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Comment investir dans le marché canadien des stupéfiants légaux

Les profits du vice sans le danger du crime.

Par
Billy Eff
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Dans l’imaginaire collectif des sociétés occidentales, les drogues se séparent en deux classes : celles créées et brevetées par des compagnies pharmaceutiques, généralement bien vues et acceptées, et celles créées par la nature, dont les mystères et pouvoirs nous rendent plus dubitatif.ive.s.

Les drogues « naturelles » ont donc été rendues illégales dans la plupart des pays du monde, emboîtant le pas aux États-Unis et à leur Loi sur les substances contrôlées de 1970. Il aura fallu attendre que des milliers de gens se retrouvent en prison et que des milliards de dollars soient jetés aux poubelles avant que des entrepreneur.e.s réalisent qu’il y avait un profit à faire avec le cannabis, la drogue illégale la plus consommée dans le monde.

En 2018, le Canada est devenu le premier pays du G8 à légaliser le cannabis récréatif, ouvrant du même coup la porte à un tas d’investisseur.euse.s qui auront un avantage de temps et d’expertise au fur et à mesure que d’autres pays suivront l’exemple du Canada.

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Depuis la légalisation, l’industrie du cannabis aurait rapporté au PIB national plus de 43 milliards de dollars, et elle grandit à un taux d’environ 10 % par année. Vous l’aurez compris, c’est beaucoup d’argent. Et une éventuelle décriminalisation ou légalisation de certaines drogues psychotropes – comme la psilocybine ou la kétamine – à des fins thérapeutiques ne ferait que faire croître le marché.

Mais est-ce que ça vaut vraiment la peine d’investir là-dedans? Et comment est-ce qu’on s’y prend?

À quoi ressemble le marché actuel?

Pour une drogue qu’on a gardée illégale aussi longtemps, on n’a pas tardé à adopter le cannabis de manière passionnelle. On en conviendra tous et toutes, le weed, ce n’est plus ce que c’était. Fini les jours où il fallait se trouver une personne un peu sketch pour nous vendre du stock de bas étage. Désormais, des célébrités lancent leurs marques de weed, de produits dérivés ou même de stations à stoner faites à la main. Les dealers illégaux ont des emballages qui feraient pâlir d’envie de grands studios de design, et même papi et mamie sont sur le CBD!

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Mais est-ce un investissement sûr? La réponse à ça, c’est : au moins autant que la crypto.

Bon, j’exagère : c’est sûrement un peu mieux, mais ça reste un marché qui, pour l’instant, est assez spéculatif et où beaucoup d’enjeux (et d’opportunités) sont encore en suspens. On y consacre beaucoup d’intérêt, de temps et d’argent, mais, un peu comme la crypto ou encore la bulle du web des années 90, on est dans un territoire inconnu où le Apple ou le Google du weed n’existe pas encore, et où tout le monde veut le devenir.

Demandez aux investisseurs et investisseuses de premières heures, qui ont dû composer avec la green bubble de 2019. Lorsque l’État de la Californie et le Canada ont légalisé le cannabis en 2018, ce fut une ruée vers l’or et plusieurs compagnies de cannabis ont pu capitaliser sur la possibilité d’être listées à la bourse d’échange de Toronto. Résultat : des offres publiques initiales incroyables et d’énormes évaluations boursières qui ne collaient pas nécessairement à la réalité de la demande, ni aux lois établies par chaque province.

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En raison des lois extrêmement strictes, des taux de taxation rédhibitoires et des frais élevés pour les permis et l’équipement, l’industrie du cannabis est largement dominée par de grandes entreprises backées par des centaines de millions de dollars. Cela constitue un obstacle non négligeable pour l’industrie, et les ventes et profits espérés n’ont pas été atteints. En 2019, 280 tonnes de weed invendu ont été détruites selon Santé Canada. Et en 2021, c’était 425 tonnes, soit 26 % de la production nationale totale. La surproduction fait descendre les prix, et donc les profits.

Il faut aussi savoir que beaucoup de ces entreprises ne sont pas encore profitables, vu qu’une grande partie de leur évaluation boursière repose sur leur capacité à s’exporter à l’international dans le futur. Mais pour l’instant, la légalisation du cannabis ne se trouve pas sur la liste de priorités de la plupart des pays dans le monde. Combien de temps, donc, avant que ces entreprises canadiennes ne deviennent des multinationales? Probablement encore un bout.

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La psilocybine représentera-t-elle une nouvelle opportunité?

Par ailleurs, les champignons psychotropes, dits « magiques », sont de plus en plus populaires. Plusieurs régions du monde réévaluent actuellement leurs effets supposément néfastes depuis que des tests cliniques ont rapporté que la psilocybine, l’ingrédient psychoactif qu’ils contiennent, aurait des effets positifs et durables chez les gens aux prises avec certaines conditions de santé mentale. Plusieurs compagnies canadiennes travaillent ainsi sur des plans de commercialisation pharmaceutique de la psilocybine.

