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De coiffeuse au Québec à coach de surf au Costa Rica

5 questions à Coach Gaby.

Par
Catherine Perron
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Gabrielle Guyon a renoncé aux monts enneigés du Québec en 2015 pour vivre de sa passion du surf à temps plein sous le soleil costaricien. En formant d’autres aspirant.e.s surfeur.euse.s et en amenant son propre sport à un niveau professionnel, cette expat au parcours houleux démontre jusqu’où une détermination à toute épreuve peut mener.

On s’est entretenu avec elle pour en connaître plus sur son quotidien bien loin de la grisaille de l’hiver.

D’où provient cette flamme pour le surf ?

Chaque été, on allait en vacances aux États-Unis en famille et c’est là que mon père a fait naître en moi la passion du sport. À ses yeux, c’était juste un loisir : il n’aurait jamais imaginé que mon intérêt deviendrait aussi extrême.

Auparavant, j’étais maquilleuse et coiffeuse professionnelle au Québec. J’avais 25 ans quand j’ai tout quitté. Je trippais sur l’art et l’extravagance, donc je me suis dit que ce serait la meilleure carrière de « ville » pour moi. Mais quand je me regardais dans le miroir en me demandant si j’étais sincèrement heureuse, la réponse était non. En vacances, quand j’allais surfer, c’était là que j’avais le sentiment de vivre ma « vraie » vie.

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Comment ça s’est passé quand tu as choisi de partir au Costa Rica?

D’abord, je n’ai pas reçu de soutien, car mes proches n’étaient pas enchantés par cette idée. J’étais aussi la seule surfeuse parmi mes amis québécois. J’avais alors besoin de sortir de mon environnement pour rencontrer des gens qui trippaient autant que moi.

J’ai travaillé un an pour accumuler de l’argent, puis j’ai tout vendu, mis l’essentiel dans mon backpack et je suis partie là-bas avec la seule idée en tête de faire ce que j’aimais le plus au monde : surfer.

Je ne parlais ni anglais ni espagnol à mon arrivée. Je me suis débrouillée au fur et à mesure, surtout par rapport aux trucs légaux pour résider là-bas. C’était assez compliqué!

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J’ai commencé par travailler dans un hôtel comme réceptionniste, puis dans un magasin de surf et de plongée. Je faisais 2 $ de l’heure à ce moment-là. J’économisais le plus possible parce que si j’avais dû m’endetter ou demander de l’argent à quelqu’un, je me serais sentie lâche, comme si je n’avais pas l’indépendance de réaliser mon plan par moi-même. Ce qui comptait le plus à ce moment était de surfer tous les jours.

C’est alors que je travaillais dans la boutique de surf que j’ai développé ma passion de l’enseignement du surf. J’ai accompli ma certification de niveau 1 reconnue par l’ASI (Academy of Surfing Instructors) pour enseigner à des débutants, des gens qui venaient en vacances.

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J’ai aimé partager ma passion, mais après quelques années, ça commençait à devenir redondant. Je me suis alors dirigée vers les camps de surf, où j’accompagnais des surfeurs une ou deux semaines. J’ai aimé avoir la chance de tisser un lien avec les participants.

Quel a été le trajet vers ta première compétition de surf officielle?

J’ai d’abord commencé à m’entraîner de façon très sérieuse : j’avais une coach de surf, une autre au gym et je surveillais ma nutrition de près. Je me suis simplement inscrite à une première compétition locale à Playa Dominical. Il y avait peu de filles, j’étais intimidée.

Là, j’ai réussi à me classer troisième sur cinq femmes. C’est à ce moment que j’ai eu un gros flash : wow, moi qui avais commencé sans argent ni conditions de vie favorables à l’apprentissage de ce sport, j’avais réussi à vivre un classement dans une compétition de surf! Je me suis sentie émerveillée et pleine de gratitude d’avoir accompli cet objectif que je croyais impossible depuis ma jeunesse.

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Après ça, je parcourais les compétitions costariciennes par mes propres moyens, ma planche dans un rack sur ma moto, soutenue financièrement par le resto local ou l’entreprise de bikinis de mon amie.

Et maintenant, à quoi ressemble ton quotidien?

Aujourd’hui, je travaille une semaine sur deux dans un camp de surf où j’entraîne des personnes de tous les niveaux. J’accompagne aussi des athlètes avec mon entreprise Surf Coach Gaby sur plusieurs mois. J’adore ce travail puisqu’il me permet de voir les progrès de mes surfeurs et de les soutenir à travers tous les aspects de leur sport, en partant de leur état d’esprit jusqu’à leur nutrition.

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Côté personnel, depuis l’arrêt des compétitions pendant la pandémie, même si je m’entraîne encore à un niveau professionnel, je vois maintenant la compétition d’un œil moins « radical ». Je suis en paix avec le fait que je n’aurai peut-être pas les ressources pour passer au circuit international, car au fil du temps, j’ai réalisé qu’il m’aurait fallu avoir des moyens exorbitants et des commanditaires très spécifiques pour gravir ces échelons.

Quels sont tes plans pour les prochaines années?

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Mon prochain objectif est d’ouvrir une école de surf gratuite pour les jeunes talents dans un pays moins fortuné.

Je constate que dans certaines régions, des athlètes au potentiel incroyable ne possèdent pas les moyens financiers nécessaires pour avoir accès au circuit professionnel. À l’adolescence, ils chutent de haut lorsqu’ils comprennent que leur rêve leur sera inaccessible, faute d’intégrer un programme de sport-études en surf ou de posséder l’argent nécessaire pour voyager à travers le monde pour les compétitions, par exemple. Ça paraît : il y a un manque flagrant de diversité en compétition internationale.

Ces personnes sombrent parfois dans une grande tristesse et même dans des problèmes de consommation. Si, pour ma part, je n’ai pas bénéficié des plus grands commanditaires, j’aimerais être celle qui sème l’étincelle dans les rêves des autres en bâtissant une équipe pour encadrer la carrière de ces jeunes surfeurs prometteurs. C’est ce dont j’aurais eu le plus besoin et je veux redonner au suivant pour que tous et toutes puissent s’accrocher à leur rêve comme je l’ai fait.

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