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« Préfères-tu une petite fille ou un petit gars » ?
Cette question-là, je l’ai entendue des dizaines et des dizaines de fois dans les derniers mois. J’ai toujours donné la même réponse : peu importe. C’est sincère. J’ai autant envie d’être le papa d’un ou de l’autre, même si je suis conscient que ce sont sans doute deux expériences assez différentes.
J’ai l’impression que beaucoup ont tendance à croire que les hommes préfèrent avoir un garçon. Peut-être que la croyance populaire se base sur la présomption qu’il sera plus facile pour nous de lui transmettre nos passions, de faire du sport avec lui, de l’introduire aux jeux vidéos, de l’accompagner dans ses premiers élans romantiques… Bref, d’en faire une projection, ou une nouvelle version améliorée, de nous-mêmes, si on creuse la signification psychologique de la chose.
Mais quand on y réfléchit un minimum, on réalise rapidement que c’est une manière plutôt réductrice de voir les choses.
Je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas, quand ma fille sera assez vieille, geeker avec elle en réécoutant pour une énième fois la trilogie de Batman de Nolan, lui apprendre à faire un kickflip, jouer au Nintendo (et battre pour elle les boss trop difficiles) ou, du haut de ma grande expérience parsemée d’erreurs formatrices, m’improviser conseiller amoureux.
Il faut que je m’y prépare, car n’en déplaise à la meilleure amie de ma blonde qui avait prédit un garçon, c’est effectivement une petite fille qui m’attend, dans le ventre de sa maman.
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Le mois dernier, on a acheté notre première propriété (oui, grosse année). En sortant de chez la notaire, un lundi après-midi, à Mont-Saint-Bruno, ma blonde et moi avons décidé d’aller faire un tour chez IKEA pour magasiner des comptoirs (oui, grosse vie).
On attendait les résultats d’un test Harmony pour détecter les risques de Trisomie et, au passage, le sexe de l’enfant. C’est précisément au moment où j’ai stationné la voiture en face de la grande bannière bleue et jaune que ma blonde m’a annoncé qu’on venait de recevoir le courriel. Oui, au IKEA. En allant magasiner pour construire le nid familial. J’aurais voulu écrire une pub que je n’aurais pas fait mieux.
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Les conseillers ont dû nous trouver cutes (ou pathétiques) d’arpenter les allées de démonstration de chambre d’enfant les yeux pleins d’eau en nous tenant par la main. Il faut dire que c’était vraiment un beau moment, magnifié par l’annonce d’un bébé en santé et par le fait qu’un lundi après-midi, il n’y a vraiment pas un chat au IKEA. Le vrai bonheur.
J’ai donc pu commencer à annoncer le sexe autour de moi. Bizarrement, la plupart des gens avaient une réponse similaire : « Ah ben oui, c’était clair que t’allais avoir une fille ». Je me l’explique encore assez mal celle-là, mais j’imagine que c’est en référence à ma sensibilité légendaire et non pas pour souligner le retour du balancier de mes élans humoristiques parfois un peu machos (mais maintenant COMPLÈTEMENT révolus).
Le commentaire qui m’a le plus confronté, c’est assurément celui de ma collègue Gabrielle (accessoirement cheffe de marque pour Mollo), qui, du tac au tac, a pris soin de me corriger lorsque je lui ai annoncé une petite fille, en précisant que, pour le moment, « on présumait une fille, mais que ça pourrait changer une fois son émancipation de genre entamée ».
Oh, OK. Il n’en fallait pas plus pour me confronter à un reality check me rappelant que je ne pourrai plus jamais prendre une posture d’observateur sur la question de genre.
Il est maintenant possible que ma propre descendance s’engage dans une quête qui la mènera sur un chemin différent que celui transmis par son bagage génétique.
J’avoue que je n’y étais pas préparé et que, bien franchement, ça m’habite depuis. J’ai d’abord et avant tout peur de voir mon enfant être marginalisé, voire intimidé. Elle – ou iel – n’est pas encore né.e que j’ai déjà envie de le.la protéger. Ça doit être un bon signe. Mais pour le moment, si vous me le permettez (et que Gabrielle n’édite pas mon texte), je vais la désigner comme elle et on verra pour plus tard.
Comme dirait mon bon ami Simon à propos du genre de son petit Maurice, « y décidera ben »! Simon est habitué à la mettre top corner quand on joue au hockey et force est d’admettre qu’il est le même genre de MVP dans son nouveau rôle de père.
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Si on revient à la question de départ, au fond, ce que je préfère, c’est d’abord et avant tout un enfant en bonne santé. C’est ma principale inquiétude en ce moment, même si on a écarté la Trisomie de l’équation, et j’en aurai le cœur net qu’une fois que la sage-femme me l’aura mis entre les mains en affirmant que tout est beau. Après, ma fille pourra avoir le genre, la vie ou les passions qu’elle souhaite ou qui lui semble naturels.
C’est certain que j’aurai de la peine si elle n’est pas attentive quand je lui expliquerai pourquoi ce sont les motivations psychologiques du Joker qui en font un bon méchant, pourquoi c’est toujours important d’explorer l’arrière du point de départ d’un nouveau tableau dans un jeu vidéo ou comment placer ses pieds pour faire flipper un skateboard.
Mais une chose est sûre, je n’en aurai pas si elle choisit une voie d’émancipation qui n’était pas celle qu’on avait prévue.
Là, ça sera à elle de me guider là-dedans. Et je serai bien attentif.