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Après un documentaire sur fond de retrouvailles et avant un remake animé et en 3D, URBANIA revisite, par les flancs, la cultissime Guerre des tuques avec quelques artisans du film.
Ce texte est extrait du #33 spécial Hiver québécois.
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Vingt-huit ans après sa sortie en salle, le classique de Roger Cantin réalisé par André Melançon fascine toujours. Première œuvre de la série Contes pour tous, la comédie dramatique fut à l’affiche pendant six mois au Québec avant d’être distribuée dans plus de 125 pays, se taillant une place de choix dans la culture québécoise. “T’as un trou dans ta mitaine”, “T’as de la neige sur ton épaule”, “Cléééooo!!!” et autres lignes fameuses résistent encore et toujours à l’épreuve du temps.
Roger Cantin a puisé dans ses propres souvenirs pour écrire le scénario. “Moi, quand j’étais jeune, j’étais myope. Je faisais très peu de sports… mais je construisais des forts! Des forts qui avaient la superficie du bungalow de mes grands-parents, avec des patinoires à l’intérieur!” Ses souvenirs de batailles de balles de neige, la goutte au nez, ne ressurgissent que des années plus tard. “En revenant à la campagne d’un atelier que j’avais donné à des enfants, je suis passé devant un fort, et les jeux de mon enfance me sont remontés en mémoire.”
Cantin, alors méconnu, se met donc à plancher sur un scénario de long métrage nommé Le château de neige, qu’il espère réaliser. Découragé par une connaissance travaillant à la SODEC qui lui indique que son projet ne pourrait être financé, l’auteur va tout de même de l’avant et se tourne momentanément donc vers le petit écran. Imaginez, La Guerre des tuques aurait pu être une série télé!
En revenant sur l’épisode du financement, qui s’est avéré particulièrement ardu, le réalisateur André Melançon ne mâche pas ses mots. “Si La Guerre des tuques s’était planté, Roch Demers se serait retrouvé au carré Saint-Louis. Il a tout mis là-dedans!”
De l’encre sur le papier, de l’encre dans les boules de neige
Au fil des pages, les souvenirs de Cantin s’entremêlent à la fiction. “Le personnage de Cléo a été inspiré du chien de mon petit voisin sur la rue Aristide, à Saint-Hyacinthe”, se rappelle-t-il. “Son chien était mort et il avait raconté son histoire à ma mère. Je m’étais dit que ça ferait un personnage intéressant”, ajoute-t-il avant de poursuivre avec le bully le plus sympathique de l’histoire du cinéma québécois. “Chabot, c’était Noël Picard, un gars avec qui j’allais à l’école. C’était un gros costaud qui faisait des choses sympathiques comme courir après les filles en tenant une moufette!”
Bien évidemment, le jeune Cantin lui-même s’intègre aussi à la bande. “On me surnommait le Chinois quand j’étais jeune, parce que je ressemblais à un Asiatique. Et dans le film, celui qui fait les forts comme je les faisais, c’est le jeune Chinois!” Même sa conjointe et partenaire de l’époque, Danièle Patenaude, s’y retrouve. “Tous les personnages sont une partie de nous, lance-t-elle. Moi, c’est plus Ti-Guy La Lune…”
Scénario en main, Cantin rencontre Roch Demers, qui démarrait alors une nouvelle boîte, Les Productions La Fête. “J’ai lu le scénario et j’ai trouvé ça fantastique. J’aimais l’atmosphère, les jeux, le rapport filles-garçons”, note Demers. “Mais j’ai demandé à Roger Cantin : ça ne serait pas plus intéressant de le développer en long métrage?”
Après avoir brièvement considéré Claude Jutra, la chaise de réalisateur est finalement confiée à André Melançon, qui avait épaté Roch Demers avec Comme les six doigts de la main, un autre classique mettant en vedette des enfants aventuriers. Avec Cantin et Patenaude, Melançon retravaille le scénario au cours des prochains six mois. Au fil des discussions, le trio jongle avec plusieurs idées dramatiques. À un moment donné, on hésite entre la mort de Cléo et un accident qui enverrait Ti-Guy La Lune à l’hôpital avec une jambe cassée. Melançon revient sur l’épisode : “On se disait que ça chagrinerait tous les enfants du Québec. Mais aujourd’hui, quand on regarde l’impact que ça a eu, c’était clair que c’est le chien qui devait mourir!”
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Le recrutement
Une fois la question du financement réglée (de peine et de misère), Cantin et Patenaude repartent au front : ils ne disposent que de quelques semaines pour former leurs “armées” d’enfants soldats. Melançon commente : “À l’époque, il n’y avait pas d’agence de casting pour les enfants. En 1984, Danièle Patenaude et moi avons visité 30 écoles et plus de 2000 enfants. On rentrait dans les classes, Danielle se présentait aux enfants, leur demandait comment ça allait, etc. Moi, je scrutais les enfants un par un tout en gardant en tête tous les rôles à remplir. J’en ‘spottais’ quatre, cinq et, en accord avec la maîtresse, on les rencontrait dans le corridor puis, le soir même, on demandait aux parents s’ils voulaient que leurs enfants passent un screen test.”
Lisez la suite dans le #33 spécial Hiver québécois.