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Comment j’ai renoué avec mon coeur d’enfant (et appris à être un meilleur adulte) en jouant dehors
J’écris cet article de mon balcon, dans Rosemont. Les feuilles bruissent au vent, les oiseaux gazouillent… En tout cas je pense, parce que tout ce que j’entends c’est le claquement de la construction, le vrombissement étouffé de la 40 pis deux-trois monsieurs tousser dans la ruelle.
J’aime la ville, j’adore ma ville en fait, mais pour moi c’est pas l’endroit pour se laisser aller. C’est une place où j’avance. Je suis pressé, stressé, concentré sur tout ce que j’ai à faire. La ville, c’est le royaume des adultes.
En contrepartie, la nature serait le refuge de l’enfance. Un endroit où rêver, explorer et jouer. Je l’ai un peu appris à mes dépens. Donc ça veut dire quoi « garder son cœur d’enfant ? »
L’enfant est curieux
Partons du début. Mes réflexions débutent le long d’une plage sur la Côte-Nord, alors que je prends un bain de sable seul au bord du fleuve. Mes pieds sont enfouis sous les galets, mais ma tête est ailleurs… probablement encore en ville. J’essaie de me ramener dans le moment présent en explorant les décors du regard. À une dizaine de mètres, la plage fait place à des rochers. La côte fuit à perte de vue et au loin, je remarque qu’elle tourne et s’efface derrière la forêt. Les arbres camouflent ce qui semble être une baie. Une idée me vient en tête : « Quossé qu’y a là? ». Ma curiosité est piquée, mais ma rationalité me fait douter. Je dois faire un choix : j’y vais ou j’y vais pas ?
Mon cerveau d’adulte me freine… « Wow minute, bonhomme. Tu vois l’eau sur les roches? C’est glissant ça. Imagine que tu te casses le genou… t’iras pas loin avec une rotule fendue. Pis anyway, oussé que tu penses aller de même avec tes gougounes? » Je me couche ce soir-là avec un goût amer en bouche (du regret qu’on appelle). J’ai passé la nuit à rêver à ce qu’il y avait de caché derrière les arbres et à m’en vouloir d’avoir choké.
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L’enfant est courageux
Le lendemain, je pars cueillir des bleuets sauvages à flanc de colline avec mon grand-père. À peine arrivé, je me sens petit. Petit face à l’immensité du territoire, mais aussi petit genre… littéralement parce que je retrouve la forêt boréale de mon enfance. La forêt où j’ai tant joué, où je me suis fait plein d’histoires et d’aventures, la forêt où j’ai découvert c’est quoi un nuage de moustiques.
Je repense au jour d’avant, à la plage, puis je contemple les hautes collines qui se dressent devant moi. Je vois le sommet et la vue qu’il me promet. À nouveau, je dois faire un choix : j’y vais ou j’y vais pas? Ma voix d’adulte prend le contrôle : « Y lala! C’est haut pas mal ça… Ouf! Pis t’as vu la petite façade? Tu peux pas l’escalader sans corde… » – TA YEULE MAUDITE VOIX INTÉRIEURE D’ADULTE!
Non. Pas cette fois-ci. Je sors de ma tête et décide d’écouter ma voix d’enfant à la place. J’ai envie de découvrir ce qu’il y a l’autre bord. J’ai envie d’escalader, de me dépasser. Je monte la colline à toute vitesse et j’arrive à la façade. Je le fais-tu? C’est quand même dangereux… Fuck off, go. En plein milieu je regarde en bas, c’est pas si haut que ça, mais assez pour me blesser.
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J’arrive enfin en haut. D’un côté, le fleuve Saint-Laurent rejoint le ciel à l’horizon et de l’autre, un tapis de conifère se déroule vers l’infini. Je jubile. C’est là que je réalise ce que ça veut dire pour moi garder son cœur d’enfant. Ça veut dire écouter ma curiosité et trouver le courage de la suivre.
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Et surtout, l’enfant est bienveillant
La nature a le don de nous forcer à nous salir. Quand t’as les pieds pleins de boue, les vêtements trempés par la pluie ou trois-quatre coups de soleil (parce que non, un bon tan ça remplace pas de la crème solaire…), t’as pas le choix de relativiser ton inconfort, car bien souvent le jeu en vaut la chandelle.
Le danger d’être adulte, c’est de vouloir tout contrôler, calculer, analyser… C’est contempler les conséquences et s’y arrêter. C’est normal. On vit tous de l’anxiété, du stress… On est quand même des êtres programmés pour survivre! La nature m’a permis de reconnecter avec ma curiosité. Elle m’a permis de regarder un défi et d’y voir une raison de m’amuser. De contempler un moment difficile et d’y voir une opportunité. Bref, la nature m’a permis de comprendre qu’en retombant en enfance, je grandis.