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Comment faire de l’argent avec un podcast

Le balado «made in Québec» se porte mieux que jamais.

Par
James Lynch
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Si vous aviez entendu le mot « podcast » il y a 10 ans, il y a de bonnes chances que vous auriez dit « de quessé » ou encore « ah oui, Avec pas d’casque, le band que j’ai vu aux Francos cet été ». Maintenant, en 2019, si vous ne savez pas encore ce que c’est, c’est que vous vivez encore en 2009.

Non seulement c’est l’un des médiums les plus en vogues du moment, mais c’est même rendu une carrière lucrative pour certains.

Par exemple, l’humoriste et ancien chroniqueur de Testostérone Mike Ward s’en sort tellement bien avec son balado hebdomadaire Sous écoute, qu’il pourrait arrêter la tournée et en vivre. Avec plus de 200 millions de téléchargements, il est le roi du podcast francophone au Canada. Il connaît un tel succès avec son émission, qu’il a pu se permettre de se payer un fuck you aux médias traditionnels avec un billboard au centre-ville cette année.

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Par contre, il n’est pas le seul à vouloir faire de l’argent en propulsant des balados dans les oreilles des Québécois.

De Gatineau au Club Soda

Selon une étude récente, l’humour serait le genre le plus populaire chez les adeptes de baladodiffusion. Au Québec seulement, il y a plus d’une centaine d’émissions consacrées à ce genre! Depuis que la catégorie balado de l’année a été créée au gala des Olivier il y a trois ans, Sous écoute de Mike Ward a remporté chaque fois. En plus d’être une plateforme où les humoristes peuvent se lâcher lousse et avoir des discussions sans filtre, c’est aussi devenu un endroit où des carrières d’humoristes sont lancées.

Parlez-en au Gatinois Jerr Allain, qui a vu sa carrière prendre une nouvelle tournure après un passage remarqué au balado de Mike Ward en 2017.

« Mike m’a pas mal découvert quand il a entendu parler de mon podcast, il a aimé ça, pis il m’a invité à un épisode de Sous écoute. Mais bon, j’ai pas scoré la première fois, mais il m’a quand même ré-invité pour un autre, pis là, esti ç’a marché! »

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Tellement marché, qu’il a assuré la première partie du show de Mike quatre ans après avoir commencé sa carrière. Il a aussi donné un spectacle à guichet fermé en octobre 2019 au Club Soda et il a été récemment en nomination pour la première fois aux Olivier dans la catégorie balado de l’année pour What’s Up Podcast.

« Si tu penses te partir un podcast pour te faire de l’argent, tu te crisses le doigt dans l’œil ben raide. »

Reste que même si Jerr investit beaucoup de temps dans son balado, ça ne veut pas dire qu’il pourrait en vivre : « Si tu penses te partir un podcast pour te faire de l’argent, tu te crisses le doigt dans l’œil ben raide. Je suis un des podcasts rentables, mais tsé, j’ai pas encore assez de budget pour me payer un monteur, c’est juste moi qui fais mes propres affaires. Mais bon, [recevoir de l’argent via] Patreon, ça me motive à continuer, pis ça m’a aidé à créer une petite communauté et être plus proche de mes fans. Grâce au What’s Up, je réussis à remplir mes salles, et à élargir mes horizons grâce à mes invités. »

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Le podcast en région

Tout comme Jerr, d’autres créateurs de l’Outaouais obtiennent présentement un beau succès avec le podcast. Depuis quelques années, l’équipe de Transistor a pour mission de faire rayonner la baladodiffusion au Québec. Marie-Hélène Frenette-Assad, directrice générale de la boîte, ainsi que réalisatrice et animatrice du balado F#, explique : « En 2017, Julien Morissette et Steven Boivin ont fondé le Festival de la radio numérique Transistor de Gatineau. L’idée était de faire connaître le balado aux gens de l’Outaouais et faire connaître l’Outaouais aux gens du balado. La demande est vite venue pour produire du contenu et des séries. »

L’équipe offre plusieurs types de séries comme de longues entrevues, des émissions devant public, des projets théâtraux, des documentaires, du contenu pédagogique et du contenu de marque. Transistor a aussi produit la série documentaire Synthèses : Le cas Valérie Leblanc, une enquête audio diffusée à QUB radio. Et ils donnent aussi de la formation. « C’est notre stratégie pour se démarquer et être rentable. » L’entreprise possède même un studio mobile, le Transistruck, qui lui permet de se promener un peu partout au Québec pour donner des formations et faire des enregistrements de balado devant public dans des festivals ou pour des évènements spéciaux.

