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Être pauvre, ça coûte cher

Pour économiser, il faut parfois avoir de l'argent.

Par
Gabrielle Thibault-Delorme
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Un beau mardi matin, vous êtes à court de papier toilette. Vous allez à la pharmacie et vous vous retrouvez devant deux choix: un paquet de 12 rouleaux doubles à 6$ ou un paquet de quatre rouleaux à 2,50$.

Lequel prenez-vous ?

«Ben là, le 12 rouleaux à 6$, c’est évident!», me répondrez-vous. Et en effet, vous avez raison. Pour la même quantité, vous auriez payé 7,50$ pour trois paquets de quatre.

Mais si on pose la question autrement. Et si, après avoir payé votre transport, votre épicerie et votre loyer, il ne vous restait que 5$ dans vos poches?

Cet exemple vous montre qu’être pauvre, ce n’est pas donné.

Avant qu’on continue plus loin dans les explications, prenons un instant pour définir la pauvreté. Selon l’IRIS, une personne seule peut commencer à respirer un peu si elle fait 26 651$ par année ou plus. Ce seuil s’appelle le revenu viable et permettrait de couvrir ses besoins de base, les imprévus, les soins de santé et permet quelques loisirs. En dessous de ce seuil, c’est la pauvreté.

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Sans une certaine marge de manœuvre dans son budget, la vie quotidienne est une lutte constante. Comme si on cherchait désespérément à revenir à la surface de l’eau pour respirer, mais avec un poids attaché aux pieds.

Penser à court terme

Le nœud du problème, c’est qu’il est impossible de planifier un budget à long terme lorsque celui-ci est restreint. On survit à la journée, et rarement on a un lousse pour la suivante.

Cette vision des finances à court terme engendre un paquet de problèmes. L’exemple du papier de toilette est tout simple, mais révélateur. Lorsqu’on a un peu plus d’argent, on peut se permettre d’économiser en achetant en plus grosse quantité.

On peut aussi se permettre de dépenser en prévision des dépenses qu’on aura à faire dans l’avenir.

Investir dans le futur

Par exemple, les petits travaux d’entretien sur la maison ou la voiture permettent d’éviter de plus grosses dépenses plus tard. Si on n’arrive jamais à dégager un surplus pour changer l’huile de la voiture, c’est le moteur au complet que l’on devra remplacer plus tard.

Il en est de même pour les dépenses de santé. Un petit nettoyage par-ci par-là peut permettre d’éviter un traitement de canal dans deux ans.

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Et puisque nous parlons de santé, on n’a pas tendance à contracter des assurances quand on est pauvre. Un vol, un accident ou une maladie ne font qu’empirer une situation déjà fragile. Il n’en faut pas beaucoup pour glisser dans la spirale de l’endettement.

Des services financiers mal adaptés

La gestion de son argent est une autre difficulté. Si une personne à faible revenu ouvre un compte bancaire, elle devra souvent payer des frais d’opérations élevés, n’ayant pas un solde minimum pour les faire disparaître.

Concernant les services bancaires, les gens en situation de pauvreté paient aussi plus cher pour les mêmes produits. Ils n’ont pas accès aux meilleurs taux d’intérêt, puisqu’ils représentent un risque plus élevé. Et souvent, le fonctionnement même du compte bancaire leur nuit. Par exemple, s’ils déposent un chèque et que l’argent déposé n’est pas disponible pour quelques jours, la situation peut rapidement devenir intenable pour quelqu’un qui vit au jour le jour. Et difficile de se fier au crédit dans ce cas-là, l’accès leur étant beaucoup plus difficile.

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On peut comprendre alors pourquoi certaines personnes encaissent leur chèque dans une de ces boutiques de prêteurs qui chargent un pourcentage d’intérêts élevé. L’instantanéité a un coût, mais c’est le prix qu’une personne pauvre n’a souvent pas le choix de payer.

Quand on ne peut pas planifier à long terme, on ne fait pas des choix éclairés.

Et ça vaut aussi pour ceux qui ne sont pas en situation de pauvreté. Quand on refuse de payer aujourd’hui, on s’expose à payer plus cher plus tard. La seule différence, c’est qu’à ce moment-là, c’est une décision.

Avoir la possibilité d’envisager l’avenir est un privilège. D’une certaine façon, pour pouvoir sortir la tête de l’eau et respirer, il faut parfois, ironiquement, un peu d’air.