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Construire une maison dans sa cour : l’accès à la propriété par la porte d’en arrière 

Les unités d'habitations accessoires constituent aussi une façon de faire de la densification urbaine « douce ».

Par
Justin Gélinas
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En parcourant les maisons à vendre, je me suis vite rendu compte qu’être propriétaire d’un bungalow avec une piscine creusée ne me serait pas aussi accessible que pour la génération de mes parents ou de mes grands-parents.

Alors, par quels moyens peut-on accéder à la propriété dans le contexte économique actuel?

Repenser l’habitation de notre territoire

On a juste à construire plus de maisons, déboiser plus de terrains!

… Pas vraiment, non. La réalité c’est que plusieurs municipalités et villes au Québec ont atteint un point de saturation pour le développement résidentiel. En plus, l’étalement urbain nuit à la lutte aux changements climatiques. Ça crée plus de déplacements, plus de pollution et ça impacte les milieux naturels.

Est-ce qu’on veut vraiment continuer à développer des nouvelles rues qui étendent leurs tentacules un peu partout au Québec?

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Radio-Canada rapportait récemment que la superficie des milieux naturels dans le sud du Québec diminue à raison de 0,6 % par an. C’est pourquoi le gouvernement a recommandé que les municipalités limitent l’étalement urbain dans sa nouvelle politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire (PNAAT). L’État doit « orienter la croissance vers des milieux déjà dotés d’infrastructures et de services publics, situés au cœur de nos villages et de nos villes, limitant ainsi l’étalement urbain », peut-on lire dans la Politique.

L’accès à la propriété, c’est peut-être l’occasion de se poser de nouvelles questions sur l’occupation de notre territoire. Est-ce qu’on veut vraiment continuer à développer des nouvelles rues qui étendent leurs tentacules un peu partout au Québec? Il doit certainement exister d’autres options que le modèle traditionnel du bungalow en banlieue.

Oui, et en voici une : construire une maison dans sa cour.

Bienvenue dans ma cour

L’« unité d’habitation accessoire » (UHA), c’est un logement secondaire créé dans des maisons familiales ou des cours arrière. Ce n’est pas nouveau au Québec. Un article publié dans le magazine Avenues, explique « qu’au siècle dernier, plusieurs propriétaires construisaient d’abord une petite habitation sur leur terrain avant d’avoir les moyens de bâtir plus grand. S’il ne reste que peu de traces de ces constructions, l’idée semble faire un retour en force ces dernières années ».

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Preuve que le concept est pris au sérieux, les architectes le considèrent comme une nouvelle façon d’accéder à la propriété et d’occuper le territoire.

Les jeunes peuvent s’offrir une habitation plus facilement dans un quartier qui ne leur serait pas nécessairement accessible.

En entrevue à Radio-Canada, l’architecte et cofondateur de la firme Microclimat, Olivier Lajeunesse-Travers, dit qu’il s’agit d’une autre façon d’accéder à la propriété. En parlant de l’un de ses projets, l’architecte explique que le jeu d’équilibre entre le nouveau et l’existant est intéressant : « On a un triplex en avant et on vient en ajouter un autre à l’arrière. Ils sont séparés par une grande cour avec un petit lien physique qui unit les deux bâtiments (contrainte imposée par les municipalités). »

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Selon lui, ce qui est surprenant dans ce type de projet, c’est qu’il y a un respect du caractère privé des voisin.e.s même en partageant la cour et les installations communes.

Une pratique bien établie au Canada

Ailleurs au Canada, les unités d’habitation accessoire sont déjà bien implantées. C’est que la crise du logement y est souvent plus grave.

Alors pourquoi pas au Québec?

La Ville de Sainte-Catherine en banlieue de Montréal est la première municipalité au Québec à encadrer dans sa réglementation les unités d’habitations accessoires.

Pourtant, les bâtiments accessoires encouragent l’accès à la propriété, améliorent la densification et favorisent l’habitation des personnes âgées à leur domicile. De plus en plus, les municipalités du Québec seront appelées à considérer ce genre de règlementation qui permettra et encadrera la construction de ces « pavillons-jardin ».

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Rester près de sa famille

Habiter avec ses parents, ça peut être un pensez-y-bien… Par contre, l’idée de vivre dans une habitation privée dans la cour tout en payant seulement une partie de l’hypothèque, ça peut faire changer d’avis.

Quand on y pense, c’est gagnant-gagnant. D’une part, les parents peuvent vivre leur retraite dans leur quartier tout en restant près des enfants (et des petits-enfants). D’autre part, les jeunes peuvent s’offrir une habitation plus facilement dans un quartier qui ne leur serait pas nécessairement accessible.

Le problème de l’accès à la propriété au Québec est peut-être l’occasion de se questionner sur nos rapports familiaux et au vieillissement de la population.

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Au Québec, ce n’est pas trop dans nos coutumes de partager le nid familial longtemps. Pourtant, ailleurs dans le monde, comme au Japon, l’habitation avec ou près des parents est bien ancrée. Il n’est pas rare de voir des jeunes partager une maison avec leurs parents toute leur vie. C’est que l’accès à la propriété est très difficile sur un territoire aussi densément peuplé que le Japon. Au-delà des coûts, il y a un respect des aînés et une réelle préoccupation de prendre soin d’eux et de prolonger leur autonomie.

Comme quoi le problème de l’accès à la propriété au Québec est peut-être l’occasion de se questionner sur nos rapports familiaux et au vieillissement de la population.

Une ère qui tire à sa fin

L’ère du bungalow est révolue. C’est de moins en moins accessible pour les acheteurs et moins rentable pour les municipalités, en plus d’être dommageable pour l’environnement et d’aller à contre-courant de la lutte aux changements climatiques.

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Au cours des prochaines années, la densification du territoire sera inévitable. Et les UHA ouvrent la possibilité d’une densification plus douce que des tours à condo.