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La ville de la semaine: Beyrouth

Par
Jehanne Bergé
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Salut toi, je me présente, je suis Belge, je vis à Beyrouth et j’écris un article pour URBANIA. C’est drôle la vie des fois. Je te préviens la ville de Beyrouth est laide, détruite, bombardée, reconstruite, vivante, bruyante, compliquée, joyeuse, triste, surprenante, chaotique, belle, nostalgique. Elle est tout ça en même temps mais elle est surtout complètement insaisissable. Ouais. C’est ça, insaisissable.

Beyrouth? Vraiment?

Le jour où j’ai annoncé à mes proches que je partais vivre ici, la réaction a été presque unanime “heuuuu, t’es sûre que c’est une bonne idée?”. Tu dis Beyrouth, les gens pensent à la guerre et aux bombes. Mais Beyrouth n’est plus ce Beyrouth-là. Les années ont passé. La ville est reconstruite bien que toujours un peu chaotique (il faut bien l’avouer).

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Une histoire de “Je t’aime moi non plus”

La capitale du Liban compte 360 000 habitants et presque deux millions avec la banlieue. Vieille de plusieurs millénaires, elle en a vu passer des hommes. Située en bord de mer, entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique, sa position géographique est plus que stratégique. Elle est multiculturelle et multiconfessionnelle. Beyrouth est comme une femme trop belle qui serait torturée et abimée parce que trop convoitée mais malgré tout, elle continue de lutter pour sa (sur)vie. Coupure d’électricité, eau rationnée, instabilité, corruption, pays voisins belliqueux (c’est un euphémisme), Beyrouth a de quoi courber le dos, mais la ville continue de rire et de danser alors que pour le quart de la moitié de ses fardeaux, d’autres auraient déjà succombé. Et malgré tout ce qu’elle fait subir à ses habitants, ils continuent de l’aimer autant qu’ils la haïssent.

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Un chaos organisé

À peine arrivée, c’est déjà le bordel: Welcome to Lebanon! Tu sors, il fait chaud, ça sent l’essence, le mazout, le goudron, les grillades, la poubelle et le narguilé (et parfois les fleurs si t’es chanceux). Une fanfare de klaxons t’accueille.

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Niveau urbanisme, tu remarqueras assez vite qu’il faut pas chercher de logique, il y a des immeubles sans structures architecturales et quelques terrains vagues.

De temps en temps, sur les portes des garages ou sur les murs, tu vois les traces laissées par les balles, souvenirs d’un temps sombre que tous préfèrent oublier. Au milieu de tout ça, quelques vieilles façades fragiles de style traditionnel et d’une beauté implacable, témoins du temps où on disait du Liban qu’il était la Suisse du Moyen-Orient.

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Niveau transport, pas de train, ni de metro, ni de bus en fait. C’est le paradis de la voiture et des embouteillages. Même que s’il y a deux voies sur la route, les autos forment 4 files. Un chaos organisé, tel est le slogan de la ville.

“Esti, les gens sont canons ici!”

À Beyrouth, les gens sont beaux. Vraiment beaux. Garçons ou filles, petits ou grands, vieux ou jeunes. Peu importe l’heure, ils sont lavés, apprêtés, pimpés. Parfois trop. Lifting, bouche refaite, seins siliconés: c’est la teuf du bistouri. Mais à côté des barbies plastique, il y a aussi de véritables beautés. L’autre soir, j’étais fascinée par une gang de filles aux longs cheveux soyeux, fraiches comme le jour, qui semblaient tout droit sorties d’un conte des 1001 nuits. Et moi j’étais là avec mes cheveux filasses qui collaient à mon front et je me disais que la vie était parfois vraiment trop injuste.

