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Ces couples qui n’ont pas d’enfants parce que ça coûte trop cher
Au Québec, le taux de natalité chute depuis plusieurs années. Le contexte économique incertain et les politiques gouvernementales pour accompagner les parents ne suffisent pas pour soutenir les Québécois.es qui désireraient fonder une famille. De nombreux ménages doivent se serrer de plus en plus la ceinture, alors qu’élever un enfant de la naissance à la majorité coûtait en moyenne 293 000$ en 2017.
Même si d’autres facteurs pèsent dans la balance pour Kassandre, Alexe et leurs conjoints respectifs, l’aspect financier joue un rôle certain dans leur décision de ne pas avoir d’enfants.
Un contexte peu propice
« Je me suis toujours dit que si j’avais des enfants, un jour, ça serait quand j’allais avoir une maison où il y a une bulle pour chaque personne, un espace à moi », confie Kassandre, 27 ans.
Mais avec son conjoint, ils constatent qu’acheter une propriété dans leur quartier (Limoilou, à Québec) est au-dessus de leurs moyens.
À cette situation s’ajoute la perte récente de l’emploi de vendeuse de Kassandre. Malgré 11 ans d’expérience dans le service à la clientèle et l’envoi de nombreux CV, elle ne parvient pas à se faire embaucher.
Aux entrées d’argent qui se font plus rares s’ajoutent les dépenses à la hausse pour la jeune femme : même si le pouvoir d’achat de la majorité des ménages québécois a augmenté par rapport à 2019, il s’est toutefois détérioré pour certains par rapport à 2020.
La jeune femme confie que la hausse du coût de la vie et l’annonce récente de la fin du gel des prix à l’épicerie sont également une source d’inquiétude financière pour elle et son conjoint.
Kassandre avoue d’ailleurs n’avoir jamais vraiment appris à gérer ses finances. Elle est loin d’être la seule : la note de connaissance en littératie financière des Québécois.es serait de 54%, selon une étude de 2023 de l’Autorité des marchés financiers.
« Je ne suis même pas capable de respecter un budget, comment je vais faire si en plus, il y a un enfant à considérer? », se questionne-t-elle.
Après quatre ans sur le marché du travail, Kassandre a décidé de retourner aux études pour tenter de trouver un emploi avec un meilleur salaire. Elle espère qu’une fois qu’elle aura obtenu son diplôme en administration, elle trouvera un emploi mieux rémunéré qui lui permettra de rembourser ses dettes d’études, de se stabiliser financièrement et même d’économiser.
« Après ça, si je peux me le permettre, dépendamment où j’en serai rendue dans ma vie, j’essaierai [d’avoir un enfant] », confie-t-elle.
Un risque d’appauvrissement
Alexe, une enseignante au secondaire de 29 ans, confie également que l’accès à la propriété lui est difficile, en ce moment : « Quand je montrais à ma mère le montant de l’hypothèque juste pour une petite maison en dehors de Montréal, elle n’en revenait pas. »
Alexe a d’ailleurs récemment pris conscience de l‘appauvrissement que certaines femmes subissent pendant leur congé de maternité, en raison de la baisse de leurs revenus, grâce à un vox pop sur le compte instagram elleinvestit.
« Déjà que je ne me voyais pas avoir d’enfants, je me suis dit qu’il n’y avait aucune chance qu’on survive à ça », affirme-t-elle.
Elle ajoute que dans son entourage, deux couples ont pris la décision de prolonger leur congé parental, faute de trouver des places abordables en garderie. « Pour moi [la façon dont ils s’en sortent financièrement], sonne comme de la magie », constate-t-elle
Le manque de places en garderie est aussi une source d’hésitation pour Kassandre et son conjoint. « Quand tu es enceinte, il faut déjà que tu appliques pour une place en garderie, sans avoir la certitude que ça marchera », affirme-t-elle.
Responsabilités, écoanxiété… et autres
Mais le facteur financier n’est pas la seule raison qui joue dans le choix des deux jeunes femmes.
Pour Kassandre, qui a grandi comme enfant unique, cela a toujours été une question délicate. « C’est tellement de grosses responsabilités, d’avoir des enfants », confie-t-elle. Elle confie également que l’actualité anxiogène et sa récente prise de conscience écologique ne l’aident pas à s’imaginer avec un enfant.
Alexe n’a quant à elle jamais été certaine de vouloir être mère. « La raison pour laquelle j’en voulais, c’était dû à une pression sociale : c’était la suite logique au fait d’avoir une maison, d’être en couple, etc., constate-t-elle. Mais je me suis rendue compte que j’avais le choix. »
En tant qu’enseignante, elle ajoute qu’elle ne se voit pas s’occuper d’un enfant le soir alors qu’elle a déjà passé la journée avec ses élèves. « J’ai déjà l’impression que je manque d’énergie, alors je n’imagine pas rajouter un enfant dans l’équation », soutient-elle.
En relation depuis deux ans et demi avec son partenaire, la jeune femme constate que la réalisation de son bien-être dans son couple est devenue sa priorité. « Si cette personne voulait des enfants, je pourrais peut-être travailler là-dessus, confie-t-elle. Mais là, je suis avec quelqu’un qui n’en veut pas et on a d’autres objectifs financiers. Comme l’achat d’une propriété, par exemple. »