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C’est-tu si pire si… j’achète pas toute la liste de fournitures scolaires de mon enfant?
Quand elle débarque quelques semaines avant la rentrée, la liste de fournitures scolaires donne de l’anxiété à pas mal de familles. Année après année, les parents se posent les mêmes questions : « Coudonc, je suis-tu obligé.e d’acheter tout ça? » Réutiliser un vieux duo-tang, ça se fait-tu? Qu’est-ce qui se passe si je mets juste la moitié des pousse-mines demandés dans l’étui à crayons?
On a fait le point avec une prof d’école primaire et une mère, histoire d’aller une fois pour toutes au fond de la question.
Tout le monde a un type de surligneur favori (ou presque)
D’abord, il faut savoir que ce sont les profs qui décident de la fameuse liste, comme chacun.e a ses préférences et ses besoins. Toutefois, les « spécialistes » (les profs d’art plastique ou d’éducation physique, par exemple), y ajoutent aussi leurs demandes spécifiques. « Le contenu de la liste dépend vraiment d’une école à l’autre, et d’un quartier à l’autre, sans parler de la différence entre le public et le privé. J’ai déjà vu des listes scolaires d’écoles privées où on demandait un iPad! », indique Mélissa, qui enseigne au premier cycle du primaire. Dans l’école de Mélissa, le conseil d’établissement, où siègent des parents, approuve le montant maximal déterminé pour les listes. Cette année, il est de 80 $. « On veut diminuer le prix, mais c’est difficile », concède la professeure.
D’autant plus qu’au montant de base pour les fournitures s’ajoute celui pour les impressions et les photocopies, qui, lui aussi, doit être déboursé par le parent.
« Les fournitures scolaires, c’est la pointe de l’iceberg. Ce qui coûte cher, c’est tout le reste : la gourde, la troisième paire de souliers pour l’éducation physique, le sac pour mettre les vêtements… », explique Hélène, mère de deux enfants de 4 et 9 ans.
Son plus jeune commence la maternelle cette année alors que sa plus vieille entrera en 4e à l’automne. Tous les parents d’enfant d’âge scolaire l’ont déjà expérimenté : d’une année à l’autre, le matériel change selon les préférences du professeur qui le demande, ce qui rend difficile sa récupération. « Je suis convaincue que ça pourrait être fait avec plus de collaborations entre les années. C’est moins une question de sous que de conscience environnementale », souligne Hélène.
La Loi sur l’instruction publique indique que « les manuels scolaires et le matériel didactique requis pour l’enseignement des programmes d’études doit être fourni gratuitement par l’établissement d’enseignement ». Pour le reste, c’est au parent de cracher le cash. En 2019, un groupe de parents tanné d’acheter des crayons à mine (je résume simplement) a intenté et gagné un recours collectif contre les commissions scolaires du Québec. Au total, 68 organisations ont dû verser 153 M $ aux parents d’enfants ayant fréquenté les écoles de la province dans les années 2010. Depuis, les listes d’effets scolaires à se procurer pour la rentrée se sont raccourcies : on ne peut plus y demander de papiers mouchoirs, par exemple.
Qui paye?
Reste qu’on se demande encore si le contenu de la fameuse liste n’est pas un peu too much. Mélissa justifie sa demande : « 20 crayons, honnêtement, ça a l’air énorme, mais à la fin de l’année, plusieurs élèves n’en ont plus et je dois les fournir moi-même. Durant l’année scolaire, je n’ose pas redemander du matériel aux parents », explique-t-elle. Ces crayons supplémentaires-là, doit-on le préciser, elle les paye de sa poche.
Si je comprends bien, les hautes quantités de matériel sont donc en partie balisées par les élèves qui les utilisent au maximum. « On dirait qu’on n’a pas la latitude comme parent de penser les quantités en fonction de notre enfant. Je sens une pression de respecter la liste. Je ne prends pas de liberté », confie Hélène, qui m’indique au passage connaître plusieurs parents qui, contrairement à elle, n’ont pas peur de ne pas acheter tout le matériel demandé par l’enseignant.e de leur jeune. Mélissa soupire.
« Mon plus gros défi, c’est d’avoir tous les items scolaires en début d’année. C’est très rare qu’à la première semaine tout le monde les a en main », raconte-t-elle.
Bien sûr, certaines familles à faible revenu peuvent avoir de la difficulté à trouver les sous pour payer les gommes à effacer et les 40 feutres demandés par l’école. « Des familles qui n’avaient aucun effet scolaire, ça m’arrive chaque année », indique Mélissa. En plus du Supplément pour l’achat de fournitures scolaires, une aide financière de 115 $ par enfant octroyée par le Gouvernement du Québec, il existe plusieurs organismes avec un programme d’aide pour les effets scolaires.
Ok, mais au final, c’est-tu si pire que ça, si on n’achète pas toute la liste même si on en a les moyens ? Hélène pense que oui. « Quand tous les enfants sortent leur duo-tang orange et que toi ta fille a le mauve, elle va se le faire dire devant tout le monde. La personne qui va payer le prix de ne pas suivre la règle, ce sont les enfants », conclut-elle. Pour ne pas faire (littéralement) payer les profs de leur poche, mieux vaut donc se conformer et acheter les items demandés.