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Amour et argent : si l’argent n’a pas d’odeur, aurait-il un sexe?
Les dépenses, en tout cas, ont un genre. Et ça ne sent pas forcément bon.
Osez-vous aborder les questions d’argent dans votre couple ? Hélène Belleau et Delphine Lobet ont mené une étude exhaustive sur l’argent et les couples québécois pour le livre L’Amour et l’argent : guide de survie en 60 questions. Dans cette série d’articles, elles nous aident à naviguer à travers les différents aspects de ce phénomène complexe.
Cette semaine, on se demande si la gestion de l’argent se fait de la même façon chez les hommes et chez les femmes.
Admettons. Vous êtes un couple établi. Au quotidien, côté finances, vous mélangez un peu tout. Surtout depuis que vous avez des enfants. L’un se charge des vêtements des enfants, des frais de garde, des soins médicaux; l’autre des gros électros, de la voiture, des placements. Au bout du compte chacun investit dans le ménage de la même façon ou à hauteur de ses moyens. Tout cela vous semble bien équitable.
Admettons maintenant : vous vous séparez (ça arrive aux meilleurs d’entre nous), vous n’êtes pas mariés (ça arrive aussi, c’est même une spécialité québécoise mondiale), vous êtes une femme (une chance sur deux). Eh bien, chère madame, nous sommes au regret de vous annoncer que vous risquez d’y laisser quelques plumes.
Liquide et solide
On sait qu’en général les femmes dépensent plus pour le « liquide », c’est-à-dire pour ce qui passe et s’évapore, et les hommes pour le « solide », pour ce qui dure et reste.
Pourquoi? Parce que les femmes s’occupent encore davantage des tâches domestiques (soupir). Elles font les courses, passent à la pharmacie, rachètent une énième paire de mitaines au petit qui les a encore perdues. Les hommes assument leur part des dépenses en payant pour le reste : les meubles, l’hypothèque, la voiture…
Les couples de même sexe ne sont évidemment pas épargnés par cette spécialisation. Toutefois, celle-ci étant liée à la répartition des tâches, qui reste très genrée, vous êtes statistiquement plus à risque de vous spécialiser si vous êtes hétéro. On dit bien « à risque », car cette spécialisation est problématique. Ses pièges se dévoilent quand survient une séparation (ou le décès du conjoint), chez les conjoints de fait surtout, qui ne bénéficient pas des dispositions du patrimoine familial qui viennent avec le mariage.
Piège #1 : Les petits liquides font les grandes rivières
Le lait acheté au retour du boulot, les pommes, le pain pour les lunchs… Ces petites dépenses, on les oublie facilement quand il s’agit de faire les comptes du ménage. Pourtant, prenez la peine de les comptabiliser une semaine ou deux, vous verrez qu’elles finissent par représenter de gros montants.
Piège #2 : La facture fait le propriétaire
C’est décidé, vous achetez une voiture. Vous la paierez ensemble, moitié-moitié, mais le prêt et les papiers sont établis au nom de monsieur. C’est plus simple, vous dit le vendeur. Les clichés ont la vie longue chez les concessionnaires, mais comme c’est chéri qui utilise le plus la voiture et qui s’occupe généralement de son entretien, vous ne vous obstinez pas. Ça vous arrangera bien de lui rappeler que c’est « sa » voiture quand viendra le temps de changer les pneus. Va pour la mettre au nom de monsieur, puisque ça semble arranger tout le monde.
Oui, tant que tout va bien…
Rappelez-vous, vous n’êtes pas mariés. En cas de rupture, vous n’aurez aucun droit sur la voiture, même si vous l’avez payée autant que lui. Et c’est vrai de tout bien : la facture fait le propriétaire.
Piège 3# : Les bas de laine et les pieds nus
Revenus moins élevés, esprit de sacrifice, supposé manque d’intérêt pour le domaine bancaire, prérogative masculine? Les femmes sont beaucoup moins nombreuses que les hommes à épargner et à investir leur argent.
Si c’est chéri qui épargne pour le ménage, a-t-il songé à mettre les placements à vos deux noms? Il en va des investissements bancaires comme de la voiture : si votre nom n’est pas sur le papier…
Notez qu’ici le mariage ne vous protégera pas entièrement : certains placements ne font pas partie du patrimoine familial (actions, immobilier, CELI, etc.), leur valeur ne sera pas partagée en cas de divorce.
Deux trucs pour se «dépiéger» en attendant l’égalité
On note dans un carnet les petites dépenses, tout le petit liquide qui goutte au quotidien. Pas forcément longtemps, juste pour prendre conscience des montants en jeu. Et ajuster les comptes au besoin.
- On s’assure que les biens importants, le solide, soient achetés aux deux noms. Ou bien on alterne (ton nom sur le frigo, le mien sur le fauteuil), en veillant toujours à équilibrer les possessions. Et on fait de même pour les placements.