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Est-ce qu’on parlerait autant du salaire de la mairesse de Longueuil si c’était un homme?

On parle beaucoup de « body shaming », mais encore peu de « money shaming ».

Par
Lucie Piqueur
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Aux élections municipales de 2017, on avait salué le nombre record de femmes élues à des postes de mairesses : 18,8 % de mairesses, soit moins d’une sur cinq, « quel exploit! ».

Longueuil, elle, est dirigée par une femme depuis 2009. Et ça adonne que sa mairesse, Sylvie Parent, est la mieux payée de tous les maires et mairesses du Québec. Vous en avez sûrement entendu parler parce que ç’a fait beaucoup jaser, et la plupart des candidat.e.s actuel.le.s à la mairie ont une position sur le sujet.

Est-ce qu’elle gagne des droits d’auteur sur l’utilisation du terme «coupe Longueuil»?

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À quelques jours des prochaines élections municipales, ce débat pose pas mal de bonnes questions : est-ce que Sylvie Parent est vraiment trop payée? Quel serait le salaire acceptable pour les maires et mairesses québécois.es? Et la question qui tue : est-ce qu’on parlerait autant du salaire de la mairesse de Longueuil si elle était un homme?

Plus que François Legault

Parlons signes de piastres, pour commencer. Sylvie Parent gagne 240 000 $ par an. Ça fait beaucoup, considérant que le premier ministre du Québec ne gagne « que » 206 000 $, et la mairesse de Montréal, 185 000 $. (Enfin, ça fait surtout beaucoup comparativement aux maires et mairesses de petits villages qui gagnent 3000 $ par an alors qu’ils doivent être disponibles 24/7.)

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Mais qu’est-ce qui se passe? Est-ce qu’elle gagne des droits d’auteur sur l’utilisation du terme « coupe Longueuil »? Est-ce qu’elle fait du Uber on the side? Non. Ce qui se passe, c’est qu’elle cumule des fonctions à la mairie de Longueuil, à la Communauté métropolitaine de Montréal, à l’Autorité régionale de transport métropolitain et à l’agglomération (et que son allocation de dépenses est de 17 000 $, quand même…).

Bon, après, est-ce que ça parait beaucoup quand on compare avec le salaire annuel du PDG de Bombardier? Pas tant, étant donné que celui-ci est de plus de 4 millions.

Les rares femmes qui gagnent trop m’intéressent beaucoup moins que les nombreuses qui ne gagnent pas assez.

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Dans Les Affaires, Raphaël Mélançon est d’avis que le gouvernement provincial devrait mettre son nez dans les salaires des maires et mairesses (qui définissent celui-ci eux-mêmes, il faut le dire) pour rendre le tout plus équitable. Selon lui, leur rémunération devrait être proportionnelle au nombre d’habitant.e.s dans leur commune.

Franchement, il n’a pas tort. Comme on en parle à chaque élection, ce serait bien de revoir et d’organiser un peu mieux le salaire des élu.e.s. Mais une question demeure : pourquoi se focalise-t-on autant sur le salaire de la mairesse de Longueuil en particulier?

Les femmes et l’argent, une relation scrutée et critiquée depuis toujours

Rappelons que ça fait seulement 57 ans que les Québécoises ont le droit d’ouvrir un compte en banque et d’exercer un emploi sans l’autorisation de leur mari. Même si ça semble loin pour celles et ceux qui n’étaient pas encore nés, à l’échelle de nos sociétés, c’est très récent. Ça prendra sûrement quelques générations avant que les reliques de cette façon de fonctionner disparaissent. Pour preuve, le salaire des éducatrices, des enseignant.e.s, des préposé.e.s aux bénéficiaires – tous des emplois majoritairement féminins – est constamment discuté et sous-évalué.

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Mais alors que les femmes accèdent de plus en plus aux postes haut placés et mieux rémunérés, on dirait que les commentateurs gardent le réflexe de se demander comment elles ont eu la job, si elles la font vraiment aussi bien qu’un homme, et si elles vont tout dépenser en sacoches et au bar à ongles (alors qu’elles pourraient économiser pour se payer des voyages dans l’espace, imaginez!).

En ce qui me concerne, les rares femmes qui gagnent trop m’intéressent beaucoup moins que les nombreuses qui ne gagnent pas assez. Quand ils et elles se mettront enfin d’accord sur leurs salaires, les élu.e.s pourront recommencer à servir les citoyen.ne.s et à faire évoluer la société plus vite. Ça presse.

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