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Le PAKISTANIMAL TOUR de Philippe Brach – Acte 3
Je me suis ramassé au Pakistan. J’suis juste parti 2 mois. C’est bien peu pour comprendre pis exposer toute la complexité du Pakistan, spécialement quand tu te sens à des années-lumière de ce buzz-là.
Y’a plein de choses dont j’aurais pu parler qui sont tellement chargées et complexes, comme les droits des femmes dans ce pays, la persécution de tout type de minorités, leur rapport trouble envers l’environnement, les paysages incroyables ou encore la fois où on s’est fait suivre par les Services Secrets. Je ne serais définitivement pas le mieux placé pour en parler (d’ailleurs, le journaliste Jasmin Lavoie est en train d’écrire un sale livre là-dessus).
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Se procurer de l’alcool, ça se passe pas au dep’
L’alcool étant techniquement interdit aux musulmans, ça rend la tâche de s’en procurer pas simple pantoute. Je dis techniquement, parce que beaucoup de musulmans en consomment sous le couvert du secret. C’est pas rare de voir un père et un fils qui en prennent, mais qui ne se le diront jamais.
Ici, ça prend un permis de chrétien pour pouvoir acheter de l’alcool.
Faut le comprendre, les conséquences si tu te fais pincer sont moralement graves ; tu peux t’en sortir en donnant un peu d’argent à la police, mais c’est surtout le déshonneur avec la famille qui est très important, parce que dans certains cas, irréparable. C’est moins pire de fumer du hasch (qui est à un prix et une qualité dérisoires) que de se faire pincer avec de l’alcool. Ceux qui boivent ont leur contact de bootlegger pour venir leur en livrer à domicile, au double du prix qui est déjà cher.
Bonjour, puis-je avoir mon permis de chrétien s’il vous plaît ?
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Mais dans tout ça, j’vous ai toujours pas dit comment on s’en procure.
Ici, ça prend un permis de chrétien pour pouvoir acheter de l’alcool. C’est la première fois de ma vie que j’ai le sentiment qu’avoir été baptisé me rapproche réellement de mon salut. Le processus d’approvisionnement est l’équivalent d’aller visiter son oncle en prison ;
Y vendent ça dans le fin fond d’un stationnement en arrière d’un hôtel de luxe.
Vous comprendrez qu’en terme de Nightlife, on est loin du feu Fuzzy de Laval.
Première étape, tu dois passer le premier poste de 2 policiers et leur expliquer que t’es chrétien (même si tu l’es pas), que t’as ton permis (même si tu l’as pas), pis que tu veux acheter de la bière dans le but d’en boire. Le meilleur truc c’est de parler vite en anglais, en droppant 2-3 mots incompréhensibles. Après 2 minutes y finissent par s’en calicer pis te laissent passer.
Deuxième étape, tu passes à un autre poste plus loin avec des gens tout aussi armés, mais cette fois-ci avec un scan comme à l’aéroport. Tu passes ton sac à dos pis tout ce que t’as, le gars regarde semi, pis y te laisse passer.
Troisième étape, tu dois passer devant un militaire derrière une forteresse de sacs de sable. Lui y’é prêt en tabarnak, avec son semi-automatique toujours pointé devant, parce qu’on est jamais à l’abri de se faire assommer par une grosse cannette.
Quatrième étape, t’arrives enfin derrière un mur, ou y’a une grille de la grosseur d’une pochette de vinyle pis y’a un chrétien qui te passe la bière dans des gros sacs de poubelles opaques. Tu le paies mais tu peux aussi négocier, parce qu’on est au Pakistan, pis que tout, partout, se négocie.
Dernière étape, tu fais tout le chemin inverse, t’arrives brûlé chez vous, t’en bois une pis t’es ben chaud.
Vous comprendrez qu’en terme de Nightlife, on est loin du feu Fuzzy de Laval. On se regroupe plutôt de façon close, dans les maisons ou les cafés, pour jaser pis refaire le monde avec des gens de tout acabit. Des médecins, des membres d’ONG, des policiers, des garagistes, des avocats, des enfants.
Faire de la musique, ça se passe pas aux Foufs
J’ai aussi fait une prestation musicale au Pakistan. Ça a l’air ben relaxe dis de même, mais ici t’as pas de J-P Tremblay qui fait un call Facebook aux deux semaines pour savoir c’est qui qui veut jouer au Quai des Brumes. C’est vraiment plus compliqué.
J’ai évidemment parlé de Sud-Soudan pis de Guy Lafleur, vous comprendrez que je suis resté dans les référents efficaces pour atteindre les Pakistanais.
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Même si la compagnie qui produit le show est d’envergure, le spectacle se doit d’être privé et annoncé à la dernière minute, pour éviter que des islamistes radicaux débarquent comme ça s’est déjà vu. Des chanteurs un peu plus progressistes se sont fait assassiner par le passé. Bref, c’est pas jojo essayer de faire de la musique icitte. J’ai aussi entendu quelques fois le discours du «I don’t like music» par des branches plus conservatrices. Comme l’explique Nusrat Fateh Ali Khan (chanteur traditionnel très populaire au Pakistan), certaines personnes sont moralement confuses à propos de la musique, se sentent coupables d’en écouter et la perçoivent comme haram (sacré, inviolable, illicite). Drôle de feeling.
On s’est finalement ramassé dans la grande ville de Lahore pour y jouer. J’ai évidemment parlé de Sud-Soudan pis de Guy Lafleur, vous comprendrez que je suis resté dans les référents efficaces pour atteindre les Pakistanais.
Le statut de la femme est une des rares choses qui me scie encore en deux.
On leur a aussi fait une version pas piquée des vers de J’fais de moi un homme de Bélanger, avec nul autre que LePetitRusse au piano. On attend toujours des réponses pour la sortie d’un éventuel DVD.
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