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Balado pour les marmots

On n’y retrouve pas juste de l’humour trash et des épisodes de true crime en ligne, il y a aussi une offre pour les tout petits. En effet, la boîte de production La puce à l’oreille a pour mission de produire, diffuser, et faire la curation de podcasts documentaires francophones pour enfants. Elle propose aussi des outils, des formations et un accompagnement pour les jeunes publics, les enseignants, les médiateurs, les entreprises, et les institutions.

C’est le constat d’une absence de quelque chose qui a donné l’envie à Prune Lieutier, fondatrice et directrice générale, de développer La puce à l’oreille puisqu’il n’y avait pas beaucoup d’offre pour les jeunes dans la francophonie. « Au début, le financement est venu de la ville de Montréal, 20 000$ pour créer les premiers contenus. Depuis peu, l’UQAM est aussi devenue un partenaire pour couvrir l’aspect pédagogique de notre offre. Les réponses du public, des médias, des professionnels de l’éducation ont été vraiment positives. On a donc créé officiellement une OBNL en 2018. »

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Au début novembre, l’équipe a même organisé Les récrés sonores, la première édition d’un festival de balado pour enfants qui s’est étalé sur trois jours.

La puce à l’oreille a récemment conclu un partenariat avec les Éditions de La Pastèque afin de créer un podcast sur la vie des abeilles. Ce type d’entente, ainsi que leur offre d’ateliers et de formations, leur permet de générer des revenus tout en produisant des contenus originaux.

Rejoindre un grand public

Vous rappelez-vous du magazine P45? Entre 2000 et 2011, cette plateforme de « journalisme créatif » avait fait des vagues dans le paysage médiatique québécois. L’ancien rédacteur en chef du magazine web, Xavier Kronström Richard, œuvre toujours dans le milieu et il a récemment eu l’idée de créer Grand public, une boîte de production de balados. Puisque les podcasts prennent un poids de plus en plus important dans les stratégies marketing des entreprises, il offre, entre autres, un service de création de contenu de marque.

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« On a trois secteurs d’activités. On travaille avec des organismes ou des marques afin de créer des podcasts sur mesure où on prend en charge toutes les étapes de la production jusqu’à la diffusion. Ensuite, on développe des projets pour lesquels on structure des montages financiers. Enfin, on produit des podcasts signatures qui sont des histoires qu’on finance pour leurs permettre d’atteindre leurs auditoires. »

L’équipe de Xavier a aussi sa propre émission, La fois où, une série qui explore comment nos expériences personnelles donnent un sens à notre vie et nous font évoluer dans l’âge adulte.

« Des entités comme Radio-Canada, QUB radio et les indépendants permettent de perfectionner l’art qui consiste à raconter des histoires scénarisées qui rivalisent d’inventivité pour vous rendre accros. »

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Selon Xavier, l’avenir du podcast est prometteur : « Des entités comme Radio-Canada, QUB radio, mais aussi des studios indépendants comme URBANIA, Recréation, La puce à l’oreille, Magnéto, Transistor média ou Grand public, permettent de perfectionner l’art qui consiste à raconter des histoires scénarisées qui rivalisent d’inventivité pour vous rendre accros et accroître l’offre en français auprès des Canadiens. »

De plus en plus de gros joueurs de l’industrie s’intéressent au format. Apple et Google référencent mieux que jamais l’audio, Spotify a acquis le studio new-yorkais Gimlet, et des investissements fusent de toutes parts dans le but de devenir la référence en termes d’écoute.

Xavier voit aussi Grand public s’installer comme une marque de référence pour la production de podcasts narratifs de qualité qui pourraient même avoir un certain impact social.

« Dans cinq ans, j’aimerais aussi avoir convaincu ma mère d’écouter des podcasts et, notamment, les miens. »

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Video killed the radio star? Il serait peut-être temps de faire une mise à jour, car Balado killed the video star ne semble pas loin à l’horizon.