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Comment faire une réclamation au Tribunal administratif du logement?

Qu'est-ce qui est admissible? Combien ça coûte? À quoi s'attendre?

Par
Gabrielle Tremblay-Baillargeon
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Hausse de loyer abusive? Éviction forcée? Intimidation? En tant que locataire, vous avez des recours. Et ces recours aboutissent souvent au Tribunal administratif du logement (ou le TAL, l’ancienne Régie du logement).

Comment se préparer avant de présenter une cause là-bas? De quoi a-t-on besoin pour ouvrir un dossier? À quoi s’attendre quand on embarque dans le processus? Et surtout, comment gagner? On en a parlé avec quelqu’un qui est passé par là et on démêle tout ça.

Deux coups durs

En 2021, Jean-Christophe Gascon a vécu non pas un, mais deux différends avec son propriétaire. Alors qu’il habitait son appartement de La Petite-Patrie depuis une dizaine d’années, il s’est soudainement retrouvé dans une lutte administrative extrêmement stressante pour conserver son chez-lui.

« [Le proprio] a fait une tentative de reprise de logement, puis j’ai dû aller au TAL pour faire accepter une cession de bail qu’il tentait de bloquer », explique Jean-Christophe. Grosse année, pareil.

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Le propriétaire du logement de Jean-Christophe, qui travaille au sein d’une compagnie de gestion immobilière, a ainsi procédé à une « reprise de mauvaise foi ». Dans ce genre de situation, le ou la propriétaire tente d’évincer illégalement le ou la locataire sous prétexte de vouloir faire des rénovations, par exemple, ou encore parce que la personne qui occupe le logement y réside depuis plusieurs années, et que le prix de loyer qu’elle paie est assez bas par rapport à celui du marché actuel – c’était le cas de Jean-Christophe.

Jean-Christophe a été chanceux. Il a remporté ses deux causes et, selon lui, ses connaissances en droit du logement y sont pour beaucoup.

Comme la plupart des locataires qui se présentent devant le TAL, Jean-Christophe s’est représenté seul, c’est-à-dire sans avocat.e. Armé de ses preuves, comme des enregistrements audio de conversations avec son propriétaire – dont une conversation remplie de menaces d’éviction –, il a défendu son cas devant la juge.

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On s’entend que c’est assez atypique d’enregistrer ses conversations téléphoniques, mais Jean-Christophe avait pris l’habitude de le faire depuis quelques années. « C’est tout à fait légal de le faire et c’est recevable en preuve », précise-t-il. Attention : pour être 100% legit, vous ne pouvez enregistrer que des conversations auxquelles vous participez.

Jean-Christophe a été chanceux. Il a remporté ses deux causes et, selon lui, ses connaissances en droit du logement y sont pour beaucoup. « Si tu ne connais pas tes droits, tu peux facilement te faire avoir, estime-t-il. Le système juridique, c’est quelque chose d’intimidant. »

Pour gagner, il ne faut pas hésiter à aller chercher de l’aide, ajoute-t-il, surtout auprès du Comité logement de votre quartier ou de votre municipalité.

Même s’il a déménagé en Gaspésie pour le travail depuis sa mésaventure, Jean-Christophe conserve un goût amer de son passage au TAL.

« Ce qui m’a marqué, c’est la froideur du tribunal, raconte-t-il. Moi, j’habite le logement depuis dix ans. Ce lieu-là, c’est mes souvenirs, mon ancrage dans le quartier, dans ma communauté. Je me retrouvais devant une juge et un propriétaire qui parlaient de mon logement de manière très froide et détachée, comme si tout le bagage personnel et intime que j’avais avec ce logement-là n’avait plus d’importance. »

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Ce qu’on peut réclamer

En tant que locataire, on a le droit d’ouvrir un dossier au TAL pour une non-exécution de travaux, de la vermine (souris, punaises de lit et tout ce qui demande de l’extermination) ou encore si l’on juge que l’on vit du harcèlement ou de l’intimidation de la part de notre propriétaire.

Avant de déposer une demande au TAL, il faut envoyer une mise en demeure à son ou sa propriétaire.

Sandrine Puchin, du Comité logement Rosemont, décrit le harcèlement comme un comportement volontaire du propriétaire. « En gros, c’est rendre la vie du ou de la locataire tellement difficile qu’il ou elle veut quitter le logement, explique-t-elle. C’est souvent ça, le but caché derrière le harcèlement. »

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Enfin, comme pour Jean-Christophe, avant ou après une reprise de logement que l’on juge de mauvaise foi, on peut également ouvrir un dossier pour se faire indemniser.

Et malheureusement, les rénovictions semblent là pour rester. En 2021, le Comité logement Rosemont notait 51 reprises ou évictions du genre dans le quartier. À titre comparatif, il y a quelques années, on n’en comptait qu’une poignée par an.

Trois choses à savoir avant de s’embarquer

Vous vous sentez prêt.e à lutter pour votre droit au logement? Sandrine Puchin recommande de prendre note des informations suivantes avant de plonger.

Ce n’est pas gratuit

Avant de déposer une demande au TAL, il faut envoyer une mise en demeure à son ou sa propriétaire. Selon la requête, on peut faire ça en ligne (gratuitement) ou devoir l’envoyer par courrier recommandé (15 $).

De plus, on peut s’attendre à débourser des frais de 75 $ pour l’ouverture d’un dossier au tribunal. Ça, c’est sans compter les heures de travail manquées lors de l’audience (ou des audiences!).

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Les délais varient selon la cause

Certains dossiers peuvent être ouverts en ligne alors que d’autres nécessitent de l’être en personne. Une fois la chose faite, les délais les plus courts sont d’environ six semaines (pour les causes jugées urgentes), mais peuvent s’étendre sur de 10 à 15 mois (pour des causes de réclamations de remboursement ou de dépôt de loyer, par exemple).

Connaître ses droits est primordial

« Très souvent, les gens pensent que ce que leur propriétaire a fait ou demandé, c’est légal, mais en fait, ce ne l’est pas, souligne Sandrine Puchin. Si jamais un locataire a l’impression que quelque chose ne tourne pas rond, il peut nous appeler. »

Comme les jugements du TAL sont publics, on peut retrouver les détails de l’histoire de Jean-Christophe (et beaucoup d’autres) sur le site de la SOQUIJ, la Société québécoise d’information juridique.

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