De plus, la psilocybine bénéficie depuis peu d’une dérogation spéciale du gouvernement canadien, et peut être prescrite par des médecins à des patient.e.s en fin de vie. Même si les champignons psychotropes sont assez facilement trouvables, et sont même disponibles en vente libre dans certains magasins de l’Ouest du Canada, ils restent illégaux partout au pays.

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Toutefois, plusieurs personnes voient en la psilocybine et ses vertus un potentiel incroyable pour la santé mentale, mais aussi beaucoup d’argent à faire. Sans surprise, des compagnies d’alcool ont investi dans le cannabis, et maintenant, des entreprises de cannabis investissent dans des compagnies de shrooms. Un cercle vicieux ou vertueux, c’est selon.

Mais cela fait en sorte que la psilocybine, qui est encore plus méconnue que le weed, devra attendre encore un bout avant d’avoir son moment de légalisation, et elle n’est pas à l’abri de connaître ses propres remous dans les mois qui suivront. On peut donc ranger les compagnies de psilocybine, pour l’instant, dans la même catégorie que les compagnies de cannabis médicinal. Le but principal de ces compagnies est de fournir l’industrie médicale, plutôt que les consommatrices et consommateurs récréatifs.

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Alors, est-ce que je vais devenir riche?

Se demander si on devrait investir dans le marché de la drogue légale, c’est un peu comme se demander si on devrait consommer de la drogue. La réponse la plus sécuritaire est non, et si vous avez des doutes, ce n’est probablement pas la meilleure option pour vous.

C’est une industrie qui est encore pleine d’opportunités, mais même en Californie, où les lois pour se lancer en affaires sont beaucoup moins restrictives qu’au Québec, le marché illégal du cannabis reste deux fois plus gros que sa contrepartie légale.

Toutefois, il y a, dans l’industrie du cannabis, plusieurs sous-industries. Il y a des gens qui font pousser les plantes, d’autres qui créent les emballages ou les petits sachets de contrôle d’humidité… Investir, ça peut autant vouloir dire placer de l’argent chez Aurora, qui produit du weed, que chez Scott’s Miracle-Gro, la compagnie de produits d’horticulture, dont le subsidiaire spécialisé en produits de culture de cannabis constitue 30 % du chiffre d’affaires. Les options sont quasi-infinies!

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Je crois que je suis prêt.e, comment je fais?

La bonne chose avec la légalisation au niveau fédéral est qu’au Canada, contrairement aux États-Unis, les compagnies de weed et de psychédéliques peuvent être listées à la bourse. Pour l’instant, la plupart des grandes compagnies canadiennes sont listées à la bourse régulière du TSE, alors que les start-ups sont listées sous le TSXV, réservé aux capitaux de risque.

Ceux et celles qui souhaiteraient investir peuvent se rapporter à l’index canadien du cannabis (Canadian Cannabis LP Index), qui représente le marché public du secteur de la marijuana médicale et légale au Canada. Par la suite, il est fortement recommandé de prendre le temps de bien vous renseigner sur la ou les compagnies dans lesquelles vous voudriez investir. C’est un marché qui bouge vite et où les fusions, acquisitions et rebranding sont très fréquents.

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De plus, comme tout ce qui est nouveau, excitant et prometteur, les actions de compagnies de cannabis ne sont pas à l’abri de devenir des stonks. Ce serait plate d’investir et d’apprendre que des kids sur BayStreetBets se sont concertés pour shorter la compagnie dans laquelle vous aviez mis votre argent. Si vous n’êtes pas fan d’émotions fortes, ce n’est probablement pas l’industrie dans laquelle vous devriez investir.

Et cela va sans dire, mais assurez-vous d’investir dans des compagnies qui ont reçu leur permis de cannabis ou d’exemption pour la psilocybine. Sinon, vous n’êtes qu’en train d’investir dans le crime.

Une fois que vous êtes certain.e de ce que vous voulez faire, vous pouvez investir comme vous le faites normalement, soit par le biais d’un.e courtier.ère ou d’une plateforme en ligne comme WealthSimple, qui permet d’acheter des actions de la plupart des compagnies canadiennes. Les prix de ces actions varient grandement, de quelques dollars à près d’une centaine de dollars.

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Rappelez-vous bien que ces investissements ne sont pas garantis; vous pourriez perdre de l’argent. N’espérez pas devenir riche du jour au lendemain grâce à vos actions dans des compagnies de shrooms ou de weed. Ce sont deux industries qui sont appelées à se réinventer constamment dans les années à venir, au fur et à mesure que les lois et les mentalités changent.

Oh, et évidemment : n’investissez pas sous l’influence de la drogue.