.jpg)
C’est-tu si pire si… je ne fais pas les devoirs avec mon enfant?
Multiplication à la mitaine, révision de mots de vocabulaire, exercices dans le cahier… Pensiez-vous en avoir fini avec les devoirs, le jour où vous avez gradu é?
Et bien non! Comme parents, les devoirs et leçons reviennent nous hanter, d’une toute nouvelle façon. Entre le service de garde, le souper et la pratique de hockey, pas toujours facile de trouver un moment pour conjuguer le verbe avoir avec son enfant. Est-ce que vous condamnez ainsi votre progéniture à un avenir de débauche, ou pire encore, de vote pour Éric Duhaime? En d’autres mots, si vous n’arrivez pas à faire les devoirs avec votre enfant, c’est tu SI pire que ça?
Dur dur, de faire les devoirs
Si vous trouvez difficile d’intégrer la routine des devoirs dans l’horaire de votre enfant, rassurez-vous tout de suite, vous êtes loin d’être seul.e! Une demi-heure de travail par soir, ça semble peu en théorie, mais en pratique, on fait ça quand?
« J’arrive du travail à 18h », explique Carolina, mère d’un garçon de 7 ans. « C’est déjà tard. Si je veux que mon enfant se couche à 19h30, 20h, ça me donne quoi, une heure et demie, deux heures pour jouer avec lui, prendre sa douche, manger, faire les devoirs… C’est difficile, cette partie-là, intégrer les devoirs dans la routine. »
Même quand on trouve le temps pour le travail scolaire, à la maison, ça ne veut pas dire qu’on est sortis du bois. Pour plusieurs familles, l’heure des devoirs peut devenir une source de tension, voire de conflit entre parents et enfants.
Bref, quand le seul temps libre en famille est passé à s’obstiner autour d’un cahier Canada, on peut vite avoir le goût de lancer les devoirs par la fenêtre!
Le dark side des devoirs
Il n’y a pas que les parents qui remettent les devoirs en question. Au cours du dernier siècle, le débat sur leur pertinence est revenu à peu près aussi souvent que la mode des pantalons à pattes d’éléphants (c’est-à-dire souvent). De nos jours, en plus de leur impact sur la vie familiale, on reproche aux devoirs de nuire à la motivation des élèves, surtout si les tâches demandées sont trop longues ou difficiles à réaliser.
Le travail à la maison réduit aussi le temps libre des enfants, qui est crucial dans leur développement. Selon plusieurs, ce temps après l’école serait mieux investi dans du jeu libre (très formateur pour un enfant) ou de l’activité physique.
Pourquoi on en donne, d’abord?
À ce stade-ci, vous vous demandez peut-être pourquoi les écoles continuent de donner des devoirs, puisque je viens de basher la pratique pendant huit paragraphes. C’est vrai, les devoirs et leçons ont leurs limites, mais, malgré tout, les plus récentes recherches y voient quand même des bénéfices, à condition que le travail assigné respecte certaines conditions.
On a longtemps questionné l’efficacité des devoirs parce que leur impact sur les résultats scolaires, surtout au primaire, était plutôt mitigé.
Depuis, des recherches se sont penchées plus en détails sur les différents facteurs pouvant influencer la réussite scolaire des élèves, et une des conclusions tirées est que les devoirs peuvent effectivement mener à de meilleurs résultats scolaires. (Spoiler alert : ça aide aussi si on est riche.)
En effet, pratiquer des notions apprises en classe, mais dans de nouveaux contextes, contribue à l’intégration des apprentissages chez les élèves. En plus, une routine de devoirs bien encadrée favorise le développement d’habiletés cognitives, comme le sens de l’organisation. Selon Odile, enseignante au 3e cycle du primaire, c’est leur principal avantage. « L’intérêt d’avoir des devoirs, surtout vers la fin du primaire, c’est que l’enfant soit capable, tranquillement et de façon autonome, de s’asseoir, regarder ce qu’il a à faire, et se mettre au travail, » explique-t-elle. « Vers la fin de la semaine, je regarde si la majorité des travaux a été complétée, plutôt que s’ils ont tout fait et qu’il n’y ait pas d’erreurs. Je m’attends au minimum à ce que le devoir ait été ouvert et que l’enfant ait fait un effort. »
Bref, les devoirs, ça aide. Mais ça ne veut pas dire qu’il faut noyer nos enfants sous le travail pour leur assurer une place à Harvard! Au contraire, les devoirs sont beaucoup plus efficaces s’ils sont courts, fréquents et bien ciblés.
Alors, comme parent, comment aider mon enfant?
J’arrive à mon « plot twist » (vous allez voir, c’est savoureux!):
Contrairement à ce qu’on peut penser, faire tous les devoirs à côté de son enfant en le corrigeant au fur et à mesure, ce n’est pas la meilleure façon de l’aider. *Soupir de soulagement chez les parents du Québec.*
Oui, l’implication des parents dans le travail scolaire est primordiale, mais vous aiderez beaucoup plus votre ti-pou en l’aidant à s’organiser qu’en lui faisant recommencer cinq fois la même addition.
« Il faut que le parent soit impliqué. Cela dit, le parent n’a pas à forcément s’impliquer dans l’enseignement en tant que tel », dit Christophe, prof de première année. « Moi, je ne donne pas de travaux écrits. Je m’attends à ce que le parent revienne sur les apprentissages qui ont déjà été faits, mais je ne veux pas que ce soit systématique, comme à l’école. Si on peut relire les phonèmes, syllabes, mots et phrases vues en classe régulièrement, c’est bien. Mais si le fait de relire ce qui a été appris devient une contrainte et que c’est difficilement gérable pour la famille, ne le faites pas. Le but, ce n’est pas d’écoeurer les élèves. »
Bien sûr, dans les premières années d’école, l’implication du parent sera plus grande, mais, à mesure que votre enfant développera son autonomie, votre rôle sera plutôt de superviser la séance de devoir, et d’offrir du support, si votre enfant le demande. « Je m’attends à ce que le parent aide l’enfant à s’organiser au niveau logistique, » dit Odile. « Par exemple, pour trouver un endroit où travailler, lui dire de regarder son agenda pour voir ce qu’il a à faire. »
Et si je veux aller plus loin?
Il est possible que l’enseignant.e de votre enfant ne donne peu ou pas du tout de devoirs, ou peut-être aimeriez-vous tout simplement renforcer ses apprentissages à la maison. Il y a plusieurs façons de pratiquer les notions vues à l’école dans la vie quotidienne, sans toutefois en faire une corvée pour votre enfant. Selon Christophe, par exemple, lire avec son enfant est un excellent moyen de pratiquer le décodage (comprendre les sons, les lettres, les mots) et la compréhension de lecture, tout en favorisant un lien affectif qui rendra l’apprentissage plus significatif.
Même si les devoirs peuvent vite devenir une source de tension pour tous: enfants, parents, et profs, il y a moyen d’en tirer le maximum, sans passer des nuits blanches à chercher le complément du verbe dans la phrase « Mon ami mange une pomme rouge. »
Aussi, n’hésitez pas à demander à l’enseignant.e de votre enfant le niveau d’implication auquel il.elle s’attend de vous par rapport aux devoirs. Vous aurez sûrement le soulagement d’apprendre que, souvent, less is more!