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Combien ça gagne, un travailleur de la construction? 

Est-ce que c'est si payant que ça?

Par
Léopold Picot
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Vous avez toujours eu envie de faire des choses de vos mains? C’est peut-être le moment de vous lancer.

On le sait, une pénurie de logements frappe présentement l’ensemble du Canada. On manque de maisons, de condos, d’appartements abordables, et le secteur de la construction n’arrive pas à répondre à la demande.

Pour cette raison, le gouvernement a lancé un programme (rémunéré 750 $ par semaine!) pour former au pied levé des milliers de travailleurs dans le domaine de la construction. Des cursus raccourcis sont désormais offerts à quiconque souhaite devenir ferblantier, charpentier-menuisier, frigoriste, opérateur d’équipement lourd et opérateur de pelle mécanique.

Éric Boisjoly, le directeur général de la FTQ-Construction, un syndicat qui représente 90 000 travailleurs de la construction au Québec, sur les 220 000 de la province, a répondu à toutes mes questions sur le domaine.

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Un salaire selon la quantité de travail fournie

Déjà, impossible de savoir précisément combien gagne un travailleur de la construction. Tout va dépendre d’à quel point il a envie de travailler pendant toute l’année. Comme pour beaucoup d’autres métiers qui fonctionnent selon un modèle « projet par projet », la plupart n’ont pas de salaire mensuel, mais sont plutôt payés à l’heure.

Pour le salaire horaire, Éric Boisjoly explique que c’est sensiblement la même chose, selon le diplôme et l’expérience. « Quand on est compagnon, c’est-à-dire que l’on a fait un certain nombre d’heures de pratique pour obtenir ce statut particulier dans le milieu, le salaire change. Présentement, le salaire moyen dans le domaine de la construction se situe autour de 43 $ de l’heure ». Et, parce que les conventions collectives ne changent qu’aux quatre ans, le salaire horaire ne bouge pas trop.

En revanche, tes revenus peuvent varier selon les mois de l’année, ou même, selon ta volonté de travailler!

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Si t’es du genre à jamais t’arrêter, que tu travailles bien, tu peux enchaîner les chantiers, et faire grimper ton salaire vitesse grand V. En moyenne, un travailleur de la construction gagne 48 212 $ dollars par an, mais cela peut changer selon les métiers, qui demandent plus ou moins de compétences.

Métier Salaire moyen en 2022
Couvreur 34 673 $
Charpentier-menuisier 44 091 $
Opérateur d’équipement lourd 46 443 $
Opérateur de pelle mécanique 50 488 $
Ferblantier 54 657 $
Frigoriste 62 045 $

Attention aux moyennes présentées dans ce tableau! Si un couvreur (un travailleur qui revêt les toits) a beaucoup de commandes parce qu’il est très expérimenté, il peut facilement faire doubler son salaire. Un charpentier qui a atteint le statut de compagnon a en moyenne un salaire annuel deux fois plus élevé que celui d’un apprenti : son salaire annuel peut passer de 28 954 $ à 57 127 $. Pareil pour le couvreur, dont le salaire d’apprenti se situe à 19 506 $, et celui de compagnon, à 49 134 $.

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Problème de rétention

« On cherche surtout dans les grands centres urbains, Montréal, Québec, Gatineau, etc. La demande se situe surtout au niveau des charpentiers-menuisiers, opérateurs d’équipements lourds, et métiers de finition d’intérieur », explique le syndicaliste. « Le gros problème, avec la construction, c’est que les personnes qui travaillent sur les chantiers sont souvent là temporairement, le temps de faire un peu d’argent, puis ils partent dans d’autres secteurs. »

Mais ce n’est pas le seul défi qui est à la source de ce problème de rétention : les métiers de la construction sont difficiles sur le plan physique.

« Il faut soulever, se pencher, frapper, rester assis des heures si l’on est grutier. Il faut aussi supporter le soleil et les intempéries. »

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Le corps peut accuser le coup si l’on ne fait pas attention. D’ailleurs, c’est une des grosses batailles du syndicat.

« On a eu 50 morts, l’an dernier. Un mort, c’est déjà trop. C’est une industrie qui est précaire. Le fait que les gens soient peu diplômés, c’est un problème, car ils sont moins bien formés aux règles de sécurité », regrette Éric Boisjoly.

C’est d’ailleurs une des failles du nouveau programme du gouvernement québécois, signale le directeur général du syndicat : en faisant des formations accélérées – trois fois plus courtes qu’une formation classique – il risque d’y avoir des impasses sur la sécurité au travail en plus d’une perte de compétences. Vos chances d’être embauché réduisent alors considérablement.

Devenir un compagnon

Si tu veux te lancer ou te reconvertir dans le secteur de la construction, il vaut mieux délaisser les formations accélérées et devenir compagnon, pour atteindre l’excellence et un bon salaire.

« On a plus de rétention du côté des personnes qualifiées.»

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« Au Québec, on a des volets d’apprentissages. Par exemple, pour obtenir son certificat de compétence compagnon, un charpentier-menuisier doit avoir effectué 6 000 heures de travail », détaille Éric Boisjoly.

Un détail à se rappeler, c’est que devenir compagnon, ce n’est pas pareil pour tous les métiers : il faut compter 2000 heures dans une année d’apprentissage pour devenir compagnon opérateur d’équipement lourd et cinq années d’apprentissage, pour un total 10 000 heures, pour obtenir le même titre en tant que mécanicien d’ascenseur. Ça peut valoir le coup de se renseigner sur l’exigence du métier qu’on vise, avant de se lancer !

Un milieu d’hommes

En revanche, le domaine demeure peu accueillant pour les femmes. Le corps de métier est en grande majorité composé d’hommes, regrette Éric Boisjoly : « On a un problème de rétention de femmes, au Québec. Les employeurs ont dû mal à s’ouvrir et à s’adapter. »

« Le secteur de la construction n’est composé que de 3 % de femmes. Malgré tout, je les encourage à appliquer, et à travailler de pair avec les syndicats ».

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Par ailleurs, Boisjoly souligne que la plupart des syndicats de la construction ont un comité de travailleuses, afin de faciliter leur insertion dans un milieu encore assez réfractaire.

Mais Éric Boisjoly ne veut pas finir sur une mauvaise note : « C’est quand même une belle industrie! On travaille à l’extérieur, on fait plein de tâches variées. C’est un beau domaine d’activité. »