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Ça peut être difficile à croire pour les lecteurs de cette chronique, mais je mange pas de la poutine à tous les jours. J’essaie tant bien que mal de contrôler ma dépendance en me limitant à une par semaine. Sauf cette semaine. Cette semaine, c’est différent; c’est la Poutine week.
À l’occasion de cette semaine célébrant notre plat national, j’ai été appelé par la rédaction d’URBANIA à dresser l’État du monde (de la poutine) 2016. Je suis donc allé fureter sur le site de la Poutine week afin de voir ce qu’elle avait à offrir.
C’est là que je suis tombé sur cette photo :
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En voyant ça, je n’ai eu qu’un seul mot en tête : “Taaaabarnak!”
Tout de suite après, je me suis demandé qui était l’esti de malade qui avait pensé mettre du mac n’ cheese sur une poutine!? Ma réaction initiale fut de crier à l’hérésie, me disant qu’il y avait des limites à réinventer le plat national, surtout quand il s’agissait d’ajouter un autre féculent dans un plat quand même assez calorique en partant.
Mais en même temps… J’ai fini par me dire que le propre de la poutine est justement d’être décadent. Que toute poutine avait nécessairement l’air un peu dégueue dans l’œil d’un néophyte. En épluchant le menu de la Poutine week où la Mac Attack était clairement la plus décadente, j’ai pensé qu’il était de mon devoir de critique culinaire d’aller l’essayer.
J’avais jamais entendu parler du resto Dirty Dogs avant ce jour-là. Pour être clair, j’allais essayer cette poutine avec l’impression d’en prendre une pour l’équipe. Je me disais que le macaroni au fromage et les frites était à peu près le pire mélange qu’on puisse faire. J’imaginais déjà des frites détrempées dans un mélange de sauce orange et brune qui lève le cœur. Je me préparais à avoir mal au ventre.
Bref, chu rentré dans le resto sans avoir de grandes attentes…
La première chose que j’ai remarquée en rentrant là, c’est que c’est vraiment petit. Y’a pas plus de 10 places assises. La deuxième, c’est que c’est vraiment plein. On était lundi soir, mais y’avait quand même une file de monde qui s’étirait jusque sur le trottoir.
Derrière le comptoir, il y avait Billy, le proprio du resto qui jasait et blaguait avec tout le monde, avant d’aller leur porter les montagnes de frites, de fromages et de macaroni.
En attendant mon plat, je faisais la conversation avec Billy.
C’est là que j’ai appris que le Dirty Dogs avait remporté les grands honneurs de la Poutine week 2015. J’ai aussi appris qu’ils ont travaillé pendant un an sur la recette de la MAC Attack. Il m’a dit : “Tu connais assez la restauration pour savoir que c’est facile de réussir un plat parfait une fois chez toi, mais c’est pas la même affaire pantoute que de répéter l’exploit chaque jour, quelques centaines de fois par jour.” Ce à quoi j’ai répondu par un “hmm hmm”, en hochant la tête d’un air entendu, pour montrer que je savais exactement de quoi il parlait.
C’est là que la bête est arrivée.
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Ça m’a tout pris pour réussir à la prendre en photo avant de me garrocher dessus!
Une crisse de grosse poutine, sous une immense portion de mac n’ cheese, recouverte d’éclats de bacon croustillant et de fines tranches d’échalotes. J’ai pris la première bouchée, sans me douter que ma vie était sur le point de basculer. Car il y a clairement un avant et un après MAC Attack.
À la première bouchée, je n’ai eu que du macaroni et du bacon. Déjà, je voyais que j’avais affaire à un plat exceptionnel. La cuisson des pâtes était parfaite (al dente). Le mélange de sauce aux quatre fromages était onctueux et savoureux. La petite touche de bacon venait enrober la bouchée d’un soupçon de sel, lui conférant des accents de perfection.
Mais avant ma deuxième bouchée, je n’avais pas encore goûté au mélange entre la poutine et le mac n’ cheese, qui restait le pari le plus audacieux de cette recette. Je me suis donc savamment appliqué à rassembler frites, fromage en grains, sauce poutine, macaroni, bacon et échalote sur ma fourchette avant de me lancer dans le vide.
C’est alors que j’ai vécu une Épiphanie.
Car non seulement les ingrédients pris isolément s’approchaient de la perfection, la combinaison desdits ingrédients avait quelque chose de divin, de mystique.
La sauce poutine est une création originale du Dirty Dogs. Elle est juste assez épaisse et juste assez salée. Les frites sont des frites maison, qui gardent leur consistance tout au long de la dégustation, ce qui indique probablement une double cuisson. Cette faculté de la MAC Attack de conserver sa consistance pendant les longues minutes nécessaires à l’ingurgiter est la marque des poutines d’exception.
Au-delà de la consistance, le mélange des saveurs est unique, inimitable et, au risque de me répéter, parfait. Je compte d’ailleurs demander au proprio s’ils ont déjà pensé enlever les salières et poivrières des tables du restaurant, comme dans les restos de fine cuisine… Car ce serait un sacrilège que d’ajouter ne serait-ce qu’une pincée de sel dans cette poutine en risquant ainsi de gâcher un équilibre gustatif aussi fragile que délicat.
J’accorde à cette poutine la note de 9,55/10, la plus haute note de l’histoire de mon palmarès, pour avoir à la fois rempli mon corps et mon être.
Un plat aussi proche de la perfection constitue probablement la preuve que Dieu existe.
Et Il mange de la poutine MAC Attack.
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Pour lire un autre reportage Table d’hôte : “Critique culinaire du resto Le L’Assom” de Rémi Bourget