.jpg)
Ce que j’ai appris en traversant la Gaspésie en ski
Peu de choses me réjouissent autant qu’un vent de face en plein mois de janvier. Cette impression d ’être une survivante, ce winter glow instantané, cette occasion en or de lancer, avec satisfaction ET une pointe d’insolence, à un proche qui a passé l’après-midi au centre commercial « J’ai fait de la raquette à -25 toute la journée, c’était merveilleux et vivifiant. Toi? ».
Mes skis amoureusement fartés, mes laines de mérinos, ma cagoule de ninja du Nord et moi on a donc pris le bus vers l’est. Et on a pas été déçus.
Bref, j’aime l’hiver. Pas au point de vouloir être une White Walker, mais assez pour qu’en février dernier, je m’invite à la Traversée de la Gaspésie hivernale. Tous les jours pendant une semaine, on allait faire à peu près 30 km de ski de fond en montagne dans des paysages somptueux (non, il n’y a pas d’abus d’adjectif ici). Quand ils ont dit oui-avec-plaisir-vient-on-va-avoir-du-fun, j’ai su ce que Mathieu et Claudie avaient ressenti devant leur billet pour l’île Maurice.
Mes skis amoureusement fartés, mes laines de mérinos, ma cagoule de ninja du Nord et moi on a donc pris le bus vers l’est. Et on a pas été déçus.
Voici donc cinq choses que j’ai apprises pendant cette semaine dans la poudreuse, heureuse comme ce panda.
Paysages de la Gaspésie 1 – Mes photos de paysages de la Gaspésie 0
Les lambeaux de brume qui se lèvent sur le mont Albert aux aurores, le fleuve givré à Matane marié à un horizon orange-rose [insérez la quote inspirationnelle de votre choix ici], la neige extra fluffy des Chic-Chocs. Et cette petite voix intérieure qui susurre « J’ai tellement hâte de tagger @natgeotravel sur IG » chaque fois que je dégaine mon iPhone pour croquer le décor. Aucun doute, ces photos seront magnifiques.
Sauf que. Sauf que tout ce que j’ai l’impression d’avoir dans mon téléphone, ce sont des images mal exposées, mal cadrées, où la forêt grandiose du parc national de la Gaspésie a l’air, en 3:4, d’une haie de cèdres chétive et mal entretenue dans le parc industriel de Longueuil. Pas que les paysages soient moches. Au contraire, c’est justement ça le problème : mes skills de photographe n’arriveront jamais à rendre justice à tant de beauté, le résultat sera toujours beau, mais pas aussi beau que la réalité. Au bout du Jour 3, j’ai dû abandonner à regret ma (très brève) carrière de paparazzi du flocon. Devant le .jpg, c’est toujours la Gaspésie qui va gagner.
.jpg)
C’était encore plus beau en vrai.
Tous les boomers ne sont pas égaux devant le « Ok »
Tous les âges étaient représentés à la TDLG. Mais…
Quand, rendue à ton 32e km de ski de fond de la journée, un peu fatiguée, rêvassant à un chocolat chaud, tu te fais dépasser par une Gisèle, une Solange ou une Diane de la première fraîcheur, dans une glisse élégante et redoutable d’efficacité, qui te crie un « lâche pas » bienveillant …
Quand, satisfaite de ta vie, tu crois avoir quelques expés hivernales pas pire à ton CV, et qu’un Thierry, un Michel ou un Jacques te racontent la fois où l’un a atteint le pôle Sud en complète autonomie, où l’autre a déjà participé à des défis de ski où le parcours se calcule en milliers de km, et où un autre encore a gravi le Gasherbrum au Pakistan…
Quand tu as toujours pensé être pleine de fantaisie, mais que sur la piste tu croises un Sylvain et un Simon qui font le trajet habillé en licorne et en renard…
Tu te dis qu’être un boomer, ça peut aussi être une qualité. Est-ce que c’est l’eau de Gaspé qui fait ça? En tout cas, si c’est contagieux, je déménage.
.jpg)
#lifegoal
Voler en Gaspésie, c’est possible
Dans les Chic-Chocs, on m’avait prévenue de ne pas manquer le sentier de la crête du mont Vallières-de-Saint-Réal, une splendeur. Au jour J, j’ai donc troqué mes skis pour des raquettes et je suis partie, avec cette petite brise qui s’annonçait délicieuse. Monte, monte, monte, pause. Monte encore, prend une bouchée de barre Clif froide. Monte, enlève un morceau parce que le multicouche est un art que je ne maîtrise pas encore à la perfection. Monte et commence à trouver que les bourrasques sont pas mal intenses.
«Quand tu sens que ça part, mets-toi en boule.» Verdict : en petit bonhomme ou à la verticale, les Vallières sont à la hauteur de leur réputation.
Rien pour me déplaire, jusqu’à ce que, tel un polatouche dans le bassin du Mississippi avec un pelage de Gore-Tex, je me suis mise à voler. Bon d’accord, le vent m’a soulevée de terre, pas beaucoup, pas longtemps, mais juste assez pour que j’ai envie de demander à Christian, qui ouvrait la marche, quoi faire rendue sur la crête parce que si ça continuait comme ça, j’allais devenir Amelia Earhart sans Lockheed Vega. Sa réponse ? « Quand tu sens que ça part, mets-toi en boule. » Verdict : en petit bonhomme ou à la verticale, les Vallières sont à la hauteur de leur réputation.
.jpg)
Prête pour le décollage.
C’est pas les restants le problème, c’est moi qui ne sait pas les cuisiner
Le 26 février, alors qu’on devait se rendre au parc national de la Gaspésie, un blizzard nous a bloqués à Matane. La 132 étant fermée, on a parcouru le fleuve glacé, une randonnée improvisée tellement sympa qu’on aurait dit que c’était le plan A. Cela dit, 250 personnes forcées de rester à l’hôtel, ça fait 250 personnes à recevoir à souper alors que ce n’était pas prévu et que les fournisseurs ne peuvent pas livrer. Angoisse.
Le poids de la neige et The Road ont fait leur oeuvre, j’ai toujours un peu peur d’être à une catastrophe naturelle de manque de bouffe. Mais le chef du Riôtel avait plus d’un tour dans son frigo. Grâce à son talent et aux restants de la veille (un souper où les locavores en avaient eu pour leur argent), il a transformé un touski en véritable festin. Les produits locaux y sont pour quelque chose, c’est sûr.
.jpg)
Marcheur qui a pu faire le plein malgré la tempête.
On ne fait jamais vraiment « le tour » de la Gaspésie
Une partie de ma famille vient de la Gaspésie, j’y vais pratiquement tous les ans. Avant de partir, je me disais que j’allais revoir les beaux coins que j’aimais déjà, mais en ski de fond. Finalement, j’ai encore découvert des gens chouettes (j’en profite pour saluer Sébastien qui m’a texté un soir pour me dire de me grouiller parce qu’il y avait de la Auval au bar, ma définition de l’amitié), je suis tombée dans des pistes que je n’avais jamais empruntées, je me suis délectée de nouveaux mets (allô algues Wakamé Atlantique). J’y retourne donc encore pendant le temps des Fêtes avec une certitude qui fait du bien : on ne fait jamais vraiment « le tour » de la Gaspésie.
.jpg)
À bientôt, Gaspésie!