même pour reconnecter avec leur conjoint.

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Avant d’aller plus loin, précisons ce qu’est une microdose. « La quantité précise qui constitue une microdose est difficile à définir et, à ce jour, il n’existe aucun critère systématiquement accepté par les chercheurs. La définition la plus couramment rapportée est qu’une microdose est une dose comprise entre environ un dixième et un vingtième d’une dose récréative typique, bien que cette plage soit inconfortablement imprécise à des fins scientifiques », peut-on lire dans The emerging science of microdosing: A systematic review of research on low dose psychedelics (1955–2021) and recommendations for the field.

En gros : t’es pas gelée quand tu prends une microdose. Et t’en prends pas deux ou trois dans une même soirée.

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Bref, la microdose utilisée par les mères pour les aider à être « de meilleures parents » n’a absolument rien à voir avec la microdose que tu fais dans une soirée bien arrosée durant laquelle, en plus, tu fumes des joints.

Un peu d’assistance

La microdose parentale, c’est plus une béquille pour t’aider à passer à travers les moments difficiles. C’est ce que j’en déduis de ma discussion avec Roxane, une mère de deux enfants qui consomme des microdoses de mush depuis neuf ans. Elle ne suit pas un protocole précis, comme plusieurs le suggèrent, mais en prend lorsqu’elle en ressent le besoin.

« Par exemple, si je vais faire un hike avec les enfants et que je sais que ça va chiâler tout le long, je prends une microdose. Ça m’aide à être plus ancrée dans le moment présent, plus à l’écoute, plus patiente. » Euh… ok. J’en veux!

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J’ai une amie, aussi mère de deux enfants, qui, elle, en fait quelquefois lorsqu’elle sent l’anxiété monter. « J’en prends en peak d’anxiété, parfois. Rarement. Genre 2-3 fois par année, fournie par un ami qui en crée à partir de champignons. Il en fait de la teinture, donc des gouttes. Je ne saurai jamais si c’est psychosomatique (c’est très faible et très doux), mais en période de grand stress ça me fait un très bon effet un peu calmant du système nerveux. Je préfère de loin un peu de champignons naturels à, par exemple, une pilule pour dormir. »

« Je peux travailler sans problème, je ne suis pas gelée pantoute, juste détendue et relaxe, mais pas molle. Je n’aime pas l’idée d’en prendre tout le temps, mais j’y trouve un bienfait certain quand j’en prends. »

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Ces témoignages rejoignent tous ceux que j’ai lu au fil de mes recherches, notamment ceux, très convaincants, d’un article publié sur le site Romper. Dont celui-ci : « Ça a changé ma vie. Ça m’a fait devenir plus empathique et connectée à chaque personne sur terre. Cela m’a apporté tellement de paix » déclare « Lindsay », une maman de Portland, dans l’Oregon (État de la côte ouest des États-Unis où l’usage non médical, mais supervisé, de psilocybine, principe actif des « champignons magiques » est permis depuis l’été 2023).

Trop beau pour être vrai?

Après toutes ces lectures et témoignages, j’étais tellement convaincue des bienfaits des microdoses de mush que j’en suis venue à me demander pourquoi je ne commencerais pas à en prendre moi aussi. En plus, c’est tellement facile de s’en procurer sur internet qu’on en oublie que c’est illégal.

J’étais encore sur mon high quand j’en ai parlé avec ma voisine, qui est psychologue en dépendances. C’est elle qui m’a fait débuzzer. « C’est ben beau les articles, mais les études, elles disent quoi ? » Les études… les études… elles ne sont pas encore assez nombreuses pour prouver les véritables bienfaits des microdoses de psilocybine. Ma voisine me réfère à cet article scientifique, qui analyse de manière critique les méthodes de 15 études publiées avant mars 2022.

En gros, ça dit que le microdosage semble prometteur pour améliorer la santé mentale et divers aspects du bien-être, mais que la quantité et la qualité des recherches sur ses bienfaits font défaut.

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Les propos d’André Do, psychiatre à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, vont dans le même sens. « Ce qu’il faut savoir c’est qu’en 2024, on a très peu de données scientifiques robustes qui soutiennent la sécurité du microdosage pour tout ce qui est trouble de santé mentale. Je sais qu’il y a de plus en plus de gens qui se tournent vers le microdosage et qui disent que ça produit des effets bénéfiques au niveau de l’anxiété, de la concentration, de l’humeur, mais c’est vraiment plus des rapports anecdotiques que quelque chose qui est vraiment soutenu par la recherche scientifique. »

Monsieur Do se questionne aussi sur l’effet placebo. « Quand vous prenez une pilule que vous croyez que ça va vous aider, les chances sont bonnes que ça va vous aider peu importe ce que la pilule contient. » À ce sujet, il mentionne une récente étude italienne regroupant trente personnes. La moitié avait reçu des placebos, l’autre moitié de réelles microdoses de champignons magiques.

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Ceux qui avaient reçu des champignons, mais qui croyaient avoir reçu un placebo ne ressentaient aucune amélioration de l’humeur. Et ceux qui avaient reçu des placebos en pensant que c’étaient des champignons disaient ressentir un certain bien-être. Des essais cliniques visant à savoir si les microdoses ont un effet réel ou placebo, ont commencé à l’Université de Toronto récemment. J’ai hâte de voir les résultats.

Le psychiatre Do souligne aussi le danger de la drogue illégale en ligne. « La vente de champignons magiques sur internet n’est pas quelque chose qui est vraiment régulé. Quand vous voulez acheter des champignons, vous n’avez pas vraiment idée de c’est quoi la puissance de la sorte de champignons que vous achetez. Ça se peut que vous achetiez un champignon que vous pensez pas très puissant, mais qui ultimement l’est, et ça peut quand même causer des réactions négatives comme des expériences psychotiques. » Et ça, c’est pas mal le contraire du bien-être que vous recherchez…

P.S. Avis à tous les chercheurs : je vous assure qu’il y a une méchante grosse gang de mères qui est prête à participer à une prochaine étude sur le microdosage de champignons magiques.

Références

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Le café du sénateur Campbell. Cet article publié dans La Presse en 2022 est assez convaincant!

Fantastic Fungi. Un documentaire intéressant sur Netflix.