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Est-ce qu’un employeur potentiel devrait vous demander ce que vous avez fait pendant la pandémie?

La question viendra après «donnez trois qualités et trois défauts».

Par
Edouard Ampuy
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«Comme tous, rendu expert en analyse statistique.»

«Fumette et masturbation ça passe comme activité physique et spirituelle, nan?»

«Je me suis lavé les mains.»

«J’ai fait des line-up

Voilà quelques réponses que j’ai reçues en posant la question autour de moi, et qui m’ont bien fait sourire. Mais let’s be honest, ce n’est pas vraiment ça qu’on va balancer face à un recruteur ou un employeur potentiel lors d’un entretien d’embauche.

Mais avant même de s’interroger sur ce qu’on peut répondre, il faudrait savoir: est-ce que c’est OK qu’on nous la pose cette question? J’ai eu des réponses variées.

«Qui va poser cette question, sérieux?»

En demandant sur différents groupes Facebook, les réactions ne se font pas attendre: «Ça les regarde en quoi? Ils nous demandent ce qu’on fait pendant les vacances aussi?» ou «Les mecs maintenant vont te juger sur ce que tu as fait pendant le confinement» et «Qui va poser cette question, sérieux?».

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De vives objections qui ne sont pas partagées par tout le monde. Lili Rose a récemment postulé pour un poste d’agent de soutien technique. Elle ne serait pas étonnée si on lui demandait. «Je trouve que c’est logique qu’un recruteur demande ça, pour voir si la personne est toujours active et intéressée pour travailler», dit-elle.

Même son de cloche pour Maud, qui cherche un emploi dans le recrutement et l’administratif après avoir perdu son travail à cause de la crise. «Ça peut aider les recruteurs pour savoir comment les gens se sont débrouillés.»

Face à tant d’incertitude, on est allé parler à des experts en recrutement pour voir ce qu’ils en pensent.

Oui, la question est déjà posée en entrevue

Les experts en recrutement interrogés sont formels, la question est déjà utilisée. «Tu peux la poser pour mesurer l’orientation vers l’action, la gestion du stress, ou la créativité par rapport à la mise en place de projets dans une situation difficile», explique Réna Saraïlis, présidente d’Aleanza recrutement.

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Depuis que le confinement a commencé, elle demande aussi aux candidats comment ils le vivent. «Je fais ça parce que je m’intéresse à eux pour vrai.»

«Donc peu importe la période, parle-moi de tes réalisations.»

Selon le président de BOOST Groupe conseil, Philippe Lellbach, cette question se pose très bien en entrevue. Elle apparaissait même déjà avant la pandémie, juste sous des formes différentes. «Il y a trois choses que j’évalue, les connaissances, les tests psychométriques et le troisième volet c’est ce qu’ils ont réalisé dans le passé. Donc peu importe la période, parle-moi de tes réalisations.»

Une question pour les postes de direction

La question semble davantage employée pour les entrevues qui mènent à des postes de direction. «Je l’ai utilisé dans des postes où il y a un besoin de leadership, pour voir comment la personne réagit en période incertaine, si elle a entrepris des projets», spécifie Réna Saraïlis.

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Même chose pour Philippe Lellbach. «Si je vise un poste de gestionnaire, je veux déterminer la proactivité du candidat, comment il est en mode solution.»

Pour des postes d’employés ou de manœuvre, l’objectif est d’établir si la personne cherche un nouveau job momentanément ou pour de bon. «Là, ce que j’ai souvent comme réponse c’est “on attend” ou “on attend une réponse de l’employeur”», explique Philippe Lellbach.

Est-ce qu’elle est légitime?

Marc, un internaute, estime que cette question empiète trop sur la vie privée. «Il me semble que l’employeur aussi doit y aller d’une logique de respect minimal, car moi je l’auditionne pareil et s’il me déplait dans son interaction, je peux très bien aller voir ailleurs. Ne sommes-nous pas en période de pénurie de main-d’œuvre?», questionne-t-il.

«Il y a plus de 15% de chômage au Québec, c’est plate, mais les employeurs ont le choix.»

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Philippe Lellbach est d’un autre avis. Les candidats doivent se préparer à se faire poser ce genre de questions. «Il y a plus de 15% de chômage au Québec, c’est plate, mais les employeurs ont le choix.»

Réna Saraïlis concède que la question doit servir à obtenir une information précise et qu’elle ne doit pas être posée pour juger le comportement de quelqu’un. «Si on demande ça sans stratégie, elle peut être dangereuse et amener une certaine subjectivité, un biais de perception ou un jugement», explique-t-elle.

L’experte estime que, pendant un entretien d’embauche, la responsabilité est partagée. Le recruteur doit analyser sans préjugés et le candidat doit développer ses réponses pour ne laisser aucune place à la déduction. «Préparez-vous, car c’est le rôle du candidat de donner une réponse complète», prévient-elle.

L’authenticité, la meilleure des réponses

Mais alors que répondre? Si on a profité du confinement pour prendre du temps pour soi, se reposer et faire du pain, est-ce qu’on est automatiquement éliminé?

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La bonne réponse est la vraie réponse, rappellent les deux experts. Quelqu’un qui s’assume et qui explique clairement ses choix, ça donne confiance. «Pour moi, une entrevue réussie, c’est une entrevue remplie d’authenticité, qui dit la vérité», souligne la présidente d’Aleanza recrutement. La ligne directrice pour ses entretiens est de ne jamais juger un candidat sur une seule réponse. «Puis ce n’est pas parce qu’une personne a pris du temps avec ses proches qu’automatiquement elle n’a pas d’ambition», nuance-t-elle.

Maud et Lili, pour leur part, ont déjà leur réponse. «Je vais dire que pendant le confinement j’étais en train de chercher un emploi, je postulais», avance Lili. «Je me suis dirigée vers mon côté créatif, j’ai fait de la peinture, des puzzles, j’ai réfléchi à mon parcours et j’ai cherché un nouvel emploi», dit Maud.

Maintenant que vous avez les cartes en main, bonne recherche!