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5 choses que vous devriez retenir du nouveau budget
Hier, le ministre des Finances Éric Girard partageait son nouveau budget. D’emblée, on se doutait que quelque chose clochait, parce qu’il a continué de rompre avec cette tradition qu’ont les ministres des Finances de s’acheter de nouveaux souliers la veille de la présentation du budget (il a plutôt donné un montant à un organisme). Était-ce signe qu’on allait manger nos bas?
Le budget ayant été dévoilé, on peut maintenant répondre à cette question de la façon la plus poche qui soit : oui… pis non.
Pour vous aider à y voir plus clair, et surtout pour comprendre ce qui va changer pour vous, je vous ai fait un petit résumé. C’est pas aussi plate que ça a l’air, promis.
1. Le plus gros déficit de l’histoire (rien de moins)
On va commencer avec l’éléphant dans la pièce, : un éléphant nommé « dette de 11 milliards ».
Oui, vous avez bien lu, le budget est déficitaire de 11 milliards, cette année. Si vous vous dites : « Voyons, me semble que c’est beaucoup? », vous avez parfaitement raison ; c’est le plus gros déficit en dollars de l’histoire du Québec. Pourquoi préciser en dollars? Parce qu’en pourcentage du PIB, ce n’est pas le pire (y a eu pire dans les années 1990). En gros, c’est moins pire devoir 11 000$ quand tu gagnes 100 000$ par année que de devoir 8000$ quand tu gagnes 60 000$ par année. Mais t’sé, c’est pas réjouissant, non plus.
Pourquoi ce déficit? À en croire le gouvernement, c’est en grosse partie à cause des augmentations de salaire consenties aux employés de l’État (enseignant.e.s, infirmier.ère.s, etc.) qui ont ajouté une charge de 3 milliards à l’État.
Après, faut quand même faire attention.
Quand on pointe du doigt un poste de dépenses en particulier pour justifier le déficit, c’est politique.
On pourrait aussi dire que le déficit s’explique par la subvention aux Kings de Los Angeles (bon, on s’entend que 7 millions sur 11 milliards, c’est pas grand-chose, mais le symbole passe mal, pareil), par les salaires faramineux des médecins, ou par les salaires des députés, tiens, pourquoi pas?
Un autre problème, c’est qu’en ce moment, l’économie roule pas fort (mais ça, vous le savez déjà, parce que t’sé, tout coûte cher et tout le monde perd sa job), ce qui fait que les revenus de l’État sont moins élevés que d’habitude.
2. Des mesures pour sortir du rouge
Qu’on soit de gauche ou de droite, voir un si gros déficit dans le budget, c’est probablement pas une super bonne nouvelle. Alors, comment le gouvernement espère-t-il réduire ce déficit dans les prochaines années?
D’une part, le ministre Girard entend réduire les aides fiscales aux entreprises en mettant fin à certaines subventions. D’autre part, le gouvernement souhaite demander à ses sociétés d’État (Loto-Québec, SAQ, SQDC, Hydro-Québec) d’augmenter leurs contributions.
On veut aussi lutter contre l’évasion fiscale, ce qui permettrait d’aller chercher jusqu’à 100 millions par année.
L’autre grosse nouvelle, c’est que la subvention à l’achat de véhicules électriques va être réduite progressivement jusqu’à être éliminée en 2027.
Bref, si vous voulez acheter une voiture électrique, c’est peut-être une bonne idée de vous dépêcher.
3. Pas de hausses d’impôts
Par contre, un outil que le gouvernement ne compte pas utiliser pour équilibrer le budget, c’est la hausse d’impôts.
L’an dernier, le gouvernement Legault a baissé les impôts de façon assez importante, réduisant les revenus de l’État de 3,9 milliards de dollars.
Si on était de mauvaise foi, on vous dirait que ces baisses d’impôts qui diminuent les revenus de l’État sont drôlement commodes quand vient le temps de couper dans les services ou mieux encore, de les privatiser. Après tout, faut réduire le déficit, hein?
Mais comme on est de bonne foi, on dira pas ça.
3. Statu quo sur la crise du logement
Pour ma génération (j’ai 32 ans et je suis toujours locataire), la question du logement est assez préoccupante.
Pour beaucoup d’entre nous, être invité à une orgie avec l’élite hollywoodienne semble plus probable que de s’acheter un condo.
Bien, j’ai une mauvaise nouvelle pour vous : c’est pas cette année que ça risque de changer. Pour soulager la crise du logement, le gouvernement continue de compter sur le programme Allocation-logement, qui offre une aide mensuelle allant de 100$ à 170$ pour les gens qui consacrent une partie disproportionnée de leur budget au loyer.
Piiiiis… c’est pas mal toute. Pour le reste, le budget du ministre Girard n’ajoute pas de nouvelles sommes à celles annoncées l’an dernier.
4. D’autres formations rémunérées dans le domaine de la construction
Si vous avez bien suivi jusqu’ici, vous ne serez pas surpris.es d’apprendre qu’il manque de logements dans la province. Eh bien, si votre rêve, c’est de charrier du béton, voilà votre chance : les formations accélérées (et rémunérées 750$ par semaine) dans le domaine de la construction perdurent, question qu’on ait enfin assez de place pour loger tout ce beau monde.
Un programme destiné aux monteurs de ligne va être créé, et une nouvelle cohorte en charpenterie-menuiserie va être lancée dans les prochains mois.
5. Des gros investissements dans les services sociaux et la francisation
Ce budget met en perspective les priorités du gouvernement Legault. Des sommes importantes sont consacrées à la situation du français : 370 millions sur cinq ans pour « favoriser la réussite et la rétention des étudiants universitaires » et « attirer plus d’étudiants francophones », 320 millions sur 5 ans pour renforcer Francisation Québec, et 10 millions s’ajoutent aux 61 millions déjà annoncés pour financer le Programme d’accompagnement et de soutien à l’immigration (PASI).
Mais la part du lion des nouvelles dépenses va à l’éducation et à la santé : 360 millions pour l’accès aux soins, 222,5 millions pour les soins aux aînés, 147,6 millions pour les services sociaux aux jeunes et personnes vulnérables, 545 millions sur 6 ans pour le soutien à la réussite scolaire (incluant le plan de rattrapage post-grève). Aussi, bonne nouvelle, le pourcentage de bâtiments scolaires en mauvais état est passé de 61% à 56% en un an. Ça reste beaucoup, mais ça s’améliore!
Bref, pour les étudiant.e.s et les aîné.e.s, c’est un budget qui vient avec de bonnes nouvelles. Pour les autres, euh, on comprend pourquoi le ministre ne s’est pas acheté de souliers neufs.