“Envoie-moi ta localisation sur Whatsapp”

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Ici, il y a pas vraiment d’adresses. On ne dit pas “Je vais au 54, rue Jean Moulin”, mais “Je vais au dernier immeuble de la rue qui monte près du supermarché de tel quartier”. Alors oui, évidemment quand tu viens d’arriver et que tu connais pas encore grand chose, c’est pas simple de s’y retrouver. Du coup, le plan B, c’est de s’envoyer la géolocalisation sur whatsapp pour ensuite se googlemapper. Pratique. Et puis bah, si t’as pas la 3G, tu peux toujours demander ton chemin à l’épicier du coin.

Ville de la teuf

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À Beyrouth, c’est la fête. “Ah tiens, il est minuit il y a plein de monde dans les bars, on est quel jour? Lundi. Ah ok.” Beyrouth ne dort jamais. Ce n’est pas un mythe, c’est vrai. Des teufs blingbling, des petits concerts underground, des grosses parties de junkies. Il y en a pour tous les goûts, tous les jours à toute heure!

Vous remettrez bien un sac plastique autour de votre emballage?

L’écologie, ce n’est pas encore au top des priorités. On le voit présentement avec la crise des poubelles, la politique de gestion des déchets est un vrai problème de société: suremballage à l’épicerie, pas de tri des ordures, décharge illégale le long des routes, très peu d’agriculture biologique, aucune mobilité verte. Ouais, tu vois, c’est pas encore dingue. Sans parler de la pollution dans la ville due au nombre de voitures. Quand j’ai débarqué ici, j’avais la ferme intention de faire tous mes déplacements en vélo puis je me suis résignée en me disant que mourir d’un cancer du poumon dans l’année, c’était pas une top idée.

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Le matin à la mer, l’aprèm à la montagne

Le Liban est un tout petit pays de 10 452 km² (soit 955 fois plus petit que le Canada). Il y a 220 kilomètres de littoral, mais la plupart des endroits sont privés ou inaccessibles. Mais ouf, il y a quand même quelques plages publiques bien aménagées. À l’intérieur des terres, on retrouve de magnifiques montagnes, (en hiver on peut même faire du ski), il y a des rivières, des vallées. Bref, tu peux commencer ta journée par un petit plongeon dans la Méditerranée et enchainer avec un trek en pleine nature. Ouais, on va pas se mentir, c’est plutôt cool. Ah oui, sans oublier qu’au pays des cèdres, il y 300 jours de soleil par an, pas mal quoi.

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“Hi, kiffak, ça va?”

“Hi, kiffak, ça va?”, la formule de base quand tu rencontres quelqu’un. Ici, on mélange l’anglais, le français et l’arabe dans la même discussion. Les Libanais étudient en partie en français, travaillent souvent en anglais et vivent la vie de tous les jours en arabe. Un bon gros mix linguistique à l’image de la société toute entière.

La bouffe

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Que celui qui n’aime pas la cuisine libanaise ferme cette fenêtre sur-le-champ. Connus à travers le monde pour leur gastronomie, les Libanais savent faire jouer les papilles. À Beyrouth, il y a des restos, des snacks ou des vendeurs ambulants à peu près tous les 10 mètres. Ici, manger est un art de vivre. Perso, j’adhère complètement. Taboulé, houmous, labneh (que je définirais par un entre-yaourt-et-fromage), fattouche (délicieuse salade), chankliche (fromage fermenté assez salé) et j’en passe. Sans oublier, la mankouché (sorte de pizza au thym), le chawarma (sandwich traditionnel) ou encore les falafels. Niveau dessert, il y a de quoi faire aussi: les gâteaux aux dattes, aux noix ou à l’eau de rose. Le tout accompagné d’une délicieuse limonade menthe-citron et d’un narguilé parfumé à la fin du repas. Ah, je meurs.

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PS: BIG UP aux copains libanais qui m’aident jour à après jour à comprendre un peu mieux cette ville passionnante peuplée de passionnés!

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Pour lire un autre reportage “Ville de la semaine” : Sherbrooke